[Article publié le lundi 24 avril 2023 et mis à jour 12h02] Le bras de fer entre les médecins libéraux et l'exécutif sur la revalorisation des tarifs de consultation va-t-il toucher à sa fin ? Deux mois après l'échec de leurs négociations avec l'Assurance maladie, les syndicats avaient rendez-vous avec la haute fonctionnaire désignée pour « arbitrer » le dossier, ce lundi.
Les consultations médicales vont augmenter de 1,50 euro à l'automne prochain, atteignant 26,50 euros chez les généralistes. Le tarif s'élèvera désormais à 31,50 euros chez les spécialistes, selon le « règlement arbitral ». Ces revalorisations, qui doivent encore être approuvées par le ministre de la Santé, François Braun, entreront ensuite en vigueur « à l'expiration d'un délai de six mois », soit au plus tôt fin octobre, selon ce document dont l'AFP a obtenu copie. En revanche, « aucune revalorisation subordonnée à un engagement territorial » n'a été retenue.
Le ministre de la Santé, François Braun, a aussitôt fait savoir dans un communiqué qu'il « approuvera dans les jours qui viennent » ce texte comportant « des avancées importantes pour l'amélioration de la santé des Français ». La hausse de 5% à 6% des tarifs de base devrait donc intervenir effectivement fin octobre ou début novembre.
Plusieurs mesures de l'exécutif reprises
L'ancienne inspectrice des affaires sociales a par ailleurs repêché plusieurs mesures chères à l'exécutif. Pour « dégager du temps médical », l'aide financière au recrutement d'assistants médicaux sera ainsi « élargie et assouplie ». Emmanuel Macron a fixé un objectif de 10.000 postes fin 2024, contre un peu plus de 4.300 à ce jour.
Contrairement aux hausses de tarifs, cette décision s'appliquera sans délai, tout comme la création d'une nouvelle consultation à 60 euros pour l'acceptation d'un malade chronique sans médecin traitant. Là aussi, le chef de l'Etat a promis que les 700.000 personnes dans cette situation se verraient « proposer un médecin traitant avant la fin de l'année ».
Pas de délai non plus pour la « réponse aux soins urgents et non programmés ». L'arbitre a choisi de « pérenniser » les incitations destinées aux libéraux qui participent à la « régulation » téléphonique des Samu (100 euros de l'heure) et à recevoir des patients sous 48 heures (majoration de 15 euros). Deux point-clés de la « mission flash » que François Braun a mis en œuvre dès son arrivée à l'été 2022.
L'ancienne inspectrice des affaires sociales, Annick Morel, a rendu son verdict à 11 heures aux six syndicats représentatifs, dont plusieurs responsables ont annoncé cette rencontre, par voie de communiqué ou via les réseaux sociaux. L'issue de cette réunion était particulièrement attendue. Fin février, les syndicats de médecins libéraux avaient décliné la proposition de l'Assurance maladie, malgré une enveloppe de 1,5 milliard d'euros par an, à terme, pour revaloriser les consultations.
Les médecins libéraux opposés au « contrat d'engagement territorial »
Les médecins avaient alors dit non à une augmentation générale, sans condition, de 1,50 euro, retenue par Annick Morel ce lundi. C'était, en effet, trop peu pour certains syndicats. Ces derniers réclamaient un minimum de 30 euros. S'ils en veulent plus, ils devront se remettre à table, assume l'arbitre, qui a voulu « ménager une transition vers une reprise rapide des négociations », suivant le précepte qu'« une convention négociée vaut mieux qu'un règlement administré ».
Les syndicats s'étaient aussi arc-boutés contre le « contrat d'engagement territorial » ouvrant ce deuxième niveau de prix aux praticiens acceptant certaines contreparties : prendre plus de patients, faire des gardes de nuit, exercer dans un désert médical, travailler le samedi matin...
« Répondre aux besoins de santé des Français »
Selon le ministère, plus de 40% des médecins cochent déjà ces cases et auraient pu ainsi gagner en moyenne 20.000 euros de plus par an sans travailler davantage. « On demandait un effort aux autres parce qu'il faut répondre aux besoins de santé des Français », avait justifié l'entourage du ministre fin février, pour qui « la revalorisation sans condition n'était pas une option », surtout au vu des « sommes colossales » en jeu.
L'absence d'accord avait aussi fait tomber d'autres mesures en faveur des assistants médicaux, des « soins non programmés » (sans rendez-vous) et des médecins traitants, priorités affichées du gouvernement. L'exécutif entendait a priori se montrer, dans l'ensemble, moins généreux que la Sécu. Objectif affiché, pousser les médecins à reprendre les discussions. « On a tous intérêt à ce que le fait de signer change quelque chose », expliquait l'entourage du ministre fin février, après l'échec des négociations.
Le ministre de la Santé avait déploré une absence de « responsabilité ». « On passe à côté d'une occasion d'améliorer la prise en charge de nos concitoyens », avait-il estimé, jugeant que « les syndicats de médecins ne sont pas responsables ».
(Avec AFP)