Plus grand, plus haut, plus durable

L'immeuble est le révélateur des ambitions et des contraintes de l'entreprise. Le projet immobilier doit aujourd'hui répondre aux exigences du développement durable et à celles de la réduction des coûts. Elles ne sont pas toujours facilement compatibles.
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Tous les spécialistes le savent ?: Paris et sa région constituent l'un des plus grands marchés mondiaux de l'immobilier à côté de New York, Londres et Tokyo, avec une capacité de l'ordre de 40 à 50 millions de m2, chacune de ces grandes capitales économiques mondiales abritant environ 2,5 millions d'emplois tertiaires. Et cette concentration des activités économiques dans des villes de plus en plus grandes est une tendance de fond. Toutes les mégalopoles, notamment dans les pays émergents, travaillent sur des projets d'immobilier de bureau de très grande ampleur, de Moscou à Kuala Lumpur, de Pékin à Séoul. Ces grands centres tertiaires deviennent des « signatures », parachevées en général par l'appel aux plus grands architectes qui rivalisent de créativité et d'audace.
En France, quelles sont les tendances à l'?uvre?? Il faut remarquer d'abord que la construction de nouveaux immeubles a singulièrement ralenti du fait de la crise. Alors que l'on créait chaque année environ 1 million de m2 de bureaux neufs au cours des vingt dernières années, ce chiffre est revenu à environ 500?000 m2 par an depuis 2010, dont la rénovation représente près de la moitié. Mais le niveau des transactions reste élevé, environ 2 millions de m2 par an depuis une dizaine d'années, dont 700?000 m2 de grandes surfaces, un marché sur lequel on enregistre entre 50 à 70 opérations par an pour une surface moyenne de 12?000 m2.

La vogue des immeubles « verts »
Dans les nouvelles constructions ou les opérations de rénovation, la qualité environnementale des projets fait l'objet désormais de beaucoup d'attention. Les consommations d'énergie et d'eau, la gestion des températures sont parmi les sujets traités en priorité. L'immeuble devient lui-même producteur d'énergie. Des entreprises comme Lyonnaise des Eaux développent aujourd'hui des systèmes de récupération de chaleur des eaux usées qui permettent de produire du chaud ou du froid. La qualité écologique des immeubles fait désormais l'objet de nombreux labels, qui entrent progressivement en concurrence les uns avec les autres. Au label français HQE (Haute Qualité environnementale), créé au début des années 1990 et qui s'intéresse notamment à la gestion de l'énergie de l'eau et des déchets mais aussi au confort des utilisateurs, s'ajoutent aujourd'hui des labels comme LEED (Leadership in Energy and Environmental Design) créé en 1998 aux États-Unis qui mesure notamment l'efficacité de la consommation énergétique et d'eau, ou BREEAM (British Research Establishment Environmental Assessment Method), lancé en Grande-Bretagne en 1990 et qui établit des standards de bonnes pratiques en matière de performance environnementale. Ces labels sont devenus des éléments importants pour les constructeurs et les promoteurs, car les sociétés foncières ou les compagnies d'assurances auxquelles ils vendent leurs immeubles, veulent « verdir » leur patrimoine immobilier et l'attrait de labels anglo-saxons, comme LEED ou BREEAM est de plus en plus fort. En outre, les occupants de ces bâtiments d'un nouveau type s'engagent, au travers des baux qu'ils signent, à utiliser à plein les nouvelles performances énergétiques des locaux qu'ils occupent.

Moins de place pour chacun, plus d'espaces collectifs
Dans le cadre de la recherche permanente d'optimisation des coûts, les entreprises regardent aussi de près la gestion de l'espace. L'immobilier est le deuxième poste de charges de l'entreprise derrière les salaires et ce coût représente entre 4 et 8?% du chiffre d'affaires. C'est donc un poste important, qui fait l'objet d'une attention croissante de la part des directions financières. Il y a une dizaine d'années, la norme était aux alentours de 20 m2 par salarié. Aujourd'hui, on est plutôt autour de 15 m2. Les postes de travail ont tendance à se resserrer, mais les entreprises développent davantage d'espaces collectifs et de services. L'individu voit donc son espace de travail se réduire au profit de la collectivité, mais néanmoins dans un cadre de densification des immeubles.

