TPE : une procédure permet de rembourser les PGE pendant 10 ans

ENTRETIEN. Alors que le « quoi qu’il en coûte » touche à sa fin, qu’attendre de 2022 ? Pour le président du conseil national des administrateurs judiciaires et des mandataires judiciaires, Christophe Basse, la perspective est positive, d’autant que des outils tous nouveaux ont été créés pour encourager les investisseurs à investir dans les entreprises en procédure collective quand d’autres permettent l’étalement des dettes des entreprises. C'est notamment le cas de la procédure de traitement de sortie de crise (PTSC) pour les entreprises de moins de 20 salariés, qui peut imposer aux créanciers un remboursement jusqu'à dix ans, PGE compris.
(Crédits : Reuters)

LA TRIBUNE - De manière globale, comment se porte l'économie ? Quid des procédures collectives et des défaillances d'entreprise, doit-on craindre le pire ?

CHRISTOPHE BASSE - On dénombre 50.000 à 55.000 procédures collectives par an qui représentent 250.000 salariés. Ces procédures concernent à 95% des entreprises de moins de 10 salariés. Ce qui est représentatif du tissu économique national. Conséquences de la crise des subprimes en 2009-2015, on dénombre 65.000 procédures collectives par an et 300.000 salariés concernés. Avec la crise sanitaire, il y. a eu en France 32.000 procédures collectives... Et 88% des procédures collectives ouvertes sont des dossiers dits impécunieux, c'est-à-dire dans lesquels il n'y a aucun actif. Cela signifie que les entreprises concernées sont celles qui étaient mortes déjà depuis longtemps et qui n'ont pas pu bénéficier des aides du gouvernement. Bref, des entreprises qui devaient donc disparaître. Selon notre observatoire - qui toutes les semaines puisent des chiffres directement dans les logiciels métiers des confrères - nous devrions atteindre, en 2001, 27.000 procédures collectives, avec le même nombre de dossiers impécunieux et le même nombre de salariés concernés, environ 80.000. On voit bien la différence entre 250.000 salariés concernés habituellement et aujourd'hui. Pour la crise des subprimes, le plan Sarkozy c'était 30 milliards d'euros. Ce qui a été injecté, ici, par le gouvernement, c'est quatre fois plus.

Les procédures collectives ont-elles repris dans les tribunaux de commerce ?

Non, en revanche il y a un frémissement pour les procédures de prévention. C'est un très bon signe. Cela signifie que le chef d'entreprise qui pressent des difficultés n'attend pas pour venir nous voir et trouver une solution amiable et confidentielle. La confidentialité joue beaucoup pour les entreprises, dès qu'une procédure est publiée cela a tendance à tendre l'écosystème de clientèle.

Que vous inspire l'étude publiée par Euler Hermes qui prédit 40% de défaillances d'entreprises en 2022 ?

Les créanciers publics - qui représentent 25% de l'ouverture des procédures collectives - accordent des moratoires, des délais qui vont courir jusqu'à la fin du premier semestre 2022, au moins. Je ne vois pas là une accélération de l'ouverture des procédures collectives. Il y a les aides qui courent jusqu'au 31 décembre 2021, les plans de relance... Il peut y avoir un petit rattrapage, ce n'est pas exclu, je n'en connais pas la proportion, mais même si elle est de l'ordre de ce que prévoit Euler Hermes, nous restons néanmoins très en deça d'une année moyenne de procédure collective et deux fois moins que les années post crise des subprimes. Il n'y a pas de quoi s'affoler. Le taux de défaillances en France c'est moins de 1%. Il faut aussi considérer un autre chiffre, celui de la création d'entreprises en 2020, qui est de 800.000 créations.

Sommes-nous déjà dans la relance - on évoque beaucoup le Plan dédié ? Quel effet peut avoir la fin du « quoi qu'il en coûte » ?

