Stravinski revisité

Au Grand Théâtre de Genève, deux jeunes chorégraphes s'attaquent aux chefs-d'oeuvre "Petrouchka" et "Le sacre du printemps". Un double spectacle qui passera par Paris, au Théâtre de Chaillot, en janvier.

S'attaquer aux monuments que sont "Petrouchka" et "Le sacre du printemps" de Stravinsky - tous deux originellement chorégraphiés par Nijinski - n'a rien d'anodin. Le second surtout, qui, de Pina Bausch à Preljocaj en passant par Neumeier et Béjart, a déjà été revisité avec brio.

Deux jeunes chorégraphes s'y sont tout de même frottés: le français Benjamin Millepied - qui, après avoir passé une partie de sa carrière aux Etats-Unis, a effectué son grand retour à l'Opéra de Paris l'année dernière - et le grec Andonis Foniadakis.

A sa création en 1911 pour les Ballets russes de Diaghilev, "Petrouchka" mettait en scène un spectacle de marionnette où les poupées prenaient vie. Millepied - accompagné de son fidèle scénographe Paul Cox bien connu pour ses illustrations de livres pour enfants - s'est permis une transposition culottée en situant l'action quelque part entre les années 20 et 30. Du coup, le cinéma remplace le théâtre de marionnettes et ce sont les acteurs d'un film qui sortent de l'écran pour s'incarner en chair et en os. L'introduction passée, Millepied nous plonge dans un univers en noir et blanc où plane l'ombre réjouissante de Buster Keaton.

Tout du long, le chorégraphe enchaîne des audaces très rafraîchissantes. Les danseurs sortent de scène pour une course poursuite dans les couloirs du théâtre, la ballerine fait du gringue au chef d'orchestre et Petrouchka ira jusqu'à voler la baguette de ce dernier, forçant un temps les instruments à se taire. Reste qu'on a parfois l'impression de plus assister à du théâtre qu'à un ballet, l'enchantement visuel (merci Paul Cox) et l'originalité scénaristique l'emportant souvent sur la chorégraphie.

On revoit tout de même cette appréciation à la hausse une fois que l'on a assisté à la deuxième partie du spectacle, soit "Le sacre du printemps" vu par Andonis Foniadakis. Le chorégraphe s'est attaché à donner une vision tribale, primaire et ouvertement sexuelle du ballet. Porté - si l'on excepte les dernières minutes - par la seule Yukari Kami, ce solo d'une demi-heure laisse dubitatif. Seins nus, affublée d'un cache sexe doré et de quelques foulards autour du cou et des genoux, la danseuse s'acharne, comme en transe, à exécuter des mouvements qui tournent rapidement à l'absurde quand ce n'est pas à l'obscène. Le parti pris radical de Foniadakis est loin de convaincre. Ce "Sacre" ne marquera pas celui du chorégraphe.


"Petrouchka" / "Le sacre du printemps", jusqu'au 20 octobre au Grand Théâtre de Genève. Tél: + 41 22 418 31 30. ww.geneveopera.ch
Le spectacle sera au Théâtre de Chaillot (Paris) du 24 au 27 janvier 2008. Tél: 01 53 65 30 04. www.theatre-chaillot.fr

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