"Deux vies plus une"
Idit Cébula réussit avec ce premier long métrage un film extrêmement personnel, inégal et maladroit, mais néanmoins plein de charme, servi par une belle brochette de comédiens. A commencer par Emmanuelle Devos, parfaite dans le rôle de cette institutrice décidée à mener ses rêves à leur terme en vivant de sa plume. Encore faut-il que les siens l'acceptent. Son mari par exemple, brillamment campé par un Gérard Darmon faussement macho, d'une infinie drôlerie. Sans parler de sa mère, mama juive ashkénaze particulièrement étouffante (délicieuse Solange Najman). Certes le film s'essouffle parfois, se répète même, avant d'être boosté par une succession de scènes décalées, drôles, tendres, colorées, semblables à des pastilles effervescentes.
Y. Y.

"Invasion"
Hier, l'envahisseur des films de science fiction américains était dangereusement communiste. Aujourd'hui, nul ne sait vraiment. En témoigne ce dernier film d'Olivier Hirschbiegel, énième adaptation cinématographique du roman de Jack Finney, "L'invasion des profanateurs". Reste qu'un drôle d'ennemi s'est infiltré aux Etats-Unis sous la forme de spores venus de l'espace, capables de laver le cerveau de la population en un rien de temps. Et il faudra tout le courage de Carol (Nicole Kidman, plus Marilyne Monroe que jamais, période "Les désaxés") pour aider à sauver le pays de cette étrange épidémie. Il y a quelque chose de captivant dans ce film mené tambour battant, parfois monté avec un gant de boxe. D'ambigu aussi, comme toujours chez Hirschbiegel (on lui doit "La chute", sur les derniers jours d'Hitler). A ses yeux, la folie - même guerrière - des hommes vaut toujours mieux que le totalitarisme. Drôle d'échelle de valeur.
Y. Y.

"Michael Clayton"
Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué? Tel semble être l'esprit de ce film alambiqué, signé Tony Gilroy, le scénariste de "La mémoire dans la peau". L'histoire d'un avocat pas comme les autres (George Clooney), chargé par son cabinet d'arranger les combines embarrassantes de ses clients. Jusqu'au jour où sa conscience lui intime l'ordre de résister à une multinationale d'agrochimie prête à passer sous silence des résultats d'analyses susceptibles de causer la mort de millions de personnes. Clooney, extrêmement sobre, en impose une fois de plus. Mais cela ne suffit pas à sortir le spectateur - noyée par une marée d'informations - de sa torpeur. Car il manque cruellement un souffle à ce film tourné de manière quasi clinique.
Y. Y.

"For your consideration"
"Hollywood, ton univers impitoyable" aurait pu être le sous-titre de ce film qui s'attaque au microcosme du monde du cinéma à travers le tournage d'un film médiocre qu'une rumeur projette comme le nouveau champion des Oscars. Des producteurs loin de toute préoccupation artistique aux acteurs qui ne rêvent que de célébrité, chacun se voit gentiment égratigné. Gentiment, car cette satire de l'américain Christopher Guest ("Spinal tap") est rarement aussi mordante qu'elle aimerait l'être. Moins intelligent que "The Player" de Robert Altman, moins délirant que certaines séries télé comme "On the air" de David Lynch, "For your consideration" reste une petite comédie sympathique qui doit beaucoup à ses acteurs.
O. L. F.

"Jane"
Emma, Marianne, Elinor et Mr Darcy les héros de ses romans, c'est elle! Cette biopic (biographie filmée) de Jane Austen (1775-1817), signée Julian Jarrold, ne dit pas autre chose. Car il est ici question des problèmes d'argent et des amours contrariés de la célèbre romancière britannique. Autant de drames étrangement similaires à ceux vécus par ses personnages. Dommage que le réalisateur n'ait ni le talent, ni la fraîcheur d'Ang Lee qui avait porté à l'écran "Raison et sentiments". Certes, rien ne manque. Ni la perfidie des ladies britanniques, ni les vues de la campagne anglaise sous la pluie. Et c'est bien là le problème. Ce "Jane" a un goût prononcé de déjà-vu.
Y. Y.