Voyages en ligne, une pléthore d'intervenants pour un marché en croissance explosive

Le ciel s'éclaircit chaque jour un peu plus, les températures atteignent des niveaux respectables, pull-overs et manteaux ont disparu dans les placards: pas de doute, l'été approche, et avec lui les vacances. La quête des lieux de villégiature estivale a donc largement débuté. Mais si les agences de voyages commencent à être très fréquentées et leurs standards téléphoniques à souffrir d'occupation chronique, le chiffre d'affaires global de ces acteurs "traditionnels" du voyage n'en diminue pas moins petit à petit. Car une nouvelle concurrence tend chaque jour à se renforcer: celle des sites Internet spécialisés dans la vente de voyages."Aujourd'hui, le voyage en ligne est un marché en devenir, explique Fabien Bourdier, directeur général adjoint d'Anyway.com. Ses ventes sont limitées: en volume d'affaires, elles ne représentent que 5% des achats de voyage. Mais ce chiffre croît sans cesse et nous pensons qu'il devrait atteindre 15 à 20% en 2008". Un constat confirmé par Petra Friedmann, directrice d'Opodo France : "le marché du voyage en ligne commence à sortir de son état de niche, affirme-t-elle. Environ sept millions de Français préparent leur voyage sur Internet mais au final trois millions d'entre eux seulement achètent en ligne. Cela représente néanmoins plus de 5% de la population française."Les femmes, principales acheteuses sur le NetOpodo, qui a été lancé en France en avril 2002, a réalisé une enquête plus approfondie afin de déterminer le portrait de l'acheteur type. "Selon notre étude, les principales acheteuses sont les femmes de 25 à 34 ans. Les femmes convertissent bien plus leur recherche en achat (66%) que les hommes (30%). Lorsque l'on regarde l'âge, on s'aperçoit que si 25% des seniors regardent le Net, quasiment aucun n'achète. Enfin, lorsque l'on regarde les revenus des acheteurs, on s'aperçoit que les revenus supérieurs - plus de 3.000 euros mensuels - représentent 40% des achats, tandis que les plus faibles - moins de 1.200 euros - sont ceux qui convertissent le plus leur visite en achat (53%)". D'où une question: la possibilité d'acheter à bas prix est-elle la raison principale d'achat sur Internet ?Aymeric Chotard, le PDG du site 2xMoinsCher.com, a décidé d'entrer dans le secteur du voyage en ligne "car le voyage est un produit où il y avait pour nous la possibilité d'avoir des réductions importantes". Comme le nom du site l'indique, les visiteurs se rendent avant tout sur 2xMoinsCher.com pour trouver des bonnes affaires. "Or, nous avons décidé d'avoir un partenariat avec Kelkoo pour faire profiter nos internautes de bas prix sur les voyages. Nous ne sommes pas un voyagiste pur mais nous orientons les visiteurs à la recherche du meilleur coût vers Kelkoo". A chacun sa stratégieLa question du prix est en effet primordiale, tous les acteurs du secteur en conviennent. "Le prix cassé est d'ailleurs né sur le minitel avec Degriff'tour après la première guerre du Golfe car il fallait faire redémarrer l'économie du voyage", explique Fabien Bourdier. Mais, et c'est là que se mettent en place les différentes stratégies des groupes, tout ne s'arrête pas au prix. "La révolution Internet a apporté deux principaux éléments, en plus de la possibilité de réserver 7 jours sur 7 et 24 heures sur 24: le choix tout d'abord. Sur un site, il y a plus d'offres que dans les agences de voyages il y a quinze ans, et les documentations sont bien plus fournies, avec des photos, des plans et des descriptifs très détaillés. Le second point, c'est la disponibilité: on sait immédiatement s'il reste de la place pour les produits proposés et leur tarif".Pour s'assurer une clientèle fidèle, Anyway, qui a été racheté par l'Américain Expedia à la fin de l'année dernière, s'appuie donc sur ces différents points. Et assied sa stratégie sur les "packages dynamiques", ainsi que le précise Fabien Bourdier : "les Français sont assez individualistes et ils aiment bien pouvoir créer leur propre voyage. Nous