Réforme des retraites : le front syndical va-t-il tenir ?

Dans la foulée de la présentation, mardi 10 décembre, du projet de réforme des retraites d’Elisabeth Borne, les grandes centrales syndicales ont affiché une mobilisation commune, avec l'annonce d'une journée d'action le 19 janvier prochain. Si la CFDT, la CGT FO, la CFE-CGC et la CFTC ont exprimé une forte unité..., celle-ci va-t-elle, ou peut-elle, tenir très longtemps ? Pas sûr au regard des différences de taille qui les animent entre une CFDT qui ne veut pas « bordéliser » la France et une CGT qui veut au contraire en découdre avec le gouvernement. Décryptage.
Fanny Guinochet
Laurent Berger (CFDT), Philippe Martinez (CGT) et Cyril Chabanier (CFTC)
Laurent Berger (CFDT), Philippe Martinez (CGT) et Cyril Chabanier (CFTC) (Crédits : Reuters)

Ce mardi soir 10 janvier, ils étaient tous là, unis, à la Bourse du Travail, à Paris, devant les caméras à s'insurger contre la réforme des retraites que venait de présenter la Première ministre, Elisabeth Borne. Une fois n'est pas coutume, les chefs de file de la CFDT, CGT, FO, CFE-CGC, Unsa, CFTC.... ont parlé d'une seule voix : le report de l'âge de départ à la retraite, ce sera non !  On a pas vu pareil unité depuis 12 ans.

Une première journée d'action le 19 janvier

Peu importe les contreparties mais aussi les appels à la concertation et au dialogue répétés par la locataire de Matignon. Ils se sont déjà mis d'accord sur une première journée de mobilisation le 19 janvier prochain. Agents de la fonction publique, salariés du privés, jeunes... tous sont appelés à faire connaître leur opposition à cette réforme que le gouvernement, lui, vante comme essentielle et juste.

Le lendemain, ce mercredi matin, Laurent Berger, secrétaire général de la CFDT, invité de France Inter s'est montré tout aussi déterminé.

« La CFDT n'a pas changé d'avis, elle est contre le recul à 64 ans », a-t-il répété. Assurant qu'il ne s'attendait pas au « Grand Soir », il a invité les Français à signer une pétition en ligne contre le projet du gouvernement. Le syndicat réformiste, toujours un peu frileux à défiler, tient à faire preuve de responsabilité. Aussi Laurent Berger assure-t-il que derrière sa détermination à se mobiliser, il n'y pas non plus la volonté de « bordeliser » le pays.

Des écarts de points de vue avec la CGT

Justement, qu'en pense la CGT, l'autre grand syndicat français ? Tout aussi opposé à la réforme d'Elisabeth Borne, Philippe Martinez, le numéro un de la CGT, s'est déclaré, sur BFM, en faveur « de  grèves reconductibles, » et prédit « une France à l'arrêt, si les salariés le décident ».

Le leader cégétiste est poussé par sa base, dont une partie rêve de montrer les muscles, surtout après s'être faits doubler par des collectifs ou mouvements spontanés comme les Gilets jaunes. Ses adhérents souhaitent en découdre avec Emmanuel Macron qui depuis son premier quinquennat n'a pas fait montre de beaucoup d'attention pour les syndicats.

Philippe Martinez est d'autant plus attentif à ces différends internes que son mandat s'arrête en mars prochain. Une grande mobilisation pourrait lui offrir un baroud d'honneur pour sa sortie. Et ce d'autant plus que sa succession n'est pas assurée. La candidate qu'il pousse pour reprendre le flambeau a du mal à faire consensus en interne.

Un front que le gouvernement cherche à lézarder

La position de la CFDT et de la CGT peuvent-elles longuement collaborer ? Le gouvernement, en tout cas, va tout faire pour le fissurer. Déjà, dans le projet présenté ce mardi, la première ministre n'a eu de cesse d'adresser des signes à la CFDT : carrières longues, pénibilité, cotisations patronales - même à cout du travail constant -, sont des mots qui résonnent à l'oreille de Laurent Berger. Ce sont des dossiers que la CFDT a toujours suivis de près quand elle ne les a pas initiés. « Laurent Berger s'est mis dans un corner, il faut l'aider à en sortir, pour calmer son opposition, car il reste influent et a des relais à l'Assemblée  », assure ainsi un ministre.

Laurent Berger, dans un corner ?

D'autres au sein du gouvernement ne sont pas tout à fait de cet avis et auraient plutôt tendance à s'aligner sur la distance dont fait preuve Emmanuel Macron lui même avec le premier syndicat des salariés du privé en France. Comme ce ministre qui confie : « Tant pis pour Laurent Berger s'il se perd dans son entêtement, on ne va pas lâcher car cela ne nous apportera rien dans l'opinion. Laissons la CFDT se perdre dans le non ...elle s'affaiblira toute seule ».

