Finances publiques : la Cour des comptes adresse un carton rouge au gouvernement

La Cour des comptes a exhorté jeudi le gouvernement à engager un « redressement résolu » des finances publiques mises à mal par la crise énergétique, étrillant une trajectoire « peu ambitieuse » de réduction de la dette qui risque au contraire de se creuser. Le gouvernement oppose la refonte de l'assurance chômage et son projet de réforme des retraites, ainsi que désormais le ciblage accru des soutiens sur les plus modestes.
Grégoire Normand
La Cour des comptes pointe des recettes fiscales amenées à être moins dynamiques en 2023 alors que la dépense publique continue de croître.
La Cour des comptes pointe des recettes fiscales amenées à être moins dynamiques en 2023 alors que la dépense publique continue de croître. (Crédits : Reuters)

[Article publié le vendredi 10 mars 2023 à 8:0, mis à jour à 15:52]

La Cour des comptes a lancé un avertissement sévère à l'exécutif. En pleine réforme des retraites, les magistrats ont dressé un tableau jugé préoccupant sur la situation des finances publiques en France. Dans son rapport public annuel dévoilé ce vendredi 10 mars, le président de l'institution Pierre Moscovici a tiré à boulets rouges sur la politique budgétaire de l'exécutif. « Le redressement des finances publiques doit être une priorité nationale. Cela doit passer par un renforcement de la qualité de nos dépenses publiques », a-t-il déclaré lors d'un point presse.

Après plusieurs années de dépenses pour protéger les ménages et les entreprises face aux conséquences désastreuses de la crise sanitaire, les magistrats estiment qu'il faut sortir du « quoi qu'il en coûte ».

Ce message de discipline budgétaire adressé depuis le mois de janvier au gouvernement intervient dans un contexte économique et social hautement inflammable. L'indice des prix à la consommation propulsé par les prix de l'alimentation est loin d'être retombé en février, à 6,2% contre 6% en janvier. La croissance du produit intérieur brut (PIB) peine à rebondir en début d'année. La Banque de France table désormais sur un maigre 0,1% de croissance au premier trimestre selon sa dernière enquête mensuelle de conjoncture dévoilée cette semaine. Au Parlement, le gouvernement espère faire voter sa réforme décriée des retraites ce week-end par le Sénat dominé par la droite. Pressé par les syndicats, Emmanuel Macron a pour l'instant refusé de les recevoir à l'Elysée et attend le vote de la réforme pour s'exprimer.

Malgré le débranchement des mesures d'urgence, des déficits élevés en 2022 et 2023

Après deux années de pandémie, le gouvernement avait annoncé un débranchement progressif des mesures d'urgence (fonds de solidarité, chômage partiel, PGE) mis en œuvre au printemps 2020. Mais l'éclatement du conflit en Ukraine en février 2022 a changé la donne. L'exécutif a dû déployer de nombreux dispositifs pour tenter d'amortir le choc sur les ménages et les entreprises (bouclier tarifaire, ristourne sur le carburant, chèque alimentaire, chèque énergie).

Résultat, le déficit public rapporté au produit intérieur brut devrait rester élevé à 5% en 2022 et 2023 après avoir plongé à 6,5% en 2021. « Une trajectoire de retour du déficit sous 3% en 2027 est optimiste », a averti Pierre Moscovici. De son côté, la dette publique devrait atteindre 111,4% du PIB en 2023, « soit près de 14 points au dessus de son niveau d'avant crise », précisent les magistrats.

Finances publiques : la France, mauvaise élève de la zone euro

A l'échelle de l'Union monétaire, l'Hexagone fait figure de mauvaise élève en matière de finances publiques. « La situation des finances publiques de la France restera ainsi en 2023 parmi les plus dégradées de la zone euro, alors que la Commission européenne juge que les risques sont élevés sur la soutenabilité de la dette publique française à moyen terme », soulignent les fonctionnaires. Ils pointent la divergence entre les groupes de pays qui est un facteur de risque.

Ils estiment également une convergence nécessaire au moment où la Banque centrale européenne (BCE) durcit sa politique monétaire. Depuis l'été 2022, les banquiers centraux ont décidé de serrer la vis monétaire en relevant les taux et en mettant fin au programme d'assouplissement monétaire (Quantitative easing ou rachat d'actifs). En zone euro, l'indice général des prix a commencé à marquer le pas en moyenne mais il existe de fortes disparités entre pays rendant la tâche de la BCE encore plus complexe.

Lire aussiBCE: la hausse des taux continue de peser sur les crédits accordés au secteur privé

La réduction des déficits doit passer par la croissance selon Pierre Moscovici

Lors de son intervention, le premier président de la Cour des comptes a évoqué plusieurs pistes pour réduire le déficit public tricolore. Sans surprise, il a d'abord préconisé un retour de l'activité économique. « Il faut muscler la croissance », a-t-il insisté. Au regard du fort ralentissement de l'activité en fin d'année 2022 et au premier trimestre 2023, il juge les prévisions du gouvernement « optimistes » pour 2023 (1%).

Le rapport souligne d'ailleurs que ce chiffre est bien supérieur aux prévisions du consensus des économistes qui table désormais sur une croissance de 0,4% cette année. De même que l'inflation projetée par le gouvernement (4,2% en 2023) est également plus favorable que le consensus des économistes (4,8% en 2023).

