Ecologie : après le grand débat, le grand flou

L’absence de toute mesure concrète dans l’allocution d’Emmanuel Macron jeudi soir plonge les observateurs dans un grand doute quant à sa volonté réelle de conduire une transition écologique à la hauteur des enjeux sur le front du climat et de la biodiversité.
Dominique Pialot
La hausse de la taxe carbone n'a pas été évoquée une seule fois par Emmanuel Macron dans son allocution de sortie du Grand débat.
La hausse de la taxe carbone n'a pas été évoquée une seule fois par Emmanuel Macron dans son allocution de sortie du Grand débat. (Crédits : Max Rossi)

"Ce qui a fuité dans les médias laisse craindre que l'exécutif se contente d'acheter la paix sociale (...) mais sans engager le début d'une politique de transition écologique et solidaire". Ainsi s'exprimait l'ancien ministre de la transition écologique Nicolas Hulot la semaine dernière dans un entretien à Libération...Force est de constater qu'on ne trouve pas grand-chose dans la conférence de presse du président jeudi soir pour faire mentir cette prédiction.

C'est pourtant le sujet qui avait mis le feu aux poudres en décembre dernier, sur lequel le gouvernement avait déclaré un moratoire et qui a donné lieu depuis le début de l'année à de multiples publications d'économistes et think tank de tous poils : de la reprise (ou pas) de la hausse de la taxe carbone et, donc, des prix des carburants, il n'en aura été nullement question. Pas plus que de quelque autre mesure concrète en lien avec la transition écologique.

Pourtant, « L'état d'urgence climatique il est là, notre jeunesse nous le dit à chaque instant et nos concitoyens veulent agir », a reconnu Emmanuel Macron,

ajoutant : « il y a une conscience citoyenne sur ces sujets qui s'est profondément transformée ces dernières années et qui va beaucoup plus vite que nombre de politiques publiques ».

Changement de méthode et intelligence collective

Evoquant les prochaines lois sur l'énergie et le climat et sur l'économie circulaire, Emmanuel Macron s'est également réjoui que beaucoup ait été fait ces deux dernières années. Un avis fort peu partagé, qu'il s'agisse des ambitions avortées de la loi Agriculture et alimentation, des décisions en matière de transition énergétique, de l'interdiction reportée du glyphosate...pour ne citer que ces exemples.

« Je veux qu'on puisse changer plus fortement de méthode pour répondre plus concrètement et de manière plus radicale aux attentes », a-t-il annoncé.

Ce changement de méthode, conçu pour « utiliser davantage l'intelligence collective », repose en l'occurrence sur la création de deux nouvelles instances : une convention citoyenne et un Conseil de défense écologique. La première, composée de 150 citoyens tirés au sort, sera rattachée au Conseil environnemental, économique et social (CESE) avant sa réforme annoncée, et devra dès le mois de juin « redessiner toutes les mesures concrètes d'aides aux citoyens sur la transition climatique dans le domaine des transports, de la rénovation des logements pour les rendre plus efficaces », définir, si besoin était, d'autres mesures incitatives ou contraignantes et le cas échéant définir des ressources supplémentaires et proposer des financements pour se faire. Autrement dit, ces 150 Français tirés au sort devront à nouveau se pencher sur ces thèmes déjà largement débattus au cours du Grand débat.

« Ce qui sortira de cette convention, je m'y engage, sera soumis sans filtre soit au vote du parlement soit à référendum, soit à application réglementaire directe », a promis le président.

L'écologie érigée au niveau de la défense ?

Quant au Conseil de défense écologique, conçu sur le modèle du conseil de défense militaire et soufflé par Nicolas Hulot, il réunira le Premier ministre, les principaux ministres chargés de cette transition, les grands opérateurs de l'Etat, et sera régulièrement présidé par Emmanuel Macron en personne, « pour à la fois prendre les choix stratégiques et mettre au cœur de toutes nos politiques cette urgence climatique et m'assurer du suivi dans tous les changements ministériels lorsqu'une orientation est prise. »

Ces nouveaux comités - aussitôt qualifiés de Théodule par leurs détracteurs - s'ajoutent de fait à plusieurs structures existantes : le CNTE (Conseil National de la Transition Ecologique (CNTE), instance multi-acteurs de dialogue environnemental issue du Grenelle de l'environnement (2007) qui a instauré ce dialogue à 5 collèges de représentants de la société civile et, depuis plus récemment, des parlementaires ; le Haut Conseil pour le Climat (HCC), annoncé en 2018, est en cours de constitution et regroupe 10 experts indépendants chargés d'évaluer l'action climat, notamment la cohérence des politiques publiques.

Occasion manquée

Si certains, notamment l'ancien directeur général du WWF aujourd'hui candidat aux élections européennes sur la liste de la majorité, ou encore le patron de l'Ademe Arnaud Leroy ont salué la création de ces instances, la majorité des réactions ont été plutôt froides du côté des ONG de l'environnement. "Des 'orientations', mais pas de vraies décisions", a réagi sur Twitter l'ONG Greenpeace, dénonçant la création d'un "énième comité Théodule".

Le WWF France s'est également avoué "très déçu", regrettant que "Le président n'a pas saisi l'opportunité qui se présentait à lui pour répondre à cette urgence".

