Budget en 49.3 : le gouvernement droit dans ses bottes sur la politique de l'offre

Après des jours de bataille dans l'hémicycle, le gouvernement utilise l'article 49.3 pour faire passer son budget. Une loi de finances pour 2023 dans laquelle il maintient, contre vents et marrées, sa politique pro-business. Alors que le pays est traversé par un conflit social important, et que les questions de taxation des superprofits ont, ces derniers jours, animé les débats, y compris jusque dans sa majorité, l'exécutif tient à ne pas dévier de sa trajectoire.
Fanny Guinochet
Bruno Le Maire a pesé de tout son poids pour maintenir les dispositions pro entreprises dans le budget 2023

Il aura presque fallu un départ précipité du gouvernement du ministre de l'Economie, mais la politique pro-business, véritable ADN du gouvernement, est préservée dans le budget 2023. Ces derniers jours, Bruno Le Maire, le ministre de l'Economie, est allé jusqu'à mettre sa démission dans la balance, notamment si la mesure sur les superdividendes était maintenue dans le texte final. Proposé Jean-Paul Mattéi député Modem, allié de la macronie, l'amendement était passé la semaine dernière avec 19 voix de Renaissance. Un comble, pour le locataire de Bercy, qui ne veut pas entendre parler de nouvelles taxes ou de hausses d'impôts.

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Et tant pis, si sa posture n'est pas populaire, y compris au sein de la majorité. Alors que la France est en proie, depuis plus d'une vingtaine de jours, à un important conflit dans les raffineries, que les syndicats se font plus pressants sur les hausses de salaire, que la question du partage de la richesse entre les plus aisés et les plus modestes alimente tous les débats....pas question, pour Bruno Le Maire, de céder à la litanie anti-riches. Une « faute politique », assure toutefois, le numéro un de la CFDT Laurent Berger.

Bruno Le Maire n'aura rien cédé.

Celui qui il y a encore quelques jours assurait ne pas savoir « ce qu'est un superprofit » l'a donc emporté. Si dans le texte adopté, les grandes entreprises échappent à une super taxe, c'est bien parce que Bruno Le Maire a pesé de tout son poids.

Idem pour « l'exit tax ». Bien que votée la semaine dernière, l'amendement sur l'exil fiscal des entrepreneurs a aussi disparu de la mouture finale.

En revanche, a été maintenue, au grand dam des oppositions, la réduction tant attendue par les milieux patronaux, des impôts de production et la suppression progressive de la CVAE. Soit 4 milliards d'euros en moins dans les caisses des Finances Publiques, cette année. Parallèlement à sa politique de l'offre, Bercy maintient un soutien conséquent aux ménages, pour les aider à faire face à l'inflation. Il s'agit de limiter au maximum le franchissement de la consommation, premier moteur de notre croissance. Et ce, afin de préserver aussi la demande.

Volonté de stabilité fiscale

Pour Bruno Le Maire, en ces temps troublés, où les nuages s'amoncellent sur l'économie, rien ne compte plus que la constance. Si la France a réussi à faire chuter de deux points le taux de chômage depuis le début du premier quinquennat d'Emmanuel Macron, si le pays s'est hissé en tête des nations les plus attractives aux yeux des investisseurs étrangers, si l'inflation figure parmi les plus bas niveaux en Europe... c'est que la politique de l'offre est efficace.

Ne pas dévier de cette ligne est aussi la garantie de la crédibilité personnelle du ministre de l'Economie. Depuis plusieurs mois, pas un plateau ou une émission de télé où il n'explique qu'il n'augmentera pas les impôts mais au contraire les baissera.

Sur ce point, il a d'ailleurs su trouver un soutien d'importance, lors du débat parlementaire sur le PLF : Gabriel Attal. Le ministre des comptes publiques, arrivé il y a quelques mois seulement à Bercy, n'a eu de cesse de marteler, dans l'hémicycle, malgré les invectives, la nécessité de réduire encore les prélèvements des entreprises.

Un budget qui entend baisser les dépenses publiques

Face aux députés Renaissance, mardi soir, Elisabeth Borne s'était toutefois montrée plus mesurée. Elle avait assuré qu'il y avait eu « des propositions intéressantes pendant ce débat dont on tiendra compte dans le texte final ». Selon l'entourage de la Première ministre, elle faisait référence aux dispositions concernant les baisses d'impôts pour les toutes petites entreprises, ou l'élargissement des crédits d'impôts pour les particuliers. Le texte final devait aussi comporter la mesure portée par des communistes, sur le rétablissement de la demi-part des veuves d'anciens combattants, ou la baisse de la TVA à 5,5 % sur les masques portés par le PS.

Mais, retenir ces amendements promet d'alourdir encore la facture.  Garant des comptes publics, le ministre de l'Economie avait, de son côté, bien veillé à ne pas susciter trop d'espoirs : « ce sera sans moi si le texte final devait trop faire déraper les finances publiques », a-t-il lancé en début de semaine.

Aussi, le PLF devait-il rétablir l'article liminaire, rejeté d'emblée, sur la prévision de déficit public à 5 % du PIB. Les députés, dont les Républicains, avaient repoussé par 192 voix contre 175 cet article, créant la colère des locataires de Bercy. Gabriel Attal avait alors accusé les oppositions de priver la France de tout cap. Et lancé : « Nous prendrons nos responsabilités pour ne pas priver la France d'un budget ».

Faute d'avoir une majorité, l'exécutif n'aura donc pas eu d'autres recours que d'en passer par le 49.3. Non sans douleur.



Fanny Guinochet
Commentaires 3
à écrit le 19/10/2022 à 23:48
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Le 49-3 est, sans doute constitutionnel, mais il montre que notre pays n'est toujours pas une démocratie mûre; sans doute faudrait-il prévoir une pénalité financière à nos pouvoirs Exécutif et Législatif, à défaut de les enfermer sans manger ni boire...

à écrit le 19/10/2022 à 23:05
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Les élections servent à rien .. le seul pouvoir du citoyen français c est la conso .. arrêtons de consommer ou au strict minimum pendant 3 mois et on verra si ce gouvernement comme les autres étiquettes politiques nupes / Rn .. pourront continuer à ...

à écrit le 19/10/2022 à 17:39
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Le Maire II, demande à Jeannot, il va bien de trouver une place à la RATP.

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