Travailleur indépendant : comment le projet de loi veut mieux protéger les 3 millions de professionnels

Le Sénat examinera à partir de mardi un projet de loi pour mieux protéger les quelque 3 millions de travailleurs indépendants, dont le salaire moyen s'élève à 2.580 euros, avec de fortes disparités. Les principales mesures : mise en place d'un statut unique, dissociation des patrimoines professionnels et personnels, aide à la formation.
(Crédits : Reuters)

Les travailleurs indépendants ont davantage souffert que les salariés pendant la crise, en dépit des aides gouvernementales, selon des estimations avancées par la présidente de la commission des affaires économiques du Sénat, Sophie Primas : "Ils ont subi une perte moyenne de leur chiffre d'affaires d'environ 17 %, soit deux fois plus que la baisse d'activité enregistrée en France, qui a atteint 8,3 % du PIB en 2020." Alors que le nombre de travailleurs indépendants n'a cessé d'augmenter ces dernières décennies, la crise sanitaire et économique a fait étalage des fragilités de leur statut. Dans ce contexte, un projet de loi arrive au Sénat visant à mieux protéger ces professionnels.

Un revenu moyen de 2.580 euros

Aujourd'hui, 3,3 millions de travailleurs indépendants (secteur agricole compris) exercent en France. Cette façon de travailler ne cesse de se démocratiser, dans la dynamique de la fin du XXe siècle. Après une forte hausse au début du XXI siècle, puis une stagnation de 2013 à 2017, le nombre de travailleurs indépendants est reparti à la hausse. Exploitants agricoles, commerçants, artisans ou professionnels libéraux, ils sont en moyenne plus âgés que les salariés et exercent plus souvent dans la construction, le commerce ou la santé.

Les femmes sont minoritaires parmi les non‑salariés (24 % dans l'agriculture, 37 % dans les autres secteurs), souligne l'Insee dans une étude de 2017. Selon l'U2P, le principal syndicat des indépendants, la création d'entreprise a progressé de 4% entre 2019 et 2020. Leurs revenus mensuels moyens s'élèvent à 2.580 euros.

U2P indépendants

Le projet de loi vise tout d'abord à la création d'un statut unique de l'entrepreneur individuel (EI), protecteur du patrimoine personnel. Les entrepreneurs individuels seraient ainsi titulaires de deux patrimoines, l'un professionnel, l'autre personnel, qui serait insaisissable en cas de défaillance, alors qu'aujourd'hui seule la résidence principale est protégée en cas de difficultés. C'est une préoccupation de longue date des travailleurs indépendants.

"Sans remettre en cause la philosophie générale de la réforme", le rapporteur du texte au Sénat Christophe-André Frassa (LR) a proposé une réécriture complète de l'article, "pour renforcer la robustesse juridique du nouveau statut".

Protéger le patrimoine privée des entrepreneurs

Les sénateurs ont ainsi précisé en commission la démarcation entre les deux patrimoines. Ils ont aussi supprimé certaines exceptions au principe de séparation des patrimoines prévues par le projet de loi au profit de l'administration fiscale et des organismes de sécurité sociale.

Une autre disposition importante du texte vise à concrétiser l'annonce par le chef de l'Etat que tous les indépendants qui cesseront leur activité pourront toucher l'assurance chômage, une fois tous les cinq ans.

Les conditions d'accès à l'allocation des travailleurs indépendants (ATI), jugées trop restrictives, sont ainsi élargies à toute cessation totale et définitive d'activité qui n'est pas économiquement viable. Il ne sera plus nécessaire d'être passé par une liquidation ou un redressement. La réforme de l'ATI sera complétée par un décret assouplissant le critère de revenu d'activité minimal. Mis en place en 2019, le dispositif n'a été utilisé que par un millier de personnes.

Constatant "un échec quantitatif patent", la rapporteure pour avis Frédérique Puissat (LR) a toutefois introduit "une clause de revoyure" à la réforme jugée "précoce". Elle serait limitée au 31 octobre 2024, avec obligation d'une concertation des partenaires sociaux au plus tard six mois avant sur le bilan et les perspectives de l'ATI.

Financer la formation professionnelle

Le projet de loi entend encore simplifier le financement de la formation professionnelle des travailleurs indépendants. Une cinquantaine d'amendements seront examinés dans l'hémicycle, dont plusieurs du gouvernement visant au rétablissement du texte initial.

Un volet social et un volet fiscal, en cours de discussion au Parlement dans le cadre de l'examen des budgets pour 2022, complètent ce projet de loi. Il s'agit notamment de faciliter les cessions d'entreprises, trop peu nombreuses en France lors du départ à la retraite d'un entrepreneur, grâce à une exonération totale ou partielle de taxation de la plus-value si le montant transmis n'excède pas 300.000 euros pour les entreprises individuelles ou 500.000 euros lorsqu'il s'agit d'un branche complète d'activité d'une entreprise plus importante.

Le texte porté par le ministre chargé des PME Alain Griset concrétise une partie du plan de soutien aux indépendants présenté le 16 septembre par le président Emmanuel Macron. Il s'articule avec deux autres volets qui relèvent du projet de budget et du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2022. Soumis en premier lieu aux sénateurs, dans un calendrier parlementaire contraint, le projet de loi ira ensuite à l'Assemblée nationale, probablement début janvier, dans l'objectif d'une mise en oeuvre en 2022, selon M. Griset.

Commentaires 2
à écrit le 25/10/2021 à 18:57
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Il vaudrait mieux exonérer les premiers 10.000 euros d'imposition comme pour les travailleurs salariés et permettre la déduction des frais pour arriver aux bénéfices nettes, avant l'imposition, non pas imposer le chiffre d'affaires par 25% dès le pre...

à écrit le 25/10/2021 à 10:56
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La formation n'est plus qu'un business de détournement d'argent public. Faut arrêter avec ça aussi maintenant hein.

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