Le shadow banking, un casse-tête chinois estimé à 3.100 milliards d'euros

C'est la nouvelle estimation du système bancaire parallèle faite par l'Académie chinoise des Sciences sociales, qui met en garde contre les risques qu'il représente pour le système financier du pays.
"Ce qui importe le plus, ce n'est pas la taille du secteur bancaire parallèle", relève de son côté l'Académie chinoise des Sciences sociales, mais plutôt l'apparition de défauts qui remettraient en cause la solvabilité des emprunteurs informels et donc des prêteurs en bout de chaîne. (Photo : Reuters)

La "finance de l'ombre" fait-elle planer un risque systémique sur l'économie chinoise ? Avec un poids de plus de 3.100 milliards d'euros, selon une nouvelle estimation de l'Académie chinoise des Sciences sociales citée par l'AFP, on est en droit de se poser la question. L'organisme de recherche gouvernemental met d'ailleurs lui-même en garde contre le risque que le système bancaire parallèle, non régulé, fait courir au système financier chinois.

Près de la moitié du PIB de la Chine

En tout, ce système financier parallèle, aussi connu sous le nom de "shadow banking", représente pas loin de la moitié du produit intérieur brut du pays, et 20% des actifs détenus par le secteur bancaire chinois régulé, selon cette estimation.

C'est un peu moins que ce qu'avaient calculé l'agence de notation Moody's et la Réserve Fédérale américaine dans des études publiées en 2013. Mais c'est bien plus que l'estimation de 1.300 milliards d'euros l'an dernier, publiée par la China Trustee Association, un organisme sous la coupe de la banque centrale chinoise (PBOC) qui réunit les opérateurs de ce système bancaire parallèle.

Un pas vers la libéralisation des taux

Selon certains analystes, la montée en puissance du "shadow banking", un temps encouragée par les autorités elles-mêmes, n'est pas un mal en soit. C'est en effet un pas vers la libéralisation des taux de crédit et de dépôt, dans un pays où ceux-ci ne peuvent sortir d'une tranche fixée par la PBOC.

Il permet d'une part d'offrir un taux de rendement plus élevé aux épargnants chinois. D'autre part, il permet aux entreprises privées de se financer, alors qu'elles sont exclues du système de crédit classique en raison d'un risque trop élevé par rapport au taux maximum fixé par la PBOC.

Risque de contagion

"Ce qui importe le plus, ce n'est pas la taille du secteur bancaire parallèle", relève de son côté l'Académie chinoise des Sciences sociales, mais plutôt l'apparition de défauts qui remettraient en cause la solvabilité des emprunteurs informels et donc des prêteurs en bout de chaîne.

"A partir du moment où de gros risques apparaissent dans le secteur bancaire parallèle, ils peuvent se propager rapidement au secteur bancaire et à l'économie réelle, à travers les marchés monétaires et de crédit, faisant courir des risques financiers systémiques", alerte ainsi l'organisme.

Les épargnants chinois qui financent, pour beaucoup sans le savoir, ce système de financement informel, pourraient eux aussi se retrouver en première ligne pour payer les pots cassés en cas de défauts qui se multiplieraient.

Or les premiers défauts d'entreprises chinoises ont fait leur apparition ces dernières semaines en raison d'un assèchement volontaire du crédit par la PBOC, sous l'impulsion de Pékin. Le but est en effet d'endiguer la mauvaise allocation du crédit provoquée par les afflux de liquidités déversées sur l'économie chinoise pour soutenir la croissance après la crise financière de 2008.

>> Lire Le shadow banking, ou la découverte du libéralisme par les épargnants chinois

Double enjeu pour Pékin

Le Premier ministre Li Keqiang a d'ailleurs prévenu plusieurs fois ces dernières semaines que de plus en plus de défauts auront lieu. Pékin souhaite en effet réduire la taille des secteurs en surcapacité afin de rendre la croissance plus efficiente. Les investisseurs, qui espèrent ainsi avoir une meilleure vue de la santé des entreprises chinoises, ont tendance à bien accueillir ce mouvement. Mais cet assèchement du crédit n'est pas sans conséquence sur la croissance du pays, et les premiers signes de ralentissement inquiétants sont déjà perceptibles.

Il est communément admis qu'une croissance du produit intérieur brut à 5%, mais reposant sur des bases saines, permettrait à la machine chinoise de tourner de manière satisfaisante. Mais Pékin, conscient des déséquilibres de son économie, a fixé l'objectif à 7,5% pour cette année, ce qui serait un plus bas depuis les années 1990. Et les analystes, qui craignent que celui-ci ne soit pas atteint, spéculent déjà sur un nouveau plan de soutien à la croissance par la PBOC, qui aurait pour effet de nourrir encore la finance de l'ombre.

>> Lire La Chine malade de son système bancaire

Commentaires 5
à écrit le 14/05/2014 à 8:21
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Le systeme financier est plus que malade...

à écrit le 13/05/2014 à 19:35
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Le shadow banking tout comme les paradis fiscaux permettent aux puissants, aux magouilleurs de tout poil de faire transiter de l'argent plus ou moins propre et surtout à échapper à l'impôt . . La Chine comme les autres pays sont vampirisés par ces sy...

à écrit le 13/05/2014 à 16:56
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Encore une étude pipeau, reprise sans esprit critique: qui peut quantifier correctement un système occulte, dans lequel les intervenants eux même n'ont pas une vision globale? C'est comme les douaniers qui estiment la taille du marché de la drogue a...

à écrit le 13/05/2014 à 16:24
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Si la chine a un shadow banking de 3100 milliards euros, elle a 4000 milliards de réserves et des tonnes d'or, peut-être il est encore temps de faire les ménages pour repartir sur une base économique plus saine. Est ce que je me trompe?

à écrit le 13/05/2014 à 16:15
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Tant qu'à "rhétoriquer", l'on serait bien inspiré de "débrider"son regard pour ne pas refuser de voir ou taire les énormités accumulées hors bilan de nos banques, à coup de titrisations refilées "au marché".

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