Avec 973 malades du Covid-19 soignés dans l'un des services de réanimation de la région Ile-de-France, pour « moins de 1.050 lits » disponibles, « on est dans une situation de tension très forte », a déclaré le directeur général de l'Agence régionale de Santé (ARS), Aurélien Rousseau.
« Le flux reste fort », avec « 70 à 80 entrées par jour en réanimation » mais moins de sorties, et un solde en hausse de « 35 patients par jour en fin de semaine dernière », résultat de « la très forte hausse de l'incidence il y a 15 jours », a-t-il expliqué.
A ce rythme, le palier de 1.127 lits disponibles précédemment fixé - et pas atteint à ce jour - devrait être dépassé cette semaine.
Conséquence, l'ARS d'Ile-de-France a donné « l'ordre ferme » aux hôpitaux et cliniques de déprogrammer 40% de leurs activités médicales et chirurgicales les moins urgentes pour augmenter les capacités, avec une cible désormais fixée à 1.577 lits de réa.
« La situation est très préoccupante avec un variant anglais » du coronavirus, plus contagieux, « qui a pris le dessus et se propage beaucoup plus rapidement », a alerté sur France Inter la maire de Paris Anne Hidalgo, qui s'était dite défavorable la semaine dernière, comme la présidente de la région Ile-de-France Valérie Pécresse, à un confinement le week-end sur son territoire.
Au final, l'exécutif a limité cette mesure au Pas-de-Calais, après le littoral des Alpes-Maritimes et l'agglomération de Dunkerque. « La charge sanitaire hospitalière n'est pas la même dans la région Hauts-de-France et en Ile-de-France », justifiait vendredi le ministre de la Santé, Olivier Véran, en mettant aussi en avant la nécessité de prendre des mesures à l'échelle de la région parisienne et pas seulement pour quelques départements.
« Il y aura un réexamen de la situation sur l'ensemble du territoire, et notamment l'Ile-de-France, lors du conseil de défense sanitaire » prévu mercredi, a indiqué à l'AFP le ministère de la Santé.
Transferts de patients
Le taux d'incidence est repassé sous les 400 nouveaux cas de Covid-19 pour 100.000 habitants sur sept jours dans le Pas-de-Calais, avant même son premier week-end confiné. Il grimpe désormais à 425 en Seine-Saint-Denis, 400 dans le Val-de-Marne et dépasse les 300 dans le Val-d'Oise, la Seine-et-Marne, Paris et l'Essonne, au-dessus du seuil d'alerte maximale fixé à 250 par le gouvernement.
Au niveau national, le nombre de patients soignés dans les services de réanimation ne cesse de progresser, à 3.743 dans toute la France, contre 4.900 au pic de la seconde vague et 7.000 lors de la première. Avec une charge très élevée dans les Hauts-de-France, en Provence Alpes-Côte d'Azur et en Ile-de-France, qui oblige à transférer de nouveaux patients vers d'autres régions.
Ainsi, le CHU de Limoges a accueilli trois malades venant des Hauts-de-France lundi et quatre autres patients, toujours des Hauts-de-France, sont attendus mardi et mercredi au CHU de Poitiers, a indiqué l'Agence régionale de santé (ARS) de Nouvelle-Aquitaine.
Dans ce contexte, les autorités sanitaires sont appelées à maintenir la cadence de la campagne de vaccination, pour l'instant réservée notamment aux Ehpad, aux plus de 75 ans, aux plus de 50 ans les plus fragiles et aux professionnels de santé.
« Il y a eu plus de 250.000 injections vendredi (et 200.000 samedi: ndlr). Notre but est de maintenir ce niveau dans les jours qui viennent, voire de le dépasser. Il y a plus de doses, plus de personnes pour vacciner et une clarification des publics », soutient-on au ministère de la Santé. Au total, 3,7 millions de Français ont reçu au moins une dose de vaccin (soit environ 5,6% de la population), dont 1,9 million ont été vaccinés avec deux doses.
Oui à Sephora, non au musée
Le « destockage de doses » (12.000 à Paris ce week-end), « c'est très bien, mais ça ne peut pas être simplement pour un week-end », a prévenu Anne Hidalgo, en déplorant des « annonces (...) cette semaine sur Paris (qui) reviennent très très en arrière », avec « 10.000 doses pour la semaine, c'est très très insuffisant ».
À compter de lundi, les pharmaciens vont pouvoir passer commande pour vacciner à leur tour. Mais pas les médecins généralistes, « compte tenu du nombre de doses livrées par AstraZeneca », explique une note de la direction générale de la Santé parue dimanche.
De quoi rendre furieux le syndicat des médecins libéraux (SML) : « Pour céder au caprice des pharmaciens, la direction générale de la santé décide que les médecins ne pourront pas vacciner la semaine prochaine alors que tous les rendez-vous sont déjà pris », déplore le syndicat. Un message "inacceptable", s'est aussi insurgé, sur Twitter, l'Ordre des médecins.
De son côté, Gabriel Attal a mis en garde les professionnels de santé, dont les réticences de certains à se faire vacciner font polémique. « Nos soignants ont été héroïques », mais « il y aurait une irresponsabilité à refuser de se faire vacciner quand on est soignant », lance-t-il, en n'excluant pas de rendre les piqûres obligatoires, même si « on fait d'abord le choix de la confiance ».
Il est aussi resté évasif sur des dates de réouverture des restaurants ou des musées, fermés depuis plus de quatre mois. « J'avoue avoir du mal à expliquer qu'on puisse aller dans un Sephora mais pas dans un musée », concède-t-il, tout en ajoutant qu' « il y a nécessairement, dans la gestion d'une telle épidémie, une part d'incohérence quand il faut limiter les interactions et les flux de personnes ».