Agir sans attendre

Chaque semaine, découvrez les chroniques sur la vie au bureau réalisée par Sophie Peters. Anecdotes, conseils, expériences : pour sourire mais aussi mieux se sentir dans son job.

 

S'il y a bien une chose qui m'agace avec l'arrivée d'Obama à la présidence des États-Unis, ce sont les discussions de salon pour dire qu'il ne peut que susciter des déceptions. « Il porte trop d'espoir. Ce n'est pas possible. Il va faire des déçus. Il n'y arrivera pas, c'est trop pour lui », disent les uns. « Il lui est interdit d'échouer », affirment d'autres. Oui, ses défis sont spectaculaires. Lui-même en a conscience et n'a pas dit autre chose lors de son discours d'investiture. Il a d'ailleurs exhorté ses équipes et tous les citoyens derrière lui à prendre leur part de la tâche. Attendre de lui qu'il fasse tout le boulot, c'est un peu exagéré, non ?

 

L'obamania est enthousiasmante. Mais elle est aussi dangereuse. Surtout lorsqu'elle devient un exutoire à tous nos malheurs, un recours à tous les maux de l'époque. Car derrière la demande faite à ce nouveau héros de prendre à bras-le-corps les problèmes de la planète se cache inconsciemment l'attente du remède miracle, le coup de baguette magique. « Toute attente est une inquiétude qui s'ignore », écrit l'écrivain Daniel Rop. Inquiétude que le réel soit inférieur à l'imaginaire, que le futur en arrivant au présent s'amoindrisse, que celui dans lequel on a mis nos espoirs ne soit pas à la hauteur. Inquiétude surtout de ne pas savoir faire nous-mêmes, avec l'ultime tentation de s'en remettre aux autres. Attendre, c'est rester passif. C'est se mettre en position de laisser les autres et le sort décider pour soi. C'est ne pas vouloir prendre sa part dans le collectif. C'est aussi être perfectionniste (on renonce à agir parce qu'on voudrait n'agir que de manière parfaite). C'est manquer un peu d'estime de soi (on ne se sent pas capable de faire bouger les choses). C'est enfin avoir le moral à zéro (tout nous coûte, tout nous pèse).

 

Force de conviction

 

L'attente est aussi génératrice de grands quiproquos. Quand on se dit « c'est à mon boss, à mon collègue, à mon conjoint, à mon ami » de faire le pas. Quand on se retire de la scène persuadé de n'avoir plus de réplique à donner. Alors forcément on a de grandes chances d'être déçu. Car dans cette attente on a déjà fait les questions et les réponses. On a écrit le synopsis, distribué les rôles et enfermé l'autre dans sa logique à soi. Sans jamais prendre le risque de l'affronter. D'être dans la réalité. Non, l'espoir ne fait pas vivre. En ce sens qu'il ne suffit pas à nous mettre dans l'action. Ce qui nous pousse à agir, c'est le désir et l'aspiration, l'espoir n'est que l'éventuel coup de pouce.

 

Aujourd'hui, pour nous sortir de ce mauvais pas mondial, il va falloir faire plus qu'espérer. Et faire appel à notre volonté. Les Cassandre n'ont qu'à bien se tenir. Peut-être nous faut-il aussi abandonner nos stratégies de repli, commandées par nos peurs, pour vouloir enfin aller mieux, partager et reconnaître à la mesure de notre quotidien qu'il nous est possible d'agir dans notre environnement immédiat. Ce n'est rien d'autre que la conviction de Barack Obama lors de son investiture : « Ce qu'on attend maintenant, c'est une nouvelle ère de responsabilité. » Sa réussite ne peut être que la somme des nôtres.

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