Avec sa "taxe Tobin", Sarkozy jette un froid sur le sommet franco-allemand

Le couple franco-allemand risque de nouveau d'être mis à l'épreuve lundi à Berlin, où Nicolas Sarkozy, pressé par ses échéances électorales, plaidera pour une accélération de la mise en place d'une taxe sur les transactions financières. Ce projet est d'ores et déjà très critiqué par les spécialistes, y compris lorsqu'ils sont proches de la majorité.
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Le sujet sera, avec le Conseil européen du 30 janvier, au menu d'un déjeuner de travail du président français et de la chancelière Angela Merkel, qui ont pris l'habitude de se voir avant chaque sommet pour accorder leurs violons.

Nicolas Sarkozy souhaite que la zone euro "donne l'exemple" et adopte sans traîner cette taxe, qui se heurte au niveau de l'Union européenne à l'hostilité du Royaume-Uni et de la Suède.

Il a averti vendredi que la France n'excluait pas d'avancer seule si elle ne ralliait pas ses partenaires à sa démarche.

"Nous n'attendrons pas que tous les autres soient d'accord pour la mettre en oeuvre", a déclaré le chef de l'Etat, qui en a fait une priorité de la fin de son quinquennat, avant l'élection présidentielle des 22 avril et 6 mai.

Or, Berlin et le président du Conseil italien Mario Monti ont fait savoir qu'ils n'aimaient guère l'idée d'une initiative précipitée et solitaire, jugée périlleuse par des économistes.

Le porte-parole de la chancelière Angela Merkel, Steffen Seibert, a rappelé que l'objectif restait pour l'Allemagne l'introduction d'une telle taxe au niveau de l'UE.

"Il faut une perspective européenne à laquelle nous travaillons tous", a pour sa part déclaré vendredi à Paris Mario Monti, pour qui cela "doit concerner au moins la zone euro".

À MARCHE FORCÉE

Hors de l'UE, la taxe sur les transactions financière (TTF), avatar de la taxe proposée par le prix Nobel d'économie James Tobin au début des années 1970 contre la spéculation, n'a l'appui que d'une poignée de pays émergents.

Dans l'UE, l'idée est soutenue par la France, l'Allemagne, l'Espagne, l'Italie et la Commission européenne, qui propose sa mise en oeuvre en 2014, ce que le rejet britannique et suédois rend cependant improbable à 27 dans un avenir prévisible.

Face à ce blocage annoncé, la France milite pour une mise en oeuvre de la TTF par les 17 pays de la zone euro ou, à défaut, par un groupe pionnier et pour une accélération du calendrier.

Le ministre de l'Economie, François Baroin, a annoncé le 14 décembre que son homologue allemand, Wolfgang Schaüble, et lui-même présenteraient le 23 janvier à leurs collègues européens, une "contribution" pour une taxe opérationnelle dès 2013.

Le 31 décembre, Nicolas Sarkozy, probable candidat à sa propre succession et soucieux de se présenter en protecteur des Français face à la crise économique, a donné dans ses voeux à la Nation le signal d'un nouveau coup d'accélérateur.

Les "dérèglements de la finance", a-t-il alors expliqué, sont "largement" à l'origine de la crise et il faut la faire participer à la "réparation des dégâts qu'elle a provoqués."

Le ministre des Affaires européennes, Jean Leonetti, a annoncé dans la foulée la création d'une TTF avant fin 2012.

Le conseiller spécial de Nicolas Sarkozy, Henri Guaino, a précisé vendredi que Paris prendrait sa décision avant fin janvier -"c'est mieux s'il y a l'Allemagne", a-t-il souligné. "Mais la France est prête à donner l'exemple."

La stratégie de la France reste d'essayer de rallier le plus de partenaires possible d'ici le sommet du 30 janvier. Mais elle ne peut guère espérer y parvenir sans l'Allemagne.

Si d'ici le 30 janvier une dynamique en faveur d'une TTF dans toute ou partie de la zone euro n'a pu être enclenchée, la France n'écarte donc pas l'hypothèse d'y aller seule, confirme-t-on de source gouvernementale à Paris.

Le gouvernement pourrait alors légiférer dans le cadre d'une loi de finances rectificative soumise au Parlement en février.

STRATÉGIE À RISQUE

"Y aller seuls c'est complètement suicidaire, ça va tuer la place de Paris", estime cependant Christian Saint-Etienne, du Conseil d'analyse économique du Premier ministre. "Même la France et l'Allemagne sans l'Angleterre, ça n'a pas de sens."

Pour Philippe Waechter, de Natixis Asset Management, le moment est de toute manière mal choisi, quel que soit le nombre de pays impliqués, au moment où les Etats européens sont en quête de refinancements massifs sur les marchés financiers.

"Ça peut être dissuasif pour les investisseurs étrangers. Et comme les Européens ne veulent pas acheter de dette européenne, comment fait-on ?", ajoute cet économiste, pour qui l'Allemagne risque de "traîner les pieds, voire de freiner des quatre fers".

En tout état de cause, les modalités de la future taxe dépendent étroitement du nombre de pays concernés -un Etat seul ou un nombre réduit de pays ne peuvent pas taxer sans risque les mêmes produits et au même taux que toute une zone économique.

