« Le Made in France est une condition nécessaire » pour évaluer les patrons du CAC 40 (VcomV)

Réalisée auprès de 180 journalistes par l'agence VcomV, l'étude sur les entreprises et les dirigeants du CAC 40) place Bernard Arnault (LVMH) à la tête du classement, devant Guillaume Faury (Airbus), Luca de Meo (Renault), Axel Dumas (Hermès) et Benoit Bazin (Saint-Gobain). Pour Vincent de la Vaissière, le président de l'agence VcomV, ce top 5 traduit la place grandissante du « Made in France » dans les considérations des sondés. Les journalistes devaient se prononcer sur trois points : l'incarnation interne et externe de l’entreprise, la vision stratégique et la capacité à délivrer et la gestion des crises. Entretien.
Fabrice Gliszczynski
Bernard Arnault,

LA TRIBUNE- Dans votre étude sur les groupes et les dirigeants du CAC40, Bernard Arnault arrive à la première place du classement, suivi de Guillaume Faury, Luca de Meo, Axel Dumas et Benoit Bazin. Quels enseignements tirez-vous de ce classement ?

VINCENT DE LA VAISSIERE- Premier enseignement : en France, nous n'avons pas de pétrole mais, pour reprendre les cinq premiers de l'étude, nous avons du Luxe (LVMH et Hermès), des fleurons industriels (Airbus, Renault et Saint-Gobain) et des idées. Nous avons la chance insigne d'avoir deux « leaders » mondiaux : LVMH et Airbus, deux « leaders » que le monde entier nous envie.

Deuxième enseignement : le savoir-faire dans la gestion des crises est un critère déterminant. Les crises glissent sur LVMH qui n'a de dépendance à rien : ni à une matière première, ni même à une géographie. Les résultats montent jusqu'au ciel et Bernard Arnault ne doit son succès qu'à lui-même et au génie créatif de ses 80 maisons. Luca de Meo, c'est le dirigeant qui a essuyé le plus de crises en 2022 : crise industrielle avec Renault qui a frôlé la faillite, crise actionnariale avec Nissan et crise géopolitique à cause de la Russie. Il a su gérer tout cela avec beaucoup de sang-froid et en homme providentiel car c'est lui qui a sauvé Renault. Quant à Guillaume Faury, il a fait de la dentelle au moment du Covid en ajustant, à la baisse comme à la hausse, les cadences de production tout en prenant le plus grand soin de sa filière et de l'ensemble de ses sous-traitants.

Troisième enseignement : le thème de la souveraineté est revenu très fort et il oblige les dirigeants à jouer plus que jamais la carte du « Made in France » à cause de la Chine et de la Russie mais aussi en raison de la désindustrialisation française qui a été très profonde. De ce point de vue-là, Axel Dumas, chez Hermès, est très bien placé tant son entreprise honore la France et ses métiers d'art : 80 % des produits Hermès sont fabriqués en France, qui dit mieux ? Quant à Luca de Meo, son Renault à lui, c'est le Renault de l'Électrique à Douai et à Maubeuge et c'est tant mieux car quand on réindustrialise, c'est la colère sociale qui faiblit.

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Vncent de la Vaissière

Le « Made in France » est-il le principal facteur, sachant que, parmi ces cinq patrons, au moins deux d'entre eux, Guillaume Faury et Benoit Bazin, dirigent des entreprises produisant fortement à l'étranger, alors que tous ont dégagé des performances financières excellentes ? Autrement dit, les journalistes ne votent-ils pas en priorité pour la réussite économique des dirigeants ?

Vous avez raison : le « Made in France » est une condition nécessaire mais évidemment non suffisante. Guillaume Faury, c'est le patron le plus européen du CAC 40, Airbus oblige, c'est aussi le dirigeant qui, pendant le Covid, au niveau mondial, a creusé l'écart avec Boeing ; quant à Benoit Bazin, c'est l'un des patrons français les plus américains du CAC 40. Il y a fait une partie de ses études et ses débuts chez Saint-Gobain, les États-Unis étant la zone de plus forte croissance du groupe. C'est aussi là-bas que l'entreprise a réalisé récemment les plus grosses de ses acquisitions. Ce qui mérite d'être souligné, c'est la régionalisation de l'organisation de Saint-Gobain avec une plus grande responsabilisation donnée aux patrons-pays afin de donner une meilleure agilité à l'ensemble du groupe. Benoit Bazin, c'est le coup de cœur de l'étude, celui qui a été considéré par l'ensemble des 185 journalistes interrogés comme étant le meilleur représentant de cette génération de quinquas qui a pris le pouvoir depuis 2021.

Quelles sont les plus grosses baisses dans votre classement, et comment les expliquez-vous ?

Les plus grosses baisses concernent Carlos Tavares (Stellantis) et Patrick Pouyanné (TotalEnergies) pour une raison très simple : les critères purement économiques et financiers ne suffisent plus ; il convient d'y ajouter des critères extra-financiers (empreinte industrielle française, gestion des crises, relation avec le corps social de l'entreprise, rapport avec ses sous-traitants, gouvernance de l'entreprise etc...) et c'est là que le bât blesse pour ces deux dirigeants. Avec Tavares, l'empreinte française est faible car le siège social a filé à Amsterdam ; de fait, c'est Stellantis qui est devenu une « world company » située entre les Pays-Bas, Detroit et Milan, la France étant réduite au rang de « business unit » ; le corps social subit d'énormes pressions sous l'égide d'un patron qui conduit son entreprise pied au plancher ; quant aux sous-traitants, ils se plaignent d'être fort mal traités. S'agissant de Pouyanné, les résultats de TotalEnergies sont exceptionnels mais la gestion des crises de 2022 (Ouganda, grève dans les raffineries, Russie, salaire) a été jugée mauvaise, il y a du mal être au travail chez TotalEnergies et une absence de contre-pouvoirs car personne n'ose porter la contradiction à son dirigeant. Quel dommage car s'il y a bien une entreprise dont les Français devraient être fiers, c'est TotalEnergies !

Fabrice Gliszczynski
Commentaires 2
à écrit le 27/04/2023 à 11:38
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ca sert a quoi ce genre d'etudes? on iterroge des gens qui vont donner des reponses en fonction de leurs interets.....le gars sera mieux classe s'il se fait plumer pour remplir les caisses, etout en se sacrifiant et en creant des emplois pour des gen...

à écrit le 27/04/2023 à 10:32
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En France on aime se bercer d'illusions. Le micron en est un exemple. Continuer de jacasser. Ailleurs ca travaille et prepare le futur.

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