L'absence de toute référence à la biodiversité, alors même que l'IPBES (plateforme intergouvernementale sur la biodiversité) doit publier le 6 mai un rapport alarmant sur le sujet, n'est pas passée inaperçue. Quant à Matthieu Orphelin, ancien député LREM qui a justement claqué la porte du parti en février devant l'absence de toute réelle avancée sur le front de l'écologie, qui n'avait pas ménagé sa peine ces derniers jours en multipliant les déclarations destinées à inciter le gouvernement a revoir sa copie sur le sujet par rapport à la première version du discours qui avait fuité, il a regretté une "occasion manquée" et s'est également déclaré "Très déçu par l'absence de nouvelles mesures concrètes".

C'est sur le sujet de la transition et du climat que le président a fait le plus explicitement référence à l'Europe, s'engageant notamment à défendre au niveau européen « un prix minimum du carbone, une taxe carbone aux frontières et une finance verte plus ambitieuse. »

Dominique Pialot
Commentaires 17
à écrit le 28/04/2019 à 14:33
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Sur les 50 Milliards/An !!!!! de TAXES CARBUR, qu'il prenne autant de papier Carbone qu'il veut, ON S EN FOUT, mais plus de Taxe Hulot (annulée) lequel possède 6 voitures THERMIQUES. (" faites ce que je dis pas ce que je fais " ) Puisque RIEN !...

à écrit le 28/04/2019 à 14:33
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Sur les 50 Milliards/An !!!!! de TAXES CARBUR, qu'il prenne autant de papier Carbone qu'il veut, ON S EN FOUT, mais plus de Taxe Hulot (annulée) lequel possède 6 voitures (" faites ce que je dis pas ce que je fais " ) Puisque RIEN ! n'est affec...

à écrit le 28/04/2019 à 8:04
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les "observateurs " ont des doutes !?!....après DEUX ans ? Ils devraient changer d 'activité !

à écrit le 27/04/2019 à 16:40
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Quand on voit les âneries de type Taxe carbone (destinée à financer le CICE ! ) ou de vignette Critair (relégation ex urbi des plus pauvres), on ne peut que se satisfaire de la fin de la politique écologique de ce gouvernement...

à écrit le 27/04/2019 à 16:08
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De punitive, l'écologie devient génocidaire.

à écrit le 27/04/2019 à 8:57
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Cela prouve bien qu'au début de son mandat il n'envisageait l'écologie seulement comme un énième moyen de faire payer une nouvelle fois tout le monde pour la pollution générée par les propriétaires de capitaux et d'outils de production. On voit b...

à écrit le 27/04/2019 à 8:35
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Macron est le valet des grandes entreprises du CAC 40, comme Vinci par exemple qui déverse son béton usé dans la Seine. Il ne fallait pas attendre grand chose d'autre de lui que des belles paroles. Pour ma part la prochaine fois qu'il aura besoin de ...

à écrit le 26/04/2019 à 23:53
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De punitive, l'écologie devient génocidaire.

à écrit le 26/04/2019 à 20:44
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Désolée, mais je crois qu'il ne reste plus qu'à se prendre en main, a user de la désobéissance civile et à agir fermement !

le 27/04/2019 à 8:48
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Chacun ses opinions, par contre l’opinion change avec l’histoire et les expériences. Vous avez le droit de manifester mais moi je n’ai pas les moyens de payer plus à cause des casseurs et des gens qui ne savent pas «  communiquer «  de manière saine...

le 28/04/2019 à 10:54
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A citoyen ordinaire. Quelle belle abnegation. Un jour vous realiserez que le politique est un menteur patente. Il sera alors trop tard pour vous et rattraper vos espoirs perdus. Tout comme vos illusions. La vie, est une scene de boxe. L' ignorez...

le 30/04/2019 à 8:30
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@ matin calme, Bonjour, Certes, J’ai choisi la résilience, la vie est ce qu’elle est : un passage. Chacun est responsable de ses actes , je ne veux pas être responsables d’actes programmés par x y ou z. Dans tous les mouvements il y a des influence...

à écrit le 26/04/2019 à 20:14
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Lorsqu'il existera des solutions alternatives viables et économiquement compétitives notamment pour la mobilité (inutile de s'attarder sur la production de l'électricité, grâce au nucléaire en France elle est quasi décarbonée à 100%), la transition é...

le 27/04/2019 à 15:36
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La politique publique "écologique" est catastrophique car elle s'oppose à l'économie et l'étouffe : plus de réglementation, plus de taxe. Le principal bénéficiaire immédiat est l'Etat. Mais les faits sont là : la terre se réchauffe et la production d...

le 28/04/2019 à 11:48
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@ boule Votre raisonnement se tient. A condition d’être certain que le CO2 est vraiment l’accélérateur principal du réchauffement : C’est la thèse du GIEC, source unique de l’alarmisme et grâce à qui L’argument CO2 unique responsable du réchauff...

à écrit le 26/04/2019 à 18:44
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Tout le bilan n’est pas négatif, des structures pour l’écologie vont voir le jour alors que ce sujet à l’époque des politiques ordinaires était un sujet «  de rigolade « ( les verts...) L’écologie est devenu un sujet au- deja des parties politiques c...

le 26/04/2019 à 20:48
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Je pense que vous n'avez pas compris grand chose ! Vous dites : "Vous croyez qu’en trois ans c’est facile d’effacer les bavures économiques laissées par les anciens gouvernements ?" ... Mais il n'efface strictement rien, bien au contraire, il marche ...

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