Pour Christian Saint-Etienne, si la France fait cavalier seul, taux, assiette et rendement seront nécessairement limités.

"La seule chose envisageable serait une taxe totalement symbolique, qui donnerait une direction en espérant que d'autres pays rejoindront plus tard la France", explique-t-il. "Et même là c'est dangereux. Il faut se méfier de la symbolique : elle est parfois plus puissante que les mesures elles-mêmes."

Commentaires 21
à écrit le 15/01/2012 à 6:15
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Nous avons tardé à l'adopter.la Taxe Tobin est déjà en vigueur dans certains pays et d'autres pays vont l'adopter.Pour une fois,ce serait bien que la France soit l'initiatrice et montre l'exemple.

à écrit le 09/01/2012 à 15:44
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Tobin or not tobin... that is the question ? Pendant ce temps la TVA sociale qui plombe pratiquement tous les Français, et bien on n'en parle pas où très peu. Bizarre non !... ce sont ces braves conseillers, NS en a tout autour du ventre, qui embrume...

à écrit le 09/01/2012 à 6:46
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Zarko se decribilise par une agitation qu'il voudrait pr?nter comme des d?sions d'urgence face ?a crise. Il n'est pas idiot au point de penser que la ttf soit une bai solution du moins isolement (c.a.d. sans Londres et le reste du monde). Le but est ...

à écrit le 09/01/2012 à 6:38
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c'est monsieur je sais tout mais je n'y connait rien.

le 09/01/2012 à 8:28
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Tu parles devant ton miroir? Car apparemment tu n'y connais vraiment rien... pour croire qu'il a tort.

le 09/01/2012 à 8:31
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Enfin ca dépend de qui on parle...

à écrit le 09/01/2012 à 5:30
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Essenciel pour les marchés survivre ! Plus tard pourra être " trop tard " !

à écrit le 09/01/2012 à 5:24
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Triple A pour Taxe Tobin !

à écrit le 09/01/2012 à 5:07
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Si cette taxe est effective et uniquement "made in france".....il est probable que la City in London elevera une statue en tant que bienfaiteur à Mr Sarkozy...NO comments!!!!!!!!

à écrit le 08/01/2012 à 23:34
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ai-je bien lu "les dérèglements de finance sont largement à l'origine de la crise..." dixit Sarkozy .... on croit rêver, il n'a toujours pas compris que c'est l'endettement démèsuré des Etats qui est à l'origine. Faudrait peut-être que quelqun le lui...

à écrit le 08/01/2012 à 23:31
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Et si Sarkosy voulait faire sortir la France de l'Europe, à "la demande" des autres pays?Certains voient d'un bon oeil sa chute en mai prochain !

à écrit le 08/01/2012 à 21:50
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Il panique. Il sent qu'il risque de perdre Son Pouvoir. Il ne sait plus quoi faire. Il tire Ses dernières cartouches dans tous les sens, sans viser. Tout est bon, même les pires bêtises : tobin, radars, TVA sociale, SCOP Seafrance, taxe soda sucrés s...

à écrit le 08/01/2012 à 20:04
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Il faut rappeler que le professeur James Tobin a dénoncé lui-même son invention fiscale et décrit ses conséquences néfastes sur l'économie.

le 08/01/2012 à 21:46
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Ahbon ? tu as des infos ou c'est du pipo?

à écrit le 08/01/2012 à 19:49
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Dans le cas d'espèce, il s'agira d'une "tax to bin"....

à écrit le 08/01/2012 à 18:59
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Une taxe sur quel type de transaction ? car s' il y a des dérèglements ce n'est certainement pas sur les actions et ce serait dommage d'éloigner un peu plus les investisseurs des valeurs françaises. De plus avec la multiplication des plateformes part...

le 08/01/2012 à 21:50
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Je suis un des seuls surement a avoir des valeurs françaises dans mon PEA ... plus personne (petits épargnants j'entend) ne doit investir sur des sociétés françaises ... c'est déjà les Allemandes ou les Américaines qui sont "prisées" par le petit inv...

le 08/01/2012 à 22:47
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justement si vous voulez faire particper la finance il faudrait appliquer une taxe à l'ordre routé c'est à dire sur les milliers de transactions réalisées pour compte propre par les banques. Or en mettant en place une taxe uniquement en France seul ...

à écrit le 08/01/2012 à 18:47
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Il est vraiment temps que ce monsieur s'en aille car il agit comme si la France était un pays totallement indépendant hors de l'UE et grande puissance dominante en prime.... alors que nous ne sommes que un des 17 états de l'Eurozone qu'il veut soi-di...

à écrit le 08/01/2012 à 18:43
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la loi de finances de 2008 a supprimé l'impôt de bourse qui frappait en France les ordres boursiers.

à écrit le 08/01/2012 à 18:02
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C'est une excellente idée; mais pour la mise en ?uvre il va falloir que Bercy se branche sur les circuits informatiques des bourses (et pas seulement celle de Paris) ou des caisses de compensation comme "Clearstream",... Et c'est sans doute en écouta...

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