Retraites complémentaires : derrière l'accord, les patrons se déchirent

Syndicats et patronat se sont mis d'accord sur les retraites complémentaires Agirc-Arrco, qui couvrent 13 millions de salariés du privé. Ces pensions, qui représentent entre 30 et 60 % de la pension totale des salariés et cadres, seront revalorisées à hauteur de 4,9% dès le 1er novembre. Mais derrière ce compromis qui doit encore être ratifié, Medef et CPME, et U2P n'étaient pas sur la même ligne. Notamment sur l'épineuse question de jouer la solidarité avec le régime général. Explications.
Fanny Guinochet
(Crédits : Reuters)

Derrière la bonne entente de façade montrant syndicats et patronat se réjouir d'être tombés d'accord pour la gestion des retraites complémentaires, se cachent des grincements patronaux. En effet, une fois n'est pas coutume, les organisations d'employeurs, dans cette négociation Agirc/Arrco, se sont montrées très divisées. Le Medef, la CPME et l'U2P n'étaient pas sur la même ligne.

Au cœur de leur bras de fer : la question de savoir si oui ou non le régime des retraites complémentaires doit abonder le système de base. Deux conceptions du paritarisme et de la solidarité nationale se sont affrontées.

Medef contre CPME et U2P

Jusqu'au dernier moment, les leaders patronaux ont ferraillé. A l'origine de leur différend, les propos d'Olivier Dussopt, le ministre du Travail, sur la réforme des retraites du gouvernement. Pour lui, il est normal que les retraites complémentaires viennent financer quelques mesures du système général dans la mesure où le report de l'âge de départ à la retraite de 62 ans à 64 ans dans le privé génère des rentrées d'argent, y compris pour l'Agirc Arrco, Et notamment les petites retraites, dont la réforme promet d'améliorer le niveau.

Avant la négociation entre patronat et syndicats dans la nuit de mercredi à jeudi dernier, le gouvernement n'hésitait pas à brandir la menace. A défaut, l'exécutif puisera dans les réserves de l'Agirc-Arrco, via des dispositions dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale, a-t-il dit. Sans trop de scrupules, vu que les comptes de l'Agirc-Arrco sont dans le vert avec près de 70 milliards d'euros de réserves.

Pour la CPME et l'U2P, l'argument s'entend. Mais, pour le Medef, il n'en est pas question, l'argent des retraites complémentaires doit rester aux pensionnés des salariés du privé. Et l'Etat doit se débrouiller pour financer les promesses de sa réforme.

C'est d'ailleurs, une fois, n'est pas coutume là encore, la position adoptée par les syndicats de salariés, unanimement contre la réforme des retraites Macron.

Une ponction de l'Etat qui pourrait dépasser le milliard d'euros

A l'origine, l'exécutif réclamait entre un et trois milliards d'euros annuels à l'Agirc-Arrco d'ici 2030.

Certains, à la CPME et à l'U2P, espéraient, en répondant à cette requête et en la fléchant, faire baisser la note. Et limiter la casse. Il s'agissait, selon plusieurs sources, de s'en tenir à un abondement de 500 millions d'euros ciblés vers les petites pensions. « En début de semaine, le gouvernement était d'accord sur ce montant », raconte un proche du dossier.

Mais, le Medef s'est opposé à ce "deal". Embarquant avec lui, les syndicats, il l'a emporté : le texte d'accord ne prévoit aucune ponction, aucun tuyau financier vers l'Etat. Seul, un article s'en tient au lancement de travaux visant à des mesures de solidarités internes au régime, via un groupe de travail, en vue d'un nouvel accord d'ici à la fin du premier semestre 2024. « Patrick Martin, le président du Medef, a mis son véto. Histoire de montrer au gouvernement qu'il lui tient tête », raconte une source syndicale.

Front commun face au gouvernement

A l'issue de cet accord, syndicats et patronat ont voulu montrer qu'ils faisaient front commun face aux velléités du gouvernement de ponctionner les réserves de l'Agirc-Arrco. Le signal n'est pas innocent alors que le gouvernement est tenté de piocher dans les excédents de l'Unedic pour financer France Travail. Ce front commun va-t-il aussi peser sur le climat de la conférence sociale qui se tiendra le 16 octobre prochain ? Du côté de l'exécutif, on s'y attend.

En attendant, est-ce que le gouvernement va s'empêcher de piocher dans le régime des retraites complémentaires ? « Absolument pas », répond un proche du dossier. Reste à savoir à quelle hauteur s'élèvera l'addition. Les organisations syndicales et patronales gestionnaires du régime Agirc-Arrco doivent encore signer l'accord décroché dans la nuit. Ils ont une semaine pour le faire.

Fanny Guinochet
Commentaires 8
à écrit le 07/10/2023 à 8:31
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Retraité si dussopt se sert dans notre caisse je suis prêt à bloquer le pays ils sont incapables de gérer qu'ils réduisent leur train de vie

à écrit le 06/10/2023 à 18:31
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Prétendre voler l'argent des cotisants ARRCO & AGIRC est absolument SCANDALEUX. Le ministre qui a eu cette idée devrait être démis du gouvernement dans la seconde, car il n'est pas digne d'être à cette fonction. Honte à cette bande d'incompétents ...

le 06/10/2023 à 19:38
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Je dirais même plus qu'il les vire tous sans délai, c'est honteux c'est du vol il ferait mieux de prendre l'argent c'est les milliardaires de s'engraisser sur notre dos bientôt il faudra payer pour aller travailler

à écrit le 06/10/2023 à 15:14
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Réponse à Mar469, cette goutte d'eau représente 2% des réserves ou 1,7% du montant des pensions AGIRC ARRCO. Il me semble que la goutte d'eau serait bienvenue pour augmenter les pensions, soit 4,9 + 1,7 = 6,6% ce qui permet de mieux compenser l'infla...

le 06/10/2023 à 17:18
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La fameuse cagnotte de l'agirc-arrco a été crée principalement par une décote de 10% ( un malus ) sur la pension de retraite ,elle a été appliquée en janvier 2019 (voté en 2015 par les partenaires sociaux) jusqu'à aujourd'hui.Près de 700.000 salariés...

à écrit le 06/10/2023 à 10:29
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L'État n'est pas capable de gérer les comptes publics , dettes abyssales depuis si longtemps. Du coup, il fait les poches de tout le monde dès qu'il renifle le magot. L'Agirc -Arcco ne fait pas exception.

le 06/10/2023 à 13:09
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La réforme des retraites va profiter aux finances de l'Agirc-Arrco. Il n'est donc pas anormal qu'il redonne une partie des excédents au profit du financement des petites retraites. Le gouvernement envisage d'en prélever 1 à 1.5 milliard ce qui n'est ...

à écrit le 06/10/2023 à 9:41
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Le patronat est sur la même ligne que la macronie. Ils espèrent gratter quelques cotisations annuelles Comment le gouvernement comment récupérer les dizaines de milliards des fonds de réserve des retraités

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