L'inflation bouleverse les comportements de consommation, y compris sur les achats alimentaires. Au Royaume-Uni, pays qui connaît le niveau d'inflation le plus élevé d'Europe occidentale avec un taux qui a encore accéléré à 9,1% en mai et pourrait atteindre 11% en fin d'année, la crise du coût de la vie commence à se voir dans les dépenses alimentaires. Elles ont reculé d'1,6% en volume en mai, selon l'Office nationale des statistiques (ONS). Parmi les raisons de ce recul, l'institut statistique britannique évoque logiquement « la hausse des prix des denrées alimentaires et du coût de la vie ». Dans les faits, de plus en plus de Britanniques se ruent dans les banques alimentaires.
Le recul des ventes alimentaires pèse sur l'ensemble du commerce de détail dans le pays. Au global, les volumes vendus ont reculé de 0,5% en mai après un petit rebond de 0,4% en avril. Face à l'inflation, les consommateurs achètent « moins de presque tout, de la nourriture à l'ameublement », commente Danni Hewson, analyste de AJ Bell. « Aux caisses des supermarchés, les gens se fixent des limites, optent davantage pour les marques de distributeurs dans l'espoir d'obtenir un peu plus pour un peu moins » d'argent, poursuit l'analyste, cité par l'AFP.
Fin mai, le ministre britannique des Finances, Rishi Sunak, avait annoncé un nouveau programme de 15 milliards de livres (17,63 milliards d'euros) pour soutenir les ménages. Mais alors que le pays a vu son PIB reculer pour le deuxième mois consécutif en avril (-0,3%), le climat social est tendu. Actuellement, le pays fait face à la plus grosse grève du rail en trente ans et des débrayages sont prévus ou envisagés parmi le personnel aéroportuaire, les avocats, mais aussi les enseignants, les postiers ou dans la santé.
Et si les Britanniques rognent sur leurs dépenses alimentaires, ils ne renoncent pas à toutes leurs dépenses. Les ventes de détail sont restées 2,6% au-dessus du niveau d'avant la pandémie, et les ventes de carburants automobiles ont augmenté d'1,1% en mai, ce qui peut s'expliquer par un recours moindre au télétravail, relève l'institut statistique. Si les magasins de meubles ont vu leurs ventes se replier, les ventes de vêtements ont quant à elles augmenté de 2,2% en mai. Cela montre que tous n'ont pas besoin de se serrer la ceinture et « la forte reprise des voyages a conduit certains consommateurs à dépenser davantage » en prévision des vacances, « en particulier dans les vêtements et les chaussures », explique Oliver Vernon-Harcourt, de Deloitte.
Les Français aussi réduisent leurs dépenses alimentaires
Globalement, tous les pays européens sont concernés par la hausse des prix des aliments. D'après une étude publiée fin mai par Allianz Trade, « l'inflation alimentaire coûterait au consommateur européen moyen 243 euros supplémentaires pour le même panier de produits alimentaires par rapport à 2021 ».
Face à l'inflation, les consommateurs français renonceraient eux aussi à certains achats alimentaires, en particulier des produits frais. Alors qu'en mai, les prix à la consommation ont augmenté de 0,7 % sur un mois et de 5,2 % sur un an, les ventes de produits frais se sont effondrée en avril-mai (-12% par rapport à la même période en 2021). Les consommateurs ont acheté beaucoup moins de viandes (-22%), de fromages (-26%) et de charcuterie (-33%), d'après un baromètre LSA et Kantar Worldpanel, publié jeudi.
Pour lutter à la fois contre l'insécurité alimentaire et promouvoir une consommation saine et écologique à un prix accessible, lors de sa campagne, Emmanuel Macron avait promis un chèque alimentaire. Mais pour l'instant, si le principe est acté, sa mise en place technique, elle, donne lieu à d'âpres batailles.