Ventes à découvert : Bruxelles veut imposer un cadre, Londres fait de la résistance

La Commission entend imposer davantage de transparence, mais elle prévoit surtout d'interdire les opérations de vente à découvert... en cas d'urgence.

La Commission européenne devrait prochainement rendre publique la façon dont elle compte encadrer les ventes à découvert. C'est ce que croit savoir l'agence Reuters qui s'appuie sur des sources communautaires.

Selon ces sources, ces opérations financières pourraient être interdites au niveau européen mais uniquement en cas d'urgence.
Les règles que l'exécutif communautaire souhaite mettre en place concerneront plus spécifiquement les ventes à découvert à nu d'obligations d'Etat et les swaps de défaut de crédit (CDS) à nu sur ces titres, deux sujets sur lesquels Londres oppose une ferme résistance.

La commission européenne souhaite à la fois instituer des règles visant à accroître la transparence, obliger les opérateurs à dévoiler au superviseur les positions importantes et harmoniser ses règles avec celles des Etats-Unis en matière de réglement-livraison des titres. "Les grandes orientations seront présentées début juillet mais le texte en lui-même ne sera pas bouclé avant septembre ou octobre" a précisé l'une des sources de Reuters avant de révéler que les services du commissaire au Marché intérieur, Michel Barnier, lanceraient une consultation sur ces pistes dès lundi.

"L'une des questions principales sera de définir le rôle que jouera l'ESMA (le futur superviseur européen des marchés) face aux superviseurs nationaux. Comment ces derniers devront-ils informer leurs homologues lorsqu'ils prennent une décision, dans quel cadre l'ESMA pourra suspendre la possibilité de recours au short selling ?", a ajouté la source de l'agence précisant que cette question concernait l'ensemble des ventes à découvert et pas seulement les ventes à découvert a nu.

La réflexion de la Commission sera nourrie par la consultation mais aussi par les travaux de la "task force" qui a été chargée d'étudier l'évolution de la situation en Grèce. De source communautaire, on indique qu'un débat est actuellement en cours au sein du collège des commissaires européens sur le degré de détail qui sera fourni en juillet.

Le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, souhaite mettre sur la table à cette date un texte déjà avancé alors que Michel Barnier préférerait se laisser le temps d'élaborer une proposition plus solide.

Sarkozy et Merkel sont d'accord, au grand dam de Cameron

Dans une lettre à José Manuel Barroso, Nicolas Sarkozy et Angela Merkel lui avaient demandé mercredi de présenter avant le conseil EcoFin de juillet l'ensemble des pistes envisageables. Selon des diplomates européens, cette lettre a été perçue à Londres et dans les milieux communautaires comme une attaque de la France et de l'Allemagne à l'égard de la Grande-Bretagne, où une partie importante de la dette européenne est échangée.

Londres considère que ce qui touche à la dette souveraine doit rester de la responsabilité des Etats, ce qui n'est pas acceptable pour Paris et Berlin.
"Les mesures nationales sont de peu d'effet, les dettes souveraines grecques, espagnoles, allemandes ou fançaises sont également traitées à Londres et il faut naturellement éviter les arbitrages réglementaires", explique une source européenne au fait de ces dossiers.

"Par ailleurs, tout ce qui touche à la spéculation sur la dette souveraine peut avoir des effets systémiques et le principe général des réformes c'est que tous les problèmes systémiques doivent être traités au niveau des autorités européennes", précise cette source.

Si la Grande-Bretagne admet qu'une plus grande transparence est nécessaire elle juge qu'une interdiction des ventes à découvert à nu au niveau européen ne ferait qu'affaiblir la City de Londres sans régler les problèmes posés par la spéculation.

"Clairement, si ce type d'interdiction était mise en oeuvre dans certains parties de l'Union Européenne l'activité se déplacerait. Et si l'interdiction concernait l'ensemble de l'Union, alors on peut penser que cette activité migrerait aux Etats-Unis où, qui sait, vers certains marchés émergents", dit une source britannique avant d'ajouter : "Appliquer une supervision plus étroite et obliger à dévoiler des positions au niveau européen lorsque la plupart des échanges ont lieu à Londres est une chose mais le faire lorsque l'activité s'est déplacée hors d'Europe est un tout autre défi".

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