Dès 2017, le chef de l'Etat avait érigé l'égalité professionnelle en « grande cause nationale » promettant de réduire les inégalités entre les hommes et les femmes. Six ans après, des avancées ont certes été réalisées mais la question reste entière concernant les revenus.
Dans une note dévoilée ce mercredi 5 avril, France Stratégie, un organisme rattaché à Matignon, a passé au scanner les facteurs qui influencent les trajectoires des individus et les revenus. Résultat, « les constats sont sans ambiguïté. L'origine sociale est le facteur le plus important sur l'inégalité des chances », a déclaré Clément Dherbécourt, économiste au département Société et politiques sociales lors d'un point presse. Cette vaste enquête inédite porte sur un échantillon de 100.000 individus âgés de 31 ans à 46 ans. Elle concerne aussi bien des salariés du privé que du public, des indépendants, des chômeurs ou des inactifs.
1.100 euros d'écart de revenus par mois entre le bas et le haut de la pyramide
L'un des résultats les plus frappants de cette note est que le quart de la population la plus modeste gagne 1.100 euros de moins par mois que le quart de la population la plus favorisée. L'environnement social et le milieu familial jouent un rôle prépondérant sur les différences de revenus.
Le sexe est le second facteur d'inégalité entre les individus. L'écart de revenu d'activité est ainsi de 620 euros par mois entre les hommes et les femmes.« Il y a une baisse assez marquée entre les hommes et les femmes sur l'inégalité des chances. L'accès à des postes de cadres et la participation des femmes au marché du travail s'améliorent. Malgré ces avancées, le sexe reste la seconde source d'écart après l'origine sociale »,a ajouté Clément Dherbécourt.
440 euros d'écart entre l'Ile-de-France et les Hauts-de-France
Le lieu de naissance peut également peser sur les écarts de revenus à l'âge adulte. Dans leurs travaux, les chercheurs ont montré que le fossé était de 440 euros par mois entre les personnes vivant dans la région la plus riche, l'Ile-de-France, et les deux régions les plus pauvres, c'est-à-dire des départements plus pauvres comme le Nord-Pas-de-Calais ou encore le Languedoc-Roussillon.
Les différences sont également marquées entre les zones urbaines (Hors ZUS, zone urbaine sensible) et les zones rurales avec une différence de 140 euros. Enfin, au sein même des villes, les habitants des zones urbaines sensibles gagnent en moyenne 250 euros de moins par mois que les habitants hors zones urbaines sensibles. S'agissant de l'ascendance migratoire, ce facteur joue un moindre rôle sur l'écart de revenus. L'écart est de 170 euros entre les natifs et les descendants d'immigrés.
Le parcours scolaire creuse massivement les écarts
L'origine sociale et le sexe ne sont pas les deux seuls facteurs pour expliquer les inégalités de revenus. L'école peut également creuser fortement les disparités. « Entre deux personnes d'origine sociale opposée, les écarts de revenus proviennent à 70 % du parcours éducatif », soulignent les auteurs. L'obtention d'un diplôme de l'enseignement supérieur va favoriser l'insertion professionnelle et l'accès à un emploi qualifié.
Dans leur enquête, les économistes expliquent que c'est surtout le diplôme qui compte plus que le choix d'une spécialité ou d'une grande école. « L'effet 'diplôme' explique à lui seul près des deux tiers de l'écart total de revenus d'activité », précise la note. « En moyenne, les personnes d'origine sociale modeste sont peu diplômées de l'enseignement supérieur. Il y a un écart de 50 points avec les catégories favorisées. C'est énorme », déplore Jean Flamand, co-auteur de ce travail.