Respect de soi, respect des autres

Chaque semaine, découvrez les chroniques sur la vie au bureau réalisée par Sophie Péters. Anecdotes, conseils, expériences : pour sourire mais aussi mieux se sentir dans son job.

 

Cela peut paraître une valeur ringarde. Bonne à ranger au rayon des grands-parents, voire des arrière-grands parents. Y a plus de respect, mon brave monsieur. Dans l'entreprise et dans nos relations de travail, on le constate tous les jours? Là encore, c'est un facteur de stress. Quand le collaborateur n'est pas reconnu pour le travail fourni. Devenu une ressource, il n'est pas assez productif. En mars dernier, dans « Le Monde diplomatique », un businessman confiait : « Si vous voulez être aimé, prenez un chien. Dans l'entreprise, il faut se faire respecter : récompenser et punir. »


La peur et l'autorité


L'entreprise citoyenne des années 1980 s'est peu à peu transformée en un système complexe où l'autorité a pris le pas sur l'aspect participatif. La course à la compétitivité s'est accompagnée d'une discipline plus forte dans les relations hiérarchiques. La peur et l'autorité redeviennent une solution pour mener les hommes. Parents, psys, profs, chefs d'entreprise, tout le monde en parle. Indispensable, cette valeur n'a pourtant de sens que si elle est liée à celle de respect. Mettre des limites à un enfant, c'est l'aider à se construire. Faire usage de la menace et contrôler tous ses faits et gestes, c'est l'en empêcher. L'autoritarisme passe toujours par la tentative d'exercer sur l'autre une violence morale : vouloir dominer, contraindre, imposer? Et sous couvert de conseils, on assène volontiers des jugements de valeur, vite érigés en loi universelle destinée à maintenir les individus dans la soumission. Plus une personne est vulnérable et angoissée, plus elle puisera dans ces « règles » des repères pour se situer dans la vie. Mais en empêchant quelqu'un de développer ses propres opinions, on le maintient dans un état de dépendance pour garder le pouvoir sur lui. C'est le contraire du bon exercice de l'autorité, où l'affirmation de soi a pour objectif de donner à l'autre les moyens de s'affirmer à son tour, et de l'autoriser à nous dépasser. On voit tout de suite ce qui dans l'entreprise est alors le plus productif? Or dans le travail, la perversité n'est jamais loin de l'autorité. Entre celui qui n'existe que par l'humiliation de l'autre pour l'abaisser, et celui qui ignore tout bonnement et simplement, sans même daigner lui jeter un regard, un collaborateur croisé dans un couloir, ils sont légion ceux qui ne s'estiment pas suffisamment pour estimer les autres. Beaucoup voient dans le mépris la seule façon d'« imposer le respect ». Mais quel respect ? Juste celui d'individus anesthésiés par la surcharge de travail qui considèrent que regarder le voisin ou son collaborateur, c'est trop lui demander. La fameuse « fatigue d'être soi », selon l'expression du sociologue Alain Erhenberg. Faire preuve d'attention et d'amabilité, laisser tomber sa carapace n'est pourtant pas incompatible avec l'efficacité. Au contraire. Selon Kant, cette attitude prend racine dans le respect envers soi? parce que, nous dit le philosophe, autrui est comme moi. Mais dans une société qui a érigé l'individualisme en règle de vie, on fait du respect un dû sans imaginer qu'il faut d'abord le pratiquer pour le recevoir. 98 % des Français le placent en tête des valeurs les plus importantes à leur bonheur, nous apprend « Psychologies Magazine ». Par ce biais, ils ne signifient pas leur souci de l'autre, commente le psychanalyste Serge Hefez, mais leur nécessité d'être reconnu comme personne. C'est dire notre mal-être, et notre insatiable besoin de reconnaissance. Rester dans cette attente, c'est se condamner à la solitude. Sortir du rapport dominant-dominé, c'est découvrir la communication avec l'autre, se réapproprier son histoire, se libérer de ses émotions, devenir indulgent avec soi. Pour le devenir avec les autres. Et enfin remplacer les affirmations péremptoires par des critiques constructives en sachant, si on est en cause, se remettre en question. Ce sont elles qui vont aider à apprendre le respect de l'autre. La relation est plus authentique si on s'y implique.  

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