La partie n'est pas simple pour Laurent Berger, car le sujet des retraites est aussi particulièrement sensible en interne. En juin dernier, lors du congrès de la CFDT, ce point a prêté à débat dans une organisation connue pour son homogénéité. Les 600.000 adhérents ont dit leur opposition au recul de l'âge. En même temps, la CFDT ne veut pas prendre le risque de se laisser entraîner dans les débordements ou de la radicalité.

Alors, Laurent Berger va-t-il s'adoucir ou rester campé sur ses positions ? Entré dans la centrale de Belleville dans les années 2003, il se souvient que la CFDT vivait une crise interne violente....  à cause, justement, du soutien du syndicat à la réforme des retraites. Hasard du calendrier, 20 ans après, Laurent Berger se retrouve à devoir choisir. De sa décision dépendra en partie,  la durée de vie du front syndical.

Fanny Guinochet
Commentaires 17
à écrit le 12/01/2023 à 21:00
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Ils ont une guerre de retard, les syndicats : tout le monde va rester à la maison jeudi prochain et bosser en télétravail. Sauf les manifestants quasi-professionels : il va falloir en louer, des cars, pour les trimballer.

à écrit le 12/01/2023 à 16:12
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qu'ils critiquent ok c'est leur rôle mais ils devraient, ce qu'ils ne font pas, faire des propositions responsable concrètent exemple,il ne faut pas rever, avec les 35 heures ils ont voulu travailler moins à ce moment la il fallait deja voir le m...

à écrit le 12/01/2023 à 3:03
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Qui veut la réforme : l'UE pour vendre nos retraites à blackrock ! Et qui paie les syndicats via la CES (Confédération Européenne des Syndicats) : l'UE pour qu'ils détournent la contestation vers le petit écolier de l'élysée - qui n'a d'ailleurs plus...

le 12/01/2023 à 4:03
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Qui a plebicite l' illustre monarque aux petits poings nerveux sinon les francais ? Dansez donc maintenant.

le 12/01/2023 à 6:16
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Egalement pour vous servir de la petite bière; du même acabit. Qui va finir par financer nos déficits abyssaux et chroniques ? Les banques russes, peut être ?

le 12/01/2023 à 9:53
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Bref, chère Mireille, vous ne croyez pas au système. Libre à vous ! Mais comme disait Aldous Huxley, on a de toutes façons le choix entre la dictature du fric et celle de la police politique. Moi je préfère la dictature du fric, même si j'en ai p...

le 12/01/2023 à 18:21
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Vu le nombre de vote blanc et abstention le petit Macron a été élu avec a peine 10% des personnes en âge de voter, si c'est ca la démocratie on a un sacré souci, normalement avec si peu de voies tout les candidats auraient du être viré sans exception...

à écrit le 11/01/2023 à 23:37
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Les droites y compris extrêmes sont complétement discréditées sur ce pseudo scénario de négociation en tout cas les mesures de représailles hors grèves tournées sacrément à la machine à café aujourd'hui.

à écrit le 11/01/2023 à 23:01
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Ces syndicats ne sont plus représentatifs que par la force de la loi. Pour le reste, ils n'ont pratiquement plus d'adhérents et très peu d'électeurs. Pourquoi leur reconnaître une importance qu'ils n'ont pas, à part savoir allumer des incendies démag...

le 12/01/2023 à 10:27
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"Pour le reste, ils n'ont pratiquement plus d'adhérents et très peu d'électeurs" Bon nombre de partis politique aimeraient avoir quand même le nombre d’adhérent des syndicats.

le 12/01/2023 à 18:26
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Comme le nombre d' adhérents aux partis politiques

le 12/01/2023 à 22:13
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Situation typiquement française en lien avec la mentalité individualiste bien française aussi . En Allemagne 80 % des salariés du privé et 87% du public sont syndiqués… ils obtiennaoent depuis des années des 3-4 % d augmentation de salaire quand nou...

à écrit le 11/01/2023 à 22:41
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Un Front syndical uni? Impossible. Trop de luttes de pouvoir et d'interets financiers en jeu entre les syndicats. Une raison supplémentaire qui va encore plus decredibiliser le syndicalisme qui se fera de plus en plus déborder par des groupes comme l...

à écrit le 11/01/2023 à 21:32
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Plus besoin de 3ième tour dans la rue : entre la LFI et le RN, les mécontents sont bien représentés au Parlement. Qui fait les lois. C'est une très bonne nouvelle : on est enfin en démocratie. C'est à se demander si ce n'est pas un vrai tour de coc...

à écrit le 11/01/2023 à 18:21
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Il faut se montrer réaliste : les syndicats sont discrédités, à cours d'adhérents et ne mobilisent plus guère. Les partis politiques classiques sont de même en pleine débandade face à la montée des populismes dont ils sont les seuls responsables par ...

le 12/01/2023 à 22:19
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On parle toujours de la dette colossale du pays mais il serait intéressant de connaître la dette que la France détient sur les autres pays ..eh oui étrange qu’ on n enparle pas et puis on peut toujours revendre notre «  empire maritime » au plus offr...

à écrit le 11/01/2023 à 18:15
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La photo est épatante: on lit sur les visages des 'dialogueurs sociaux" leurs très grande motivation!

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