Budget 2023 : les oppositions boudent la main tendue par Bercy, le gouvernement prêt à durcir le ton

À quelques semaines de la présentation du budget 2023 en conseil des ministres, le ministre des Comptes Publics Gabriel Attal a proposé aux groupes d'opposition de participer aux Dialogues de Bercy pour leur « présenter des pistes et des arbitrages en cours, échanger sur leurs propositions en anticipation du débat ». De leur côté, les groupes d'opposition ont affiché leur réserve. Face à une possible désertion, le gouvernement brandit la menace du 49-3.
Grégoire Normand
Le ministre de l'Economie Bruno Le Maire et le ministre des Comptes publics dans les couloirs du Sénat.
Le ministre de l'Economie Bruno Le Maire et le ministre des Comptes publics dans les couloirs du Sénat. (Crédits : Reuters)

La rentrée parlementaire promet des débats houleux. Après la séquence brûlante de l'été marqué par le vote du budget rectificatif 2022 et le projet de loi pouvoir d'achat, le gouvernement tente de préparer le terrain de sa majorité relative à l'Assemblée nationale. Dans un entretien accordé au Parisien ce week-end, le ministre des Comptes publics Gabriel Attal a annoncé qu'il voulait mettre en place les Dialogues de Bercy afin d'inviter les oppositions à la préparation du budget 2023.

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Depuis plusieurs semaines, l'idée d'utiliser l'article du 49-3 refait surface, mais l'exécutif semble à ce stade vouloir éviter cette option. « Nous invitons l'ensemble de la représentation nationale à travailler sur le budget 2023 avant même qu'il ne soit finalisé. Ces Dialogues de Bercy seront proposés à tous les parlementaires des commissions des finances de l'Assemblée et du Sénat, majorité comme opposition », a expliqué le ministre. D'après une source interrogée à Bercy récemment, la présentation du budget pourrait avoir lieu la dernière semaine du mois de septembre.

Pendant la campagne présidentielle, Emmanuel Macron critiqué lors de son premier mandat pour sa pratique verticale du pouvoir avait promis de changer de méthode. Mais la proposition du gouvernement risque de faire un flop. En effet, plusieurs partis et organisations syndicales ont déjà fait savoir qu'ils allaient boycotter le Conseil national de la Refondation (CNR) prévu le 8 septembre prochain. Face à cette possible désertion, le vote sur le prochain budget 2023 pourrait virer au casse-tête.

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La Nupes et le RN en ordre de bataille

De la Nouvelle union populaire écologique et sociale (Nupes) au Rassemblement national (RN), les partis d'oppositions ont clairement fait part de leur réticence à la proposition des Dialogues de Bercy. « Je n'irai pas à Bercy dialoguer avec Gabriel Attal », a tranché sur BFMTV ce dimanche le président par intérim du Rassemblement national, Jordan Bardella, en fustigeant dans ce dialogue ou le Conseil national de la refondation, des « lieux de discussion, des agoras alternatives » à l'Assemblée nationale.

À gauche, le président de la commission des Finances de l'Assemblée Éric Coquerel (LFI) a fait également part de ses réserves au Huffington Post: « Sur le papier, je n'ai rien contre le fait d'aller à Bercy. Mais cela ne peut remplacer ni anticiper les débats à l'Assemblée. Et pour l'instant, j'ai surtout l'impression, à lire Gabriel Attal, qu'il est dans une recherche de majorité anticipée avec les Républicain ». Le bureau du Parti socialiste (PS) doit se réunir mardi pour définir une position commune sur le conseil national de la refondation et les Dialogues de Bercy.

La droite en embuscade

A droite, les élus sont plus divisés. Réunis à Angers ce week-end, le responsable des sénateurs Les Républicains (LR) Bruno Retailleau a fustigé la main tendue par la majorité. « Demain est-ce qu'on va voter le budget? Bien sûr que non, on est dans l'opposition », a affirmé l'élu de la Vendée. De son côté, le député des Alpes-Maritimes Eric Ciotti a assuré que « personnellement », il voterait « contre ce budget car le budget est l'acte fondateur » d'une majorité. « Que cette majorité se débrouille, nous ne serons pas sa béquille », a-t-il ajouté, promettant que les élus LR exerceraient leur droit d'amendement « sans discussions, sans coopération, sans confusion » car « nous sommes dans l'opposition ». Au cours de l'été, l'exécutif avait pu compter notamment sur les voix des Républicains pour faire passer ses différents textes mais cette fois-ci la donne pourrait changer.

Superprofits, bouclier tarifaire, crise de l'énergie : les dossiers chauds de la rentrée

La rentrée parlementaire risque d'être particulièrement agitée. Entre les superprofits, le bouclier tarifaire et la crise de l'énergie, la présentation du budget prévu à la fin du mois de septembre va probablement donner lieu à des controverses enflammées. La semaine dernière, le ministre de l'Economie a suscité une vague de stupéfaction après ses propos sur les superprofits tenus devant le grand raout du Medef organisé à l'hippodrome de Longchamp.

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Du côté des ménages et des entreprises, le ministre des Comptes publics semble favorable au prolongement du bouclier tarifaire en 2023. Après avoir envisagé une possible suppression de ce dispositif pour des mesures plus ciblées, le gouvernement pourrait remettre sur la table ce sujet au menu des discussions parlementaires. D'après de récents calculs de Bercy ce dispositif a déjà coûté 24 milliards d'euros depuis 2021, soit environ un point de PIB. « Ce chiffrage a vocation à évoluer en fonction des prix de l'énergie et ne sera stable qu'une fois l'année terminée », souligne l'entourage du ministre de l'Economie.

En effet, l'enlisement du conflit en Ukraine et le prolongement de la crise énergétique risquent encore de pousser l'indice général des prix à des niveaux record. La plupart des économistes s'attendent à une inflation encore élevée dans les mois à venir. Une coupure totale du robinet du gaz russe en Europe provoquerait une onde de choc sur les marchés de l'énergie en plein coeur de l'hiver.

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Grégoire Normand
Commentaire 1
à écrit le 06/09/2022 à 9:02
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Un semblant de main tendue qui se transforme en durcissement de ton!! Qui devait débattre et faire des concessions?

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