Accidents et arrêts de travail : les pistes du gouvernement

EXCLUSIF - En coulisses, l’exécutif projette d’augmenter le nombre de jours de carence. Et prépare une « grande initiative » pour réduire le fléau des accidents du travail.
Fanny Guinochet
Le gouvernement vise des économies estimées jusqu’à 1 milliard d’euros par an.
Le gouvernement vise des économies estimées jusqu’à 1 milliard d’euros par an. (Crédits : LTD / Doriano Strologo pour La Tribune Dimanche)

« On a trop d'accidents au travail, trop de Français meurent au travail », lançait Gabriel Attal lors de son intervention télévisée mercredi dernier. Évoquant la statistique de deux morts par jour, le chef du gouvernement annonçait « une grande initiative », « réunissant l'ensemble des partenaires, des partenaires sociaux, les élus, les parlementaires ». Selon nos informations, cette réunion se tiendra autour du 20 avril.

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Pour améliorer la situation, l'exécutif veut s'inspirer des préconisations présentées l'an dernier, lors des assises du travail, par Sophie Thiéry, la présidente de la commission travail et emploi du Cese, et Jean-Dominique Senard, président du groupe Renault. Au menu : renforcer la prévention pour réduire la fréquence et la gravité des accidents ; récréer des postes de médecin du travail, grâce au renouvellement du numerus clausus ; encourager encore un peu plus les employeurs à réduire l'usure professionnelle. Sans oublier de stimuler les innovations technologiques qui peuvent faciliter les ports de charges lourdes pour améliorer les conditions de travail de ceux qui exercent des travaux pénibles, par essence, plus exposés aux risques. Près des deux tiers des accidents du travail surviennent, en effet, dans la construction, l'industrie ou le transport.

Un milliard d'euros d'économies

Alors que le déficit public dérape, l'objectif de l'exécutif est aussi de faire des économies. Certes, la branche de la Sécurité sociale consacrée aux accidents du travail et maladies professionnelles (dite AT-MP) est excédentaire de plus de 1,4 milliard d'euros, mais les prestations pour remplacer les revenus des actifs en incapacité temporaire ou permanente représentent 90 % des dépenses.

Par ailleurs, selon nos informations, pour réduire les dépenses liées aux indemnités journalières, qui représentent 16 milliards d'euros et augmentent de 6 % par an, le gouvernement prévoit de remettre au goût du jour une piste déjà envisagée lors du budget 2024 : baisser la prise en charge des arrêts de travail.

L'idée de rallonger le délai de carence - temps avant lequel la Sécurité sociale enclenche l'indemnisation - fait son chemin. Aujourd'hui, dans le privé, le versement des indemnités journalières démarre à partir du 4e jour d'arrêt. Demain, il pourrait être repoussé au 5e, au 6e, voire au 8e jour. Selon les scénarios, les économies estimées peuvent aller jusqu'à 1 milliard d'euros par an. Le gouvernement parie que la majorité des salariés n'y verra que du feu, puisque ces jours de carence supplémentaires pourraient être remboursés par les employeurs. Sans surprise, les entreprises voient d'un très mauvais œil ce possible transfert de charges.

Jours de carence non compensés

Aussi les patrons poussent-ils une autre option, sur laquelle planche également, en coulisses, l'exécutif : la mise en place de jours de carence dit « d'ordre public », c'est-à-dire sanctuarisés, que personne n'aurait le droit de venir compenser. Et qui, de facto, épargneraient les entreprises. Les salariés du privé, eux, seraient alors 100 % perdants. Selon des sources gouvernementales, cette solution présenterait l'avantage de rétablir une forme d'équité avec la fonction publique. En effet, les agents n'ont qu'un seul jour de carence quand ils sont en arrêt maladie, mais celui-ci n'est jamais compensé.

Pour l'heure, rien n'est tranché. Toute réforme des arrêts de travail est toujours socialement explosive.

Fanny Guinochet
Commentaires 11
à écrit le 02/04/2024 à 16:30
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Une grande initiative pour améliorer la situation? Les pistes à suggérer sont nombreuses! ( liste non exhaustive): 1) l’absence de réelle indépendance des médecins du travail, acteurs premiers de la prévention, toujours sous la subordination jurid...

à écrit le 02/04/2024 à 15:38
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« On a trop d'accidents au travail, trop de Français meurent au travail » Et c'est pas la retraite à 64 ans qui va arranger les choses en particulier pour les métiers difficiles physiquement .

à écrit le 02/04/2024 à 9:31
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Travailler tue.

à écrit le 01/04/2024 à 17:40
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pourquoi pas le meme nombre de jours de carence public et prive nous sommes tous Français que je sache? a corriger d'urgence pourquoi favoriser les foncrionnaires?

à écrit le 01/04/2024 à 8:47
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Incroyable ! Quelle insulte aux salariés ! Une de plus. De nombreux jeunes diplômés se barrent déjà bosser dans d'autres pays aux conditions de travail et/ou de rémunération meilleures, et la Macronie semble décider à accentuer le mouvement ! Saboton...

le 01/04/2024 à 13:08
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c'est evident il y tres peut d'accident de travail chez les ministres et meme chez les pdg des entreprises d'etat ou ceux qui dirige n'ont jamais eut un outil en main

le 02/04/2024 à 14:26
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Je confirme ! Le privé ne pourra tout simplement plus se soigner (médocs à payer) ni s'arrêter de travailler (5 jours de carence voir 8?). Ben c'est le progrès version Micron, les gens qui ne sont rien n'ont pas besoin de soins.

à écrit le 31/03/2024 à 19:57
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Toujours pas cap de supprimer les 35H !

le 31/03/2024 à 21:14
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Compte tenu de la conjoncture, ça creuserait les déficits car les entreprises s'en serviraient pour arrêter de rémunérer les heures supplémentaires ou bien pour réduire les effectifs...

à écrit le 31/03/2024 à 16:12
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"L'idée de rallonger le délai de carence - temps avant lequel la Sécurité sociale enclenche l'indemnisation - fait son chemin." Après la hausse des franchises médicales, les kleptocrates au pouvoir récidivent sur les jours carences applicables a...

le 01/04/2024 à 8:52
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Ça montre aussi à quel point le gouvernement est complètement ignorant de la situation de bien des travailleurs du privé. Les grands groupes avec des syndicats puissants compenseront sûrement ces j de carences, mais du côté des petites entreprises, l...

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