De là à parler de mercredi noir sur les places boursières mondiales, reste un pas à franchir, mais il n'est pas trop fort de dire que la tendance a été à la déprime, ce mercredi 20 janvier. Prises dans la spirale baissière des cours du pétrole et toujours inquiètes de la santé de l'économie mondiale, les places de Paris, de Francfort, de Londres ou encore de Milan ont clôturé en très nette baisse. La première a chuté de 3,45%, à 4.124,95 points, son plus bas niveau depuis janvier 2015, la deuxième de 3,46%, à 5.673,58 points, Francfort a plongé de 2,82%, à 9.391,64 points, et Milan, de 4,83% (lire encadré). A l'heure de la clôture en Europe, Wall Street était à l'avenant, l'indice Dow Jones dévissant de 2,56% et le Nasdaq, de 2,59%. "C'est un début d'année calamiteux, probablement jamais vu, en dehors peut-être du mois de janvier 1988, après le krach de l'année précédente", observe Xavier de Villepion, vendeur d'actions chez HPC. Selon lui, les investisseurs sont focalisés sur le pétrole, alors que les cours de l'or noir ont signé une nouvelle chute - le baril de Brent a baissé de 3,89% à 27,64 dollars -, provoquant un plongeon des Bourses asiatiques.
Il faut dire que le dernier rapport de l'Agence internationale de l'énergie (AIE) a renforcé les inquiétudes quant aux excédents mondiaux. A Tokyo, l'indice Nikkei a plongé de 3,7%, tombant à son plus bas niveau depuis 15 mois. La Bourse de Shanghai a abandonné 1,03% tandis que Hong Kong a dévissé de 3,82%, un plancher jamais atteint au cours des quatre dernières années. L'AIE a expliqué dans son rapport mensuel, publié mardi, que les cours pourraient continuer de reculer cette année car l'offre devrait rester surabondante, du fait de la production iranienne qui va venir s'ajouter, après la levée des sanctions économiques et financières qui frappaient Téhéran. "L'évolution du prix du pétrole est un baromètre qui mesure actuellement le degré d'anxiété des investisseurs", relève pour sa part Franklin Pichard, de Barclays Bourse.
Les marchés européens n'ont donc pas réussi à poursuivre le rebond observé la veille, sous l'impulsion de chiffres sur la croissance chinoise qui laissent espérer des mesures de relance de la part des autorités. La croissance chinoise a bien ralenti l'an dernier, à son plus bas niveau depuis 1990, à 6,9%, mais les investisseurs mondiaux avaient réagi positivement à ces données. Soit parce que ce chiffre avait été largement anticipé, soit parce qu'il laisse espérer de nouvelles mesures de Pékin pour donner un coup de fouet à la deuxième économie mondiale.
Des milliards de dollars volatilisés
Depuis le début de l'année, les places financières dégringolent et des milliards de dollars de valorisation sont ainsi partis en fumée. "On va continuer d'assister à une guerre entre la nervosité des investisseurs et des indicateurs techniques qui montrent que la chute est allée trop loin", a commenté Chihiro Ohta, analyste chez SMBC Nikko Securities Inc. à Tokyo. "Aux racines de la débâcle de ce début d'année se situe le déséquilibre entre l'offre de pétrole et la demande, et tant que les prix ne se stabiliseront pas, les marchés boursiers seront à la peine".
Dans ce contexte de fébrilité, le Fonds monétaire international (FMI) a abaissé mardi ses prévisions de croissance. L'économie mondiale pourrait bientôt "dérailler", a indiqué le FMI, en pointant le ralentissement chinois et la situation "périlleuse" de nombreux pays émergents. L'institution internationale a réduit de 0,2 point sa prévision de croissance pour 2016 (3,4%) comme pour 2017 (3,6%) alors que les pays émergents sont guettés par le "ralentissement généralisé". L'essoufflement chinois fait en particulier chuter les cours de nombreuses matières premières et prive les pays qui les exportent de ressources cruciales.
Le renforcement du dollar, qui pénalise les cours du pétrole libellés en billets verts, n'améliore pas la situation. Sur le marché des changes, les devises des émergents accusent le coup. En Russie, où le pétrole représente avec le gaz plus de la moitié des revenus de l'Etat, le rouble est ainsi tombé mercredi à son plus bas niveau historique face au dollar (avec AFP).
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Rome et l'UE tentent de rassurer sur les banques italiennes
Plusieurs dirigeants italiens et européens se sont voulus rassurants mercredi sur la situation bancaire en Italie, où les valeurs des établissements financiers s'effondrent depuis le début de la semaine à la Bourse de Milan. "Je ne vois pas le risque d'une crise bancaire majeure" en Italie, a ainsi affirmé le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker lors d'une conférence de presse au Parlement européen à Strasbourg. Les investisseurs s'inquiètent d'un retard dans la consolidation de ce secteur très éclaté et de l'importance des créances douteuses, qui dépassent les 200 milliards d'euros, un chiffre record depuis 20 ans. Les discussions qui trainent avec la Commission européenne au sujet de la création d'une "bad bank", structure de défaisance chargée de récupérer une partie de ces crédits en souffrance, afin d'apurer les comptes des banques, alimentent la suspicion autour des valeurs bancaires.
Des indiscrétions faisant état d'une demande d'informations au sujet des créances douteuses adressée à certaines banques italiennes par la Banque centrale européenne (BCE) ont ajouté au trouble. Mais tant le ministre italien des Finances, Pier Carlo Padoan, que la BCE ont affirmé qu'il s'agissait d'une enquête générale, se déroulant dans différents pays de la zone euro, et visant à "identifier les meilleures pratiques dans la gestion des crédits en souffrance". Dans ce contexte de grande fébrilité, le président italien du Conseil Matteo Renzi a rencontré dans la matinée M. Padoan, ainsi que les gouverneur et directeur général de la Banque d'Italie, Ignazio Visco et Salvatore Rossi. Les autorités se sont dites convaincues que "les mesures passées et futures prises par le législateur aideront certaines banques dans le processus de consolidation" et "les intermédiaires financiers dans la gestion plus rapide et adéquate des crédits en souffrance", selon des sources proches du chef du gouvernement italien, citées par les médias.
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