Tour ou campus, le débat est ouvert
Un autre sujet mobilise les débats chez les architectes, les promoteurs et les entreprises?: faut-il privilégier le modèle de la tour ou celui du campus?? Les deux approches ont leurs avantages et leurs inconvénients. Le campus, un concept qui vient de la Silicon Valley, s'est développé dans un certain nombre de pays émergents, notamment en Inde, où, dans la région de Bangalore, toutes les grandes sociétés de services informatiques ont créé de tels ensembles, mêlant harmonieusement divers types de bâtiments au c?ur de jardins paysagers. Mais la pression sur le foncier est moins forte à Bangalore que dans la région parisienne où les terrains sont rares. Le campus convient pour les entreprises qui choisissent de s'installer dans la grande couronne de la région parisienne.
Force est de constater néanmoins que la tour a toujours de beaux jours devant elle. L'un des projets les plus spectaculaires dans Paris, sur la rive gauche, non loin de la Grande Bibliothèque, pour lequel un concours vient d'être ouvert, concerne l'édification d'une tour de 90?000 m2, pour les dessins duquel les architectes français Jean Nouvel et Christian de Portzamparc sont en compétition. En outre, deux tours sont en construction à La Défense, dont l'une, Carpe Diem, prévoit 48?000 m2, et l'autre, la tour Phare financée par Unibail et Rodamco, dont la construction vient de démarrer, sans parler de la tour Horizon à Boulogne, dont le propriétaire est Gecina et l'occupant les laboratoires Roche.
Ces différents projets montrent bien que malgré les crises qui, à échéance régulière, viennent contrarier l'activité du secteur, l'immobilier de bureau n'a pas perdu son aspect d'objet de prestige, tentant de rassembler dans une même construction l'audace créative, les nécessités de préserver les ressources, et les exigences opérationnelles.

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Les immeubles les plus remarquables de l'année
Chaque année, le SIMI, le rendez-vous annuel de l'immobilier d'entreprise, décerne des récompenses aux réalisations jugées les plus remarquables par un jury composé exclusivement de directeurs immobiliers de grandes entreprises, présidé cette année par Philippe Amiotte, directeur des moyens généraux et de l'immobilier de Danone. Naturellement, à l'heure où sont écrites ces lignes, les récipiendaires des grands prix SIMI, parrainés par Generali, n'étaient pas connus, mais un coup d'?il à la liste des nominés permet néanmoins de se faire une idée des réalisations les plus remarquables en matière d'immobilier d'entreprise. Ainsi, dans la catégorie immeubles neufs, deux réalisations se disputaient les faveurs du jury : l'immeuble du 52 avenue Hoche à Paris, réalisé par Eurosic et la tour Horizon à Boulogne-Billancourt (Gecina). Dans la catégorie des immeubles rénovés, ce sont la tour First à La Défense (Altarea Cogedim, photo ci-contre) et le siège de La Banque Postale à Paris (Bouygues Immobilier) qui étaient en lice. À noter aussi des réalisations intéressantes dans le domaine des immeubles d'activité et de recherche : Odyssée, un bâtiment de Schneider Automation à Carros, dans les Alpes-Maritimes, et l'usine d'assemblage de l'Airbus A350 à côté de Toulouse. Le point commun de ces réalisations est d'offrir une esthétique originale, des performances énergétiques remarquables et des fonctionnalités opérationnelles en attente avec les nouveaux besoins exprimés par les entreprises.

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Commentaire 1
à écrit le 09/12/2011 à 0:33
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Le Crédit Agricole Alpes Provence vient d'inaugurer son nouveau siège social situé à Aix en Provence. Il s'agit d'un campus reproduisant le style des universités américaines. Je vous conseille fortement d'y prêter attention. Cordialement

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