Patrick Mange (Merrill Lynch) : "La BCE ne va pas se déjuger"

latribune.fr - La Banque centrale européenne va-t-elle, selon vous, baisser ses taux d'intérêt aujourd'hui comme l'y exhortent un certain nombre de gouvernements ainsi que le FMI ?Patrick Mange - Non. Aucun des indicateurs publiés depuis la précédente réunion de la BCE ne donne matière à cette dernière pour se déjuger. Au contraire. La Banque centrale européenne a insisté assez lourdement lors de ses précédentes communications sur l'importance qu'elle accorde au contrôle de l'inflation dans la zone euro. Or, les premiers chiffres provisoires en provenance de l'Allemagne et de l'Italie ne sont pas bons à cet égard. Ils laissent entendre que la hausse des prix en avril dans la zone euro pourrait atteindre, en glissement annuel, 2,8%, loin de l'objectif de 2% fixé par la BCE. Dans ces conditions, les banquiers centraux européens vont rester sur leur position de "wait and see" et selon moi la BCE devrait baisser ses taux le 10 mai prochain de 50 points de base, les ramenant à 4,25%. Qu'est-ce qui pourrait amener la BCE à baisser ses taux à cette date ?La hausse actuelle de l'inflation est liée à des facteurs qui devraient finir par s'estomper: pétrole, dépréciation de l'euro, renchérissement des denrées alimentaires en raison de la crise de la vache folle et de la fièvre aphteuse. De plus, l'inflation sous-jacente (ndlr: hors énergie et alimentation) est assez peu élevée puisqu'elle est inférieure à 2%. Cela ne devrait donc plus inquiéter la BCE. Mais c'est surtout la publication de M3 dans les jours qui viennent qui devrait servir de prétexte. Le rythme de croissance de la masse monétaire devrait passer sous 4,5%, valeur de référence de la BCE et cela fournira à la Banque centrale européenne l'argument pour abaisser le loyer de l'argent. Les risques pesant sur la croissance européenne en raison du ralentissement américain joueront-ils un rôle dans cette décision ?Jamais la BCE ne consentira à dire que c'est à cause des risques pesant sur l'activité européenne qu'elle fait un tel geste. Elle ne cesse d'ailleurs de répéter que "c'est aux gouvernements de garantir une croissance plus forte". Et c'est vrai que c'est le rôle des gouvernements de réformer les structures, mais le temps presse. Ce ne sont pas des réformes de structures qui permettront de traverser ce fort ralentissement. Nous sommes dans une économie globalisée, il faut donc tout faire pour que le ralentissement économique mondial soit le moins long possible. La BCE pourrait participer à ce mouvement. Mais en n'agissant pas et en regardant trop dans le rétroviseur plutôt que devant elle, la BCE laisse planer une hypothèque sur la croissance 2002. Plus elle tardera à assouplir sa politique monétaire, plus l'impact de la baisse des taux tardera à se faire sentir sur le PIB de la zone euro.
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