Énergie : le gouvernement contourne le Sénat, les Républicains contre-attaquent

EXCLUSIF. Selon nos informations, les sénateurs LR déposeront dans les tout prochains jours une proposition de loi sur la trajectoire énergétique de la France, alors que l'exécutif a décidé de régler cette question par décret afin de contourner le Parlement. Bien décidés à forcer le débat, les LR comptent ainsi utiliser une niche parlementaire.
Marine Godelier
Le gouvernement a acté début avril l'enterrement de la nouvelle loi censée tracer l'avenir énergétique de la France d'ici à 2035, lui préférant un simple décret afin d'esquiver le vote du Parlement.
Le gouvernement a acté début avril l'enterrement de la nouvelle loi censée tracer l'avenir énergétique de la France d'ici à 2035, lui préférant un simple décret afin d'esquiver le vote du Parlement. (Crédits : Reuters)

« Mettre le gouvernement au pied du mur » sur la question de l'énergie. Voilà ce qui sous-tend l'action préparée en coulisse par le groupe Les Républicains (LR) au Sénat. Selon nos informations en effet, celui-ci finalise une proposition de loi sur la trajectoire énergétique de la France, qu'il déposera dans les tout prochains jours. Le but : fixer les objectifs du pays en matière d'implantation d'éoliennes, de panneaux solaires, de nucléaire ou encore de recours à la biomasse pour les prochaines années, afin de les soumettre à un véritable débat parlementaire. Ce dont lui a privé l'exécutif, qui a décidé, début avril, de régler cette question épineuse par voie réglementaire plutôt que législative, en contournant l'Assemblée et le Sénat.

« Le gouvernement passe outre ce qui était prévu et voté dans la loi, en faisant fi de la représentation nationale », justifie à La Tribune Dominique Estrosi-Sassone, présidente (LR) de la Commission des affaires économiques du Sénat. De fait, en vertu d'une disposition législative de novembre 2019, l'Etat se trouvait dans l'obligation de se doter d'une loi de programmation Energie-Climat avant le 31 juillet 2023. Un cadre qu'il a décidé de ne pas respecter, incapable d'apaiser le débat entre anti-nucléaires et anti-renouvelables et craignant de ne trouver aucune voie de passage au sein des instances représentatives.

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Niche parlementaire début juin

Ainsi, les sénateurs LR comptent profiter d'une prochaine niche parlementaire, prévue début juin, afin de présenter le texte et qu'il soit examiné. Pour rappel, un jour de séance par mois, un groupe d'opposition décide de l'ordre du jour et peut y inscrire ses propositions de loi. Puisqu'un délai de cinq semaines s'applique, les LR doivent donc déposer ledit texte d'ici à lundi « au plus tard ».

« Nous voulons qu'il soit discuté avant la fin de la session parlementaire [prévue fin juin, ndlr]. Compte tenu de l'agenda chargé, avec des projets de loi importants qui arrivent, on ne dispose plus que cette fenêtre de tir », précise Dominique Estrosi-Sassone.

Le sénateur (LR) des Vosges Daniel Gremillet en sera vraisemblablement soit l'auteur, soit le rapporteur. Pour l'heure, les principaux intéressés ne divulguent cependant pas son contenu, même si celui-ci consacrera très certainement la relance du nucléaire sur le territoire français.

Contexte tendu

Cette opération survient dans un contexte pour le moins tendu avec l'exécutif. Mi-avril, dans un entretien au JDD, le président du Sénat, Gérard Larcher (LR), avait jugé « inacceptable » la manière dont Emmanuel Macron tente selon lui d'« éviter le débat parlementaire » faute de majorité à l'Assemblée. Et de rappeler que le président de la République avait également décidé de « contourner » le Parlement en ne proposant pas de loi de finance rectificative pour 2024 pour son grand plan d'économies sur les dépenses de l'Etat.

« Malgré les 10 milliards d'économies à trouver cette année, il n'y a pas eu de projet de loi de finances rectificative [PLFR, pour modifier le budget en cours d'exercice si le besoin en apparaît, ndlr]. Puis rebelote pour les 10 milliards supplémentaires à aller chercher ! Et là, alors même que le gouvernement devait présenter un projet de loi sur la programmation énergétique, il s'assoit dessus. Tout cela commence à agacer », glisse à La Tribune un ancien parlementaire macroniste ayant requis l'anonymat.

En mars, une première offensive de ce type s'était organisée à l'Assemblée nationale, sous la forme d'une proposition de loi inscrite dans une niche EELV. La députée écologiste Julie Laernoes avait en effet élaboré le texte pour « instaurer de nouveaux objectifs de programmation énergétique pour répondre concrètement à l'urgence climatique ». Mais celui-ci avait été réécrit par des amendements des macronistes, favorables au nucléaire. Dénonçant un détricotage, les écologistes avaient donc voté contre le texte, adopté grâce aux voix du camp présidentiel. Le texte devait arriver en séance le 4 avril, mais n'a finalement pas été débattu, le sujet des PFAS ayant cristallisé les tensions.

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Marine Godelier
Commentaires 8
à écrit le 26/04/2024 à 13:40
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« Mettre le gouvernement au pied du mur » c'est pas eux qui ont laissé passé X 49.3?!!! qui ont donné l'habitude et sécurisé les macronistes ou plutôt le macronistan !??? maintenant qu'ils comprennent que l'argent disparait et que forcément va se ...

le 26/04/2024 à 18:30
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@gonzague. Voilà ce qui me plaît à lire, car en économie la dette à pour corrolaire l'argent, c'est d'ailleurs en ce sens que l'on parle d'Argent/Dette [...maintenant qu'ils comprennent que l'argent disparait et que forcément va se poser la question ...

à écrit le 26/04/2024 à 10:06
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Qui disait déjà: "Ce qui s'oppose coopère, et de ce qui diverge procède la plus belle harmonie, et la lutte engendre toutes choses". Cette solitude de décision présidentielle est une catastrophe en soit.

à écrit le 26/04/2024 à 9:45
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Les LR ? Posture! Qu'à produit Ciotti à part du bavardage? Rien, le néant absolu...à égalité avec Jordan Bardella.

à écrit le 26/04/2024 à 9:18
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Nous sommes toujours dans une république bananière , les parlementaires n'ont pas la main , vive le 49 .3

à écrit le 26/04/2024 à 9:10
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le 26/04/2024 à 11:28
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Alors que nous avons l’un des kWh produits les moins chers du monde, nous payons pour le charbon et le gaz allemand ainsi que pour les miroirs magiques et les moulins à vent. Il faut arrêter les âneries, renationaliser toute l’hydroélectricité et me...

à écrit le 26/04/2024 à 8:53
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Mais où Macron et consorts continuent-t-ils d'emmener notre "démocratie" ?

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