Egypte : le gouvernement veut remettre la population au travail

Alors que les Etats-Unis semblent pousser Hosni Moubarak vers une porte de sortie qui lui permettrait de sauver la face, le gouvernement égyptien tente de convaincre la population qu'il est temps de reprendre le travail. Ce dimanche, les banques ont rouvert leurs portes.
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Le président égyptien Hosni Moubarak et son gouvernement ont lancé un appel à la reprise du travail ce dimanche, journée qui pourrait s'avérer riche d'enseignements quant à la détermination de leurs détracteurs.

Les manifestants qui réclament depuis douze jours la démission immédiate du chef de l'Etat ont campé sur leurs positions samedi, place Tahrir, au Caire, et se disent décidés à obtenir gain de cause. Beaucoup d'Egyptiens souhaitent toutefois le retour au calme et les autorités font tout pour mettre en exergue les menaces que l'agitation fait planer, notamment sur l'économie nationale.

La réouverture des banques, en ce premier jour ouvrable de la semaine, donnera un premier aperçu des conséquences économiques d'un mouvement de contestation sans précédent entamé il a près de deux semaines et de l'attitude des investisseurs étrangers.

"Nous voulons que les gens retournent au travail et soient payés, et que la vie reprenne son cours", a lancé samedi le commandant Hassan al Roweny, s'adressant aux manifestants de la place Tahrir.

Washington, fidèle allié et important pourvoyeur d'aide de l'Egypte, s'est prononcé pour une transition en bon ordre à l'issue de négociations avec l'opposition. La secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton a toutefois estimé samedi qu'il fallait laisser du temps à ces discussions, menées par le vice-président Omar Souleimane. L'émissaire américain Frank Wisner a par ailleurs déclaré que le chef de l'Etat devait rester au pouvoir pour le moment afin de superviser la transition.

Omar Souleimane doit rencontrer les représentants de l'opposition ce dimanche. Jusqu'ici hostiles au dialogue avec les autorités, les Frères musulmans, mouvement le plus structuré, ont accepté d'assister à cette séance.

COMPROMIS

"Nous avons décidé de nous engager dans un cycle de dialogue pour évaluer le sérieux des autorités en ce qui concerne les revendications de la population et leur volonté d'y répondre", a expliqué un porte-parole de la confrérie interrogé par Reuters.

Certains au sein de l'opposition craignent toutefois que ce dialogue ne donne lieu à un compromis, proposé par "Conseil des sages", qui verrait Moubarak se maintenir comme il en a l'intention jusqu'à la fin de son mandat, en septembre, et confier ses pouvoirs à Omar Souleimane pour lui permettre d'entamer la transition.

"Entendre (...) que Moubarak doit rester et conduire le changement, et que le processus reposerait essentiellement sur son plus proche conseiller militaire, qui n'est pas la personnalité la plus populaire en Egypte, sans partage du pouvoir avec les civils, serait très, très décevant", a commenté l'opposant Mohamed ElBaradeï, évoquant le rôle du vice-président à la tête des services de renseignement militaires.

La télévision nationale a annoncé samedi la démission de la direction du Parti national démocrate (PND) au pouvoir, ce qui n'a pas non plus convaincu l'opposition.

"Il s'agit d'une tentative pour améliorer l'image du parti, mais cela ne remplace pas le principal objectif de la révolution, qui est de renverser le régime en commençant par la démission du président Moubarak", a commenté Mohammed Habib, au nom des Frères musulmans.

L'OPPOSITION DIVISÉE

Sur la place Tahrir, l'armée a envoyé des chars tenter de déloger les manifestants pour rétablir le trafic automobile, mais les contestataires, rassemblés sous des tentes pour se protéger de la pluie, n'ont pas bougé.

"Il est très clair qu'il essayent de nous asphyxier. Cela témoigne d'intentions malveillantes. Mais nous ne bougeront pas tant que nos revendications n'auront pas été acceptées", a assuré l'un d'eux.

Les banques et la bourse fermées depuis une semaine

La lassitude semble toutefois gagner du terrain, y compris parmi les manifestants. Beaucoup de commerces sont fermés depuis le début du mouvement, entamé le 25 janvier, et les produits de première nécessité commencent à manquer dans de nombreux foyers. Les prix sont d'ores et déjà à la hausse et la croissance nationale, qui atteignait 6%, ne sera pas épargnée.

Certains redoutent en outre de voir le front antigouvernemental se fissurer. "Jusqu'ici, il n'y a pas d'accord entre les différents partis et formations" sur le scenario de la transition, a déploré Mohammed Morsy, membre éminent des Frères musulmans, interrogé par l'agence Reuters.

Les banques et la bourse sont fermées depuis une semaine. Les touristes, qui sont l'une des premières sources de revenu, ont en outre fui l'Egypte en masse, mais la Banque centrale assure disposer des réserves nécessaires pour faire face à la situation.

"Je suis convaincu que le marché sera discipliné", a déclaré son gouverneur Farouk al Okdah, alors que certains analystes prévoient un véritable chaos. La livre égyptienne est tombée à son cours le plus bas depuis six ans lors des deux seuls jours de cotation qui ont suivi le début du mouvement.

Commentaire 1
à écrit le 06/02/2011 à 13:03
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Et la population veut mettre le gouvernement dehors. C'est visiblement ce que Moubarak refuse de comprendre. C'est facile de traiter le peuple de paresseux, d'agitateurs irresponsables ou de terroristes quand on est installé dans l'opulence, alors qu...

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