Il y croit toujours envers et contre tous. Xavier Bertrand est candidat à la présidentielle très exactement depuis le 16 septembre 2012. Ce jour-là sur Europe 1, l'ancien ministre de Nicolas Sarkozy se met à son compte. Onze années suivront d'une campagne permanente avec plus de bas que de hauts. Après un renoncement (à la primaire de 2016) et un cuisant échec à celle de 2021 (il échoue à la quatrième place et appelle à voter pour Valérie Pécresse), l'ex-sarkozyste est reparti pour un tour.
« Je ne me planque pas »
En octobre dernier, il a fondé son mouvement « Nous France » avec dans son viseur l'élection de 2027. Depuis, le président des Hauts-de-France a repris la route pour un énième tour de France. Infatigable Xavier Bertrand.
« Je ne me planque pas. Il ne s'agit pas d'être omniprésent. Moi, je veux être utile pour les trois ans à venir et mettre sur la table mes propositions. Et si Emmanuel Macron les reprend, j'en serai ravi pour les Français », confie-t-il lors d'un entretien depuis sa voiture transformée en bureau.
Xavier Bertrand fait donc entendre sa musique sur la réforme des retraites (qu'il n'a pas défendu au grand dam d'Eric Ciotti), sur la réindustrialisation (pour célébrer ses succès dans sa région), sur les banlieues et sur l'état d'urgence (qu'il n'a pas réclamé). Bref, Xavier Bertrand est aux antipodes de Laurent Wauquiez qui a disparu du débat public et se réserve pour 2027. À 58 ans, Xavier Bertrand se sent rajeunir. Papa d'une petite Maya (née il y a un mois), l'ancien maire de Saint-Quentin s'amuse de sa nouvelle paternité :
« Il y a des mecs qui parlent de la réforme des retraites et il y a le père de cinq enfants qui feront les cotisants de demain. »
Plus zen que jamais, l'élu chti sait bien que sa position politique est loin d'être favorable au sein de son camp politique. L'élection d'Eric Ciotti a consacré une ligne plus à droite qui ne convient pas forcément au tenant de la droite sociale et populaire. Mais il a retenu la leçon.
Son escapade en dehors des Républicains entre 2017 et 2021 lui a déjà coûté très cher. Résolument installé à l'intérieur de sa formation politique, il figurait au premier rang lors du lancement des états généraux et a bien l'intention d'y apporter sa contribution. Ses relations avec le président des Républicains sont, dit-il, « d'un bon niveau ». « On se parle régulièrement. Nous ne sommes pas sur la même ligne, mais on se respecte », enchaîne-t-il. Ces deux-là se parlent. Mais entre eux, il n'y a pas d'atomes crochus. Cela n'empêche pas le patron des Hauts-de-France de reprendre et saluer les propositions sur l'immigration portées par LR. Xavier Bertrand la joue bon soldat, un nouveau rôle pour un homme réputé pour être « perso ».
Plus populaire que Wauquiez et Le Pen
À droite, ils sont peu nombreux à croire encore en ses chances. Il a bien sûr autour de lui une escouade d'élus qui ont rejoint « Nous France ». D'autres s'interrogent sur son poids politique réel alors que le jeune (37 ans) et remuant député du Lot Aurélien Pradié le concurrence sur le terrain de la droite sociale, Xavier Bertrand fait mine de ne pas y croire. « Tu crois que Xavier est cramé ? » a demandé Gérard Larcher à un proche. Plutôt bienveillant, le président du Sénat jauge les chances des uns et des autres à l'intérieur des leaders LR tout en gardant un œil sur... Edouard Philippe.
Auprès des Français, Xavier Bertrand conserve un bon niveau de popularité. Il figure à la 7ème place dans le dernier classement des personnalités Ifop/Paris Match, devant Nicolas Sarkozy, Marine Le Pen et Laurent Wauquiez. « Il a toujours un socle de popularité appréciable autour de 40%, équilibré entre soutien chez les sympathisants LR et Renaissance, tout en étant pas trop jugé à gauche, relève Frédéric Dabi, directeur général de l'Ifop. Une équation qui fait de lui un premier ministrable idéal. » L'audacieuse remarque du politologue n'est pas si farfelue. Ce fut d'abord l'une des premières intentions d'Emmanuel Macron en 2017 avant de jeter son dévolu sur le juppéiste Edouard Philippe. L'hypothèse Matignon trotte forcément dans la tête du Picard même s'il se garde bien d'en parler. À force de dire qu'Emmanuel Macron est « en situation de cohabitation », cela ressemble à une offre de service qui ne dit pas son nom. Leurs rapports semblent même s'améliorer. « Tu devrais rebaptiser Choose France en Choose Hauts-de-France », a-t-il récemment conseillé avec le sourire lors de l'inauguration d'une usine de batteries à Dunkerque. « Tu as raison », lui a répondu le président avec le sourire lui aussi quatre fois ministre entre 2004 et 2012, le méticuleux Xavier Bertrand est forcément prêt pour de nouveaux horizons politiques. Comme toujours.