Voit-on les effets du plan de relance ? Je ne crois pas tout à fait encore. Ce plan comprend un volet détection avec des réunions organisées avec les acteurs économiques pour détecter les entreprises en difficulté. Ce qui est intéressant c'est ce qui va se passer au 1er janvier 2022. On sait que la prévention est importante et les procédures de prévention - mandat ad hoc et conciliation - rencontrent un très grand succès auprès des entreprises qui en bénéficient, puisque c'est 70% de sortie positive constatés. La profession a décidé de proposer un mandat ad hoc de sortie de crise, pour toutes les entreprises qui souhaitent en bénéficier, assorti d'un forfait pécuniaire modeste afin que le coût financier ne soit pas un frein. Mais l'outil le plus puissant c'est cette procédure de traitement de sortie de crise. Appelée PTSC, elle concerne les entreprises de moins de 20 salariés, ayant une comptabilité à jour, mais qui, en raison de la crise Covid, ont des dettes fiscales, sociales, ont reçu cet investissement de la part du gouvernement (le PGE, Ndlr) mais qui vont avoir des difficultés pour le rembourser dans les délais. Ce PTSC va se chercher au tribunal, avec la nomination d'un mandataire judiciaire. La durée de la procédure est de trois mois et elle peut imposer aux créanciers un remboursement jusqu'à dix ans, PGE compris (lesquels peuvent être remboursés au bout de six ans, Ndlr). C'est une mesure de relance qui va être forte.

Estimez-vous qu'il faut mieux faire connaître certaines procédures qui concernent des secteurs particuliers comme l'agriculture ou la viticulture ?

En effet, et j'y suis extrêmement attaché. Il y a une défiance de certains secteurs à la procédure collective. Les agriculteurs notamment, et c'est un peu philosophique, taisent leurs difficultés avec d'ailleurs parfois des drames humains terribles. Or nous avons des plans de remboursement pour les agriculteurs qui vont jusqu'à 15 ans. Nous avons des périodes d'observation qui suivent les récoltes et qui peuvent durer jusqu'à deux ou trois ans. Nous avons des plans de réduction de dettes qui ne sont pas du tout utilisés. Alors qu'il existe des solutions pour que ces agriculteurs demeurent à la tête de leur entreprise et de leur exploitation.

L'activité de fusion-acquisition se porte bien. Est-ce que cela peut être une piste pour des entreprises en sortie de crise ?

Nous avons justement réorganisé notre site professionnel, pour aller chercher tous les candidats acquéreurs. C'est le lien que je fais avec le M&A (fusion-acquisition Ndlr) qui fonctionne bien. Il y a de l'argent, les investisseurs veulent investir mais ne trouvent pas forcément de cibles. De notre côté, nous avons des choses à vendre, parfois, mais nous ne sommes pas sûrs d'avoir trouvé le bon repreneur. La procédure collective, c'est faire en sorte que le dirigeant demeure à la tête de son entreprise mais aussi parfois l'aider par de l'argent frais qui est injecté dans l'entreprise ou parfois même par une solution de reprise qui peut sauvegarder l'emploi. Ce site que nous allons mettre en ligne en novembre, appelé Actify, va aller chercher par des modules, tous les candidats possibles pour les entreprises en difficulté. On sait que dans une année normale, il y a 50.000 procédures collectives. Il y a dans ces dossiers énormément de choses à vendre, de petits fonds de commerce comme de grosses entreprises. Il faut aller chercher l'argent là où il est.

Les investisseurs peuvent-ils donc investir en toute confiance ?

Il y a une transposition de la directive européenne d'insolvabilité, qui a aussi réformé les sûretés. Parmi cette réforme, de nouveaux privilèges ont été créés. Deux notamment, l'un dit de post-money, l'autre de new money. Ce sont des privilèges qui disent aux investisseurs, qu'en cas d'investissement dans une entreprise qui est soit dans une phase de conciliation, de redressement judiciaire ou de sauvegarde, qu'ils seront quasiment les premiers à être désintéressés.

Commentaires 2
à écrit le 07/10/2021 à 19:40
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Plus ça va, plus on voit que ce gouvernement fait n'importe quoi. Si c'est si simple, comme solution, alors ils n'ont qu'à distribuer gratuitement des billets dans les DABS, tant qu'ils y sont. Je vous dit pas l'inflation qu'on va se farcir dans les ...

le 08/10/2021 à 4:43
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Et oui, vivre a credit se paie cash le moment venu et en general, la note est douloureuse.

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