Eclatement de la zone euro : les tabous tombent les uns après les autres

La sortie d'un pays de la zone ou un défaut partiel sur les dettes souveraines ne sont plus des tabous.
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Dans une des galeries du musée du Prado, à Madrid, on peut admirer une toile de Goya intitulée « Duel à coup de gourdins ». Elle représente deux hommes ne réalisant pas qu'ils vont être engloutis dans les sables mouvants tant ils sont occupés à leur combat. C'est une splendide et sombre métaphore - le tableau fait partie de la série des «peintures noires » de l'artiste espagnol - de ce qui est en train d'advenir à l'Europe. Car les disputes régulières qui divisent les membres des pays de l'euro pour régler l'interminable crise de l'euro créée par l'étincelle grecque en octobre 2009 a pris un tour réellement dangereux depuis le fameux sommet de Bruxelles censé régler définitivement les problèmes. Des tabous importants sont tombés.

Le premier est celui de la sortie d'un pays de la zone euro. C'est en effet l'alternative clairement signifié au Premier ministre grec par le président français Nicolas Sarkozy et la chancelière allemande Angela Merkel, après sa décision surprise d'organiser un référendum sur le plan de sauvetage. De facto, il est suggéré que la solidarité inhérente au projet de la zone euro tant martelée depuis le début de la crise pour justifier les différents plans aurait du plomb dans l'aile. Les marchés ne s'y sont pas trompés. « L'information ne sera pas perdue. Dans toute l'Europe, tous les trésoriers de banque ou d'entreprise, tous les gérants de portefeuille, tous les responsables de contrats commerciaux à long terme évaluent désormais le risque de change. », explique Maurice de Boisséson, chez Octo Finances, société d'investissement spécialisée dans les marchés de crédit. Cet avis n'est pas isolé dans l'ensemble du secteur financier européen.

Deuxième tabou qui a été levé : la décote sur la dette grecque est de nature à remettre en cause le principe qui semblait gravé dans le marbre, ou au moins dans la tête des responsables européens, de la sécurité absolue des obligations souveraines de la zone euro. Qu'est-ce qui empêche que le « hair cut » de 50 % proposé sur la dette grecque ne se reproduise demain pour le Portugal ou l'Italie. « On a ouvert une boîte de Pandore très dangereuse », s'inquiétait mercredi dans les colonnes du « Financial Times » le patron de Deutsche Bank Josef Ackermann.

Dernier tabou, l'affirmation de plus en plus affichée sans complexe dans les opinions publiques d'un doute croissant à l'égard de l'euro, alimentée il est vrai par la succession de sommets censés trouver une solution à la crise et qui ne débouche que sur une aggravation des problèmes, avec son cortège de plans de rigueurs de moins en moins supportés pour les uns et d'aide accrue de moins en moins acceptés pour les autres. Ainsi, la semaine dernière, quelque 57 % des Hollandais disaient préférer le retour au florin. Et mercredi, la fédération des exportateurs allemands assurait pouvoir « vivre sans l'euro ». C'est peut-être ce scepticisme montant qui est au final le plus dangereux pour la pérennité de la monnaie unique.

 

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