Accord sur les céréales : la Russie menace à nouveau de suspendre les exportations

Moscou a une fois de plus appelé à lever les restrictions occidentales visant le secteur agricole russe sous peine de mettre fin le 18 mai à l'accord permettant les exportations de céréales ukrainiennes depuis l'été dernier. Parmi les exigences du Kremlin, la reconnexion au système bancaire international SWIFT de la banque russe spécialisée dans l'agriculture ou encore le dégel des actifs de sociétés russes liées au secteur agricole situés à l'étranger.
Depuis l’été 2022, cet accord a permis d'exporter plus de 27 millions de tonnes de produits agricoles et aussi d’apaiser la flambée des prix induite par la guerre en Ukraine.
Depuis l’été 2022, cet accord a permis d'exporter plus de 27 millions de tonnes de produits agricoles et aussi d’apaiser la flambée des prix induite par la guerre en Ukraine. (Crédits : REUTERS/Viacheslav Musiienko)

Nouvel ultimatum de la Russie. Le pays menace de nouveau de suspendre l'accord sur les exportations de céréales ukrainiennes si les ventes de produits agricoles russes restent entravées. Pour rappel, « l'Initiative céréalière de la mer noire », signée en juillet 2022 avec l'Ukraine et la Turquie, avec l'aide de l'ONU, permet l'exportation de tonnes de maïs, de blé et autres céréales depuis les ports ukrainiens.

Cet accord a été prolongé de 120 jours en novembre puis de seulement 60 en mars. La Russie n'a pas accepté plus, mécontente de l'application d'un deuxième accord devant faciliter ses propres exportations d'engrais. Théoriquement, ces exportations, indispensables pour l'agriculture mondiale, ne tombent pas sous le coup des sanctions imposées par les pays occidentaux depuis le début de la guerre, mais sont de facto bloquées par les banques.

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En contrepartie de ces entraves, Moscou exige la reconnexion au système bancaire international SWIFT de la banque russe spécialisée dans l'agriculture Rosselkhozbank, la reprise des livraisons en Russie d'engins et pièces détachées agricoles, l'annulation des entraves pour assurer des navires et accéder aux ports étrangers. Elle a également demandé le dégel des actifs de sociétés russes liées au secteur agricole situés à l'étranger et la reprise du fonctionnement du pipeline Togliatti-Odessa, qui relie la Russie à l'Ukraine et permet la livraison d'ammoniac, un composant chimique très utilisé en agriculture.

« Sans progrès pour régler ces cinq problèmes systémiques (...) il ne peut être question d'évoquer un prolongement de "l'Initiative de la mer Noire" au-delà du 18 mai », a indiqué la diplomatie russe dans un communiqué.

Moscou maintient la pression

Ces menaces ont déjà été prononcées à plusieurs reprises par la Russie. Encore récemment, la semaine dernière, par le chef de la diplomatie russe. « S'il n'y a aucun progrès dans la levée des obstacles aux exportations d'engrais et de céréales russes, alors nous nous demanderons si cet accord est nécessaire », a prévenu Sergueï Lavrov lors d'une visite à Ankara, à l'issue d'un entretien avec son homologue turc Mevlüt Cavusoglu, dont le pays s'est beaucoup investi dans la conclusion de cet accord.

Selon le ministre turc, « les États-Unis et le Royaume-Uni ont pris des mesures en termes de paiement et d'assurance, mais des problèmes persistent. Certaines banques n'ont pas fait le nécessaire ». Et d'appuyer : « Des mesures ont été prises pour réexpédier de l'ammoniac et des engrais russes des pays occidentaux vers les pays africains, mais le problème n'est pas résolu ».

L'ONU a affirmé qu'elle ferait tout son possible pour sauver le mécanisme sur les céréales. Depuis l'été 2022, il a permis d'exporter plus de 27 millions de tonnes de produits agricoles et aussi d'apaiser la flambée des prix induite par la guerre.

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L'Afrique bénéficiaire en cas de non-accord

Le chef de la diplomatie russe a par ailleurs dénoncé la semaine dernière l'inégalité des exportations ukrainiennes entre pays riches et pauvres. Selon le Centre de coordination conjointe chargé de superviser l'accord international, 56% des exportations étaient destinées aux pays en développement, et 5,7% ont concerné les pays les moins avancés, qui totalisent plus de 12% de la population mondiale.

La Russie a d'ailleurs promis en mars qu'elle livrerait l'Afrique en céréales si l'accord de la Mer Noire n'était pas reconduit. « Si nous décidons en fin de compte de ne pas prolonger cet accord dans 60 jours, alors nous sommes prêts à livrer depuis la Russie gratuitement tout le volume qui était destiné ces derniers temps aux pays les plus nécessiteux d'Afrique », avait déclaré Vladimir Poutine lors d'un discours à Moscou devant des responsables africains.

Le président russe avait alors une nouvelle fois réitéré ses critiques envers les Européens, les accusant de s'accaparer les céréales qui quittent les ports ukrainiens.

Lire aussiExportations des céréales ukrainiennes : Poutine promet de livrer l'Afrique si l'accord n'est pas, à nouveau, prolongé

(Avec AFP)

Commentaires 9
à écrit le 14/04/2023 à 4:16
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Et après ce sera quoi la Crimée puis l'Ukraine complète?

à écrit le 13/04/2023 à 15:25
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Que Poutine arrête toutes les exportations vers l'Europe même celles passant par des pays tiers. Quitte à souffrir j'aimerai bien répondre aux questions : 1) L'Europe peut elle se passer de la Russie ? Dans quelle condition, avec quelle augmentati...

le 14/04/2023 à 0:52
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@Azerty: Les réponses: 1) Oui, globalement déjà. Pour ce qui concerne les prix, pour le gaz, par exemple, ils sont revenus au niveau d'avant crise énergétique (en gros). Et je vous rappelle que c'est la Russie qui a fermé le robinet, pas l'inverse. 2...

le 14/04/2023 à 9:35
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"Et je vous rappelle que c'est la Russie qui a fermé le robinet, pas l'inverse. " Pour l'Union européenne il est temps de mettre un terme définitif à sa dépendance au gaz russe. Alors que la guerre se poursuit en Ukraine, les 27 se retrouvent dans...

