Zhang Yi, l'homme qui dompte les mastodontes industriels chinois

Dans un paysage politique chinois marqué par l’omniprésence du pouvoir économique, Zhang Yi présente un profil atypique. Le nouveau Directeur de la SASAC (State Assets Supervision and Administration Commission), l’organisme qui chapeaute les plus grandes entreprises industrielles du pays, n’a en effet aucune expérience dans le domaine économique...
Zhang Yi, qui supervise désormais toutes les grosses entreprises nationales chinoises, a peu d'expérience dans le domaine économique... Toutefois, il est un maître de la discipline, ce qui en fait l'homme idéal pour la mission de reprise en main qui lui est confiée...

Fait sans précédent en dix ans d'existence, la direction de la puissante SASAC a connu quatre mois de vacance à partir de septembre 2013. Son nouveau titulaire, depuis décembre, Zhang Yi, cumule par contre les fonctions de Secrétaire du Parti et de Directeur de la Commission ; il a ainsi la haute main sur les 120 principaux groupes industriels publics du pays.

L'intéressé ne s'attendait sans doute pas à cette fin de carrière : à la différence de ses prédécesseurs, le nouveau superviseur des conglomérats de l'industrie chinoise n'a en effet aucune expérience dans un de ceux-ci, ou dans une de leurs agences de tutelle.

 

Un homme de la discipline

Né en 1950, Zhang Yi a eu un début de parcours discret, dans des fonctions administratives de District puis de Préfecture (les deux niveaux en dessous des Provinces chinoises). Après un passage par l'Ecole Centrale du Parti en 1995, sa carrière prend un nouveau cours, toujours loin des projecteurs, mais nettement plus près du pouvoir. Il intègre en effet l'appareil disciplinaire du PCC, en tant que responsable des Commissions régionales chargées de la lutte contre la corruption, pour son Heilongjiang natal, puis pour la puissante province du Hebei.

Entre 2007 et 2012 il accède à une nouvelle dimension. Nommé vice - secrétaire de la Commission Centrale d'Inspection de la Discipline (CCID), il est à ce titre l'un des dix hommes ayant accès aux dossiers les plus sensibles sur les responsables du Parti, au niveau de l'ensemble du pays. En novembre 2012, à l'occasion du XVIIIè Congrés du Parti, Zhang Yi reste membre du Comité Central mais n'est pas renouvelé à la CCID. Son poste honorifique de Président de l'Assemblée de la petite province enclavée du Ningxia semble constituer une voie d'attente, à trois ans de la retraite.

Pourtant, dès mars 2013, Zhang est rappelé à Pékin. Il doit y occuper les fonctions de Secrétaire du Parti pour la SASAC - et former à la tête de celle-ci un binôme pour le moins détonnant.

 

Profils antagonistes

Le nouveau Directeur nommé à la tête de la SASAC, en même temps que Zhang y prend ses fonctions, présente en effet un profil rigoureusement inverse à celui de son collègue. Jiang Jiemin, ancien président du puissant groupe pétrolier CNPC (China National Petroleum Corp.), et proche de l'ancien ministre de la Sécurité publique Zhou Yongkang, est un homme qui connaît très bien les arcanes du pouvoir politico-économique chinois - trop bien au goût de la nouvelle équipe dirigeante entrée en fonctions avec le XVIIIè Congrès.

Sa destitution, six mois seulement après sa nomination à la tête de la SASAC, va marquer un point culminant de la campagne de lutte contre la corruption. En septembre, Jiang est en effet suspendu de ses fonctions, suite à un rapport de … la CCID, l'ancien employeur de Zhang Yi.

 

Mission de reprise en main

La nomination de Zhang, à deux ans de la retraite, constitue certainement une solution d'attente. Mais elle constitue aussi un signal fort. Cumulant les deux fonctions suprêmes de la Commission, il est désormais seul aux commandes, pour mener une reprise en main avec deux objectifs.

Le premier objectif consiste à mettre un terme aux pratiques de corruption qui minent l'autorité du Parti, et pour lesquelles les géants contrôlés par la SASAC, qui brassent d'énormes quantités d'argent, constituent un terreau fertile.

Le deuxième objectif consiste à extirper les réseaux constitués autour des puissants foyers de pouvoir que constituent ces grandes entreprises publiques chinoises, afin de mettre fin à cette pratique … ou de laisser la place aux réseaux mis en place par la nouvelle faction dirigeante, selon les interprétations.

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Commentaires 2
à écrit le 14/01/2014 à 3:20
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Merci M. Dufour ! C'est un article très intéressant ! Tenez-nous au courant des succès (ou des échecs) de cet homme face aux entreprises d'État.

le 17/01/2014 à 2:13
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