Sortie du « quoi qu'il en coûte » par une maîtrise des dépenses

Enfin, l'autre principale préconisation avancée par Pierre Moscovici doit passer par le levier de la dépense publique. « Il faut maîtriser la dépense par une sortie du 'quoi qu'il en coûte' », a-t-il affirmé. De son côté, le ministre de l'Économie Bruno Le Maire a annoncé une revue annuelle des dépenses publiques lors de ses vœux en janvier. Ce qui a été salué par Pierre Moscovici.

En revanche, le premier magistrat de la Cour n'a pas été précis sur les conséquences budgétaires de la réforme des retraites et de l'assurance-chômage. Interrogé par La Tribune, il a renvoyé la balle à un autre représentant de la Cour. Dans sa réponse aux rapporteurs, le gouvernement a mis en avant la réforme de l'assurance-chômage et celle des retraites actuellement en débat au Sénat.

Lire aussiRéforme des retraites : coup de théâtre au Sénat, le gouvernement passe par un vote bloqué

Grégoire Normand
Commentaires 16
à écrit le 12/03/2023 à 12:39
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Commençons par les sénateurs Mr Retailleau a voté la réforme des retraites qui va impacter le plus les travailleurs qui se lèvent tôt habitent loin de leur lieu de travail etc …non par choix mais par prix. Mr Retailleau est le chantre de l exemp...

à écrit le 12/03/2023 à 11:42
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MACRON se moque éperdument de la Cour des Comptes et de ses remarques, recommandations ou alertes, et ça depuis 2017. Il creuse les déficits dans tous les secteurs économiques sans que cela soit profitable puisque tous les fondamentaux sont en déshér...

à écrit le 11/03/2023 à 16:23
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Dans les années 80, l association "Contribuables associés" a voulu passer une annonce payée dans le Monde avec la photo d'un bébé et la légende "il né avec 10 000 FRANCS de dette" pour alerter la population. L annonce a été refusé par "Le Monde" qui...

à écrit le 11/03/2023 à 14:55
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La Cour des comptes aurait pu servir à quelque chose à la fin des années 70 après : "La France vit au dessus de ses moyens !" de Raymond barre. Elle aurait dû être ferme avec les énarques en leurs expliquant qu'il n'y avait pas de "dette heureuse". ...

à écrit le 11/03/2023 à 12:25
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Depuis les années 80 les gouvernements successifs de gauche comme de droite ont acheté la paix sociale en distribuant de l'argent qui n'était pas dans les caisses .Début 80 le déficit budgétaire était de 20% aujourd'hui de 110% . Toutes les classes...

à écrit le 11/03/2023 à 8:10
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Depuis mitterand chacun creuse le deficit en promettant que les comptes sont redresses 2 ans apres qu'il ne soit plus au pouvoir, exception faite de 85 87 Le champion c'est Hollande avec un plan 2050 tout en creusant deficit immédiat comme jamais

à écrit le 11/03/2023 à 7:38
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Un hôtelier-restaurateur de ma Région, qui travaillait en famille, a vendu son établissement tout de suite après la fin du " quoi qu'il en coûte " . Aujourd’hui, qu'il a eu la main heureuse et il dit " Banco . ". Avec la crise de l'énergie, c'est l...

à écrit le 11/03/2023 à 6:59
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CARTON ROUGE donné par un ancien ministre de l’économie et des finances qui n’avait pas brillé sur ce sujet

à écrit le 10/03/2023 à 23:44
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Bla,bla,bla. Juste des mots, du vent. Le reveil sera difficile.

le 11/03/2023 à 8:34
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Bonjour, Mr macron N'a rien fait pour reduire la dette , ils a même favoriser selle ci .... A par spolier les francais de leur droits, ils n'a rien fait ... Reforme de l'assurance chômage. Reforme des retraites.. Prix scandaleux de l'électr...

à écrit le 10/03/2023 à 18:11
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Un autre rapport de la cour des comptes sur la décentralisation donne ce chiffre ahurissant de création de 700 000 NOUVEAUX fonctionnaires en 40 ans dans les communes Françaises. Voilà ou passe nos impôts fonciers et autres taxes.

le 10/03/2023 à 19:57
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Le soucis n'est pas l'argent local dépens en plus, mais celui de l'état qui l'est toujours. L'état a renvoyé la bal des dépense aux localité avec les policiers municipaux ou ils voulaient plus de nationaux, l'état ainsi à économise en supprimer une m...

à écrit le 10/03/2023 à 15:01
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Un rapport alarmant aurait deja du etre dressé depuis longtemps MAIS Mr MOSCOVICI a été nommé son ami Macron !!!!!!!! !le probleme est le meme avec MME LAGARDE !!!!! les nominations devraient etre faite de façon PLUS DEMOCRATIQUE

le 10/03/2023 à 18:02
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C'est curieux. Vous semblez être le seul Français qui ignore que la France a une dette abyssale de 3000 MILLIARDS d'Euros. Cela fait pourtant 50 ans que nous vivons au-dessus de nos moyens. Le budget de l'état est déficitaire tous les ans de 100 Mill...

à écrit le 10/03/2023 à 14:18
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Il ne manque pas de toupet l'ancien ministre des Finances de la Présidence d'Hollande qui ne fût pas caractérisée par une gestion très rigoureuse des deniers publics. Mais il est vrai que la mémoire sélective est un des attributs de l'homme politiqu...

à écrit le 10/03/2023 à 13:13
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Le rapport de la Cour des Comptes ne devrait-il pas être adressé aux électeurs plutôt qu'au Président de la République lors d'une Grand-Messe ridicule dont nous avons le secret? En dehors du fait que notre Gouvernement et notre Parlement n'en feront ...

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