leur offrons donc toutes les options pour monter leur séjour sur mesure mais pour le prix d'un voyage organisé !" Pour Petra Friedmann, "Opodo n'a pas vocation a être le moins cher mais à être le meilleur rapport qualité-prix. Nous sommes le seul site à avoir un service client 7 jours sur 7 et 24 heures sur 24. Ensuite, nous avons une équipe qui visite les hôtels que nous proposons en ligne, afin de nous assurer de la valeur de nos offres. Je le répète, si le prix est une condition sine qua non pour exister sur Internet, la différence se fera sur la qualité".Le lent déclin du voyage de dernière minuteLa troisième option, jusqu'alors assez généralisée sur les sites Web, celle du départ de dernière minute, n'est plus aussi stimulante. Même chez les spécialistes du secteur comme Lastminute.com. "Notre image et notre passé nous permettent de rester imbattables dans le segment du 'last minute', lance Pierre Paperon, PDG de l'entreprise. Mais il y a une grande évolution des pratiques. Désormais, les Français achètent de plus en plus tôt, si bien que 60% des affaires sont réalisées en dehors des opérations de dernière minute. Nous avons ainsi lancé en avril notre campagne publicitaire pour les vacances d'été et actuellement sur note site, il est possible d'acheter ses vacances jusqu'au mois d'octobre".Où partent les Français ?"Les Français sont les meilleurs clients des Français : 80% d'entre eux partent en vacances en France...". Pour Fabien Bourdier, d'Anyway.com, comme pour ses concurrents, le message est clair. "Pour savoir où partiront les Français, il suffit de regarder le climat de l'année précédente, explique Petra Friedmann, d'Opodo. Après la canicule de l'an dernier, la Côte d'Azur ne marche pas du tout, alors que la Bretagne est en forte hausse. Idem l'hiver: si la saison de ski a été bonne, l'année suivante ce sera la ruée sur les stations de montagne". Pour l'étranger, l'Espagne, la Tunisie, le Maroc, l'Italie, la Turquie, Londres et New York apparaissent constamment aux premières places des lieux visités. La Croatie, censée offrir "la même douceur que la côte adriatique italienne mais avec des prix bien plus intéressants", dixit Fabien Bourdier, la République Dominicaine, "aux dépens de Cuba" et la Thaïlande, "porte d'entrée vers l'Asie", composent le trio de tête des destinations émergentes.Une évolution des habitudes des Français confirmée par les acteurs du secteur. "Il y a une tendance à une plus grande maturité de la part des consommateurs, analyse Fabien Bourdier. Alors que l'an dernier, les 3/5èmes des réservations étaient prises dans le mois qui précédait le jour du départ, ils ne sont plus que 2/5èmes dans ce cas cette année. Le pic des réservations a ainsi lieu en mai-juin. C'est pourtant encore très tardif par rapport aux Allemands et aux Anglais, qui réservent pour les 2/3 avant le mois de leur départ. Le pic d'achat des Britanniques a ainsi lieu en janvier. Mais les Français sont bien mieux préparés que les Espagnols, qui réservent pour les 4/5èmes dans les quinze jours qui précédent leur départ !" L'expression "mieux préparés" éclaire bien la perception des voyagistes, qui préféreraient une plus grande rationalité du comportement des Français: leurs revenus seraient du même coup répartis sur toute l'année et mieux assurés.Dans ce marché du voyage en ligne en croissance annuelle de 60%, les appétits apparaissent petit à petit et les géants mondiaux du secteur tentent de s'octroyer une part du pactole. La dureté de la concurrence a été confirmée il y a deux semaines lorsque le site Lastminute.com a annoncé qu'il attaquerait en justice le site de voyages de la Sncf, géré par Expedia, lui-même propriétaire de Anyway.com, pour abus de position de dominante et pratique anti-concurrentielle (lire ci-contre). Une initiative qui témoigne de l'intensité des affrontements à venir... ce qui laisse augurer probablement de bonnes nouvelles, en matière de tarif et de qualité des offres, pour les internautes.
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