[Articles publié le mardi 28 août 2018, à 8h58, mis à jour à 15h avec réactions]
"Je vais prendre, pour la première fois, la décision la plus difficile de ma vie".
C'est par cette brève entrée en matière que Nicolas Hulot a annoncé sa démission du gouvernement, ce matin sur France Inter:
"Je prends la décision de quitter le gouvernement."
Cette annonce est à la fois spectaculaire et, en même temps, complètement attendue : de l'aveu même du désormais ex-ministre français de la Transition écologique et solidaire, la situation était intolérable depuis longtemps.
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"Je ne veux plus mentir"
"Je ne veux plus me mentir. Je ne veux pas donner l'illusion que ma présence au gouvernement signifie qu'on est à la hauteur sur ces enjeux-là [les enjeux environnementaux, Ndlr]. (...) "C'est une décision d'honnêteté et de responsabilité", a-t-il déclaré.
La vraie surprise était autre part ce matin, quand on apprenait de sa bouche que l'ex-ministre n'avait pas encore prévenu ni le président ni le Premier ministre de cette décision - par "crainte qu'ils ne le convainquent de changer d'avis", a-t-il expliqué au micro de France Inter.
Le gouvernement pas à la hauteur des enjeux environnementaux
"Le Premier ministre, le président de la République ont été pendant ces 14 mois à mon égard d'une affection, d'une loyauté et d'une fidélité à toute épreuve", a confié le Nicolas Hulot.
Malgré cela, le gouvernement n'a pas su donner la priorité aux enjeux environnementaux, a plaidé Nicolas Hulot, estimant n'avoir pu obtenir que des "petits pas" et confiant se sentir "tout seul à la manœuvre" sur les enjeux environnementaux.
"Est-ce que nous avons commencé à réduire l'utilisation de pesticides ? La réponse est non. Est-ce que nous avons commencé à enrayer l'érosion de la biodiversité ? La réponse est non. Est-ce que nous avons commencé à nous mettre en situation d'arrêter l'artificialisation des sols ? La réponse est non", a-t-il déploré, quelques mois après avoir néanmoins réussi à imposer "son" plan biodiversité .
La baisse du prix du permis de chasse, le camouflet de trop
Nommé pour la première fois ministre en mai 2017, après avoir renoncé à une candidature à la présidentielle un an plus tôt, Nicolas Hulot avait dû avaler bien couleuvres en avalisant des décisions contraires à ses convictions, malgré certaines victoires symboliques comme l'abandon du projet d'aéroport de Notre-Dame-des-Landes. Il avait notamment dû endosser le report de l'objectif de ramener la part du nucléaire dans la production d'électricité à 50% en 2025.
Et lundi, l'Elysée a annoncé la baisse du prix du permis de chasse de 400 à 200 euros par an, à l'issue d'une réunion à haut niveau qui a joué un rôle dans sa décision.
La présence du conseiller politique de la Fédération nationale des chasseurs (FNC) Thierry Coste, un "lobbyiste" qui "n'avait rien à faire là", a "achevé de me convaincre que ça ne fonctionne pas comme ça devrait fonctionner", a lancé le ministre démissionnaire, y voyant le symptôme "de la présence des lobbies dans les cercles du pouvoir". Des déclarations rejetées comme "un beau prétexte" par M. Coste.
Bougrain-Dubourg se sent "orphelin", Greepeace dénonce un "gâchis"
Chez les défenseurs de l'environnement qui s'interrogent sur la capacité d'un autre à faire mieux que Nicolas Hulot, l'humeur était morose.
Greenpeace a dénoncé un "gâchis", tandis que le président de la Ligue de Protection des oiseaux (LPO) Allain Bougrain-Dubourg se sentait "orphelin". "L'écologie perd son seul allié au gouvernement", pour la Fondation pour Nature et l'Homme créée par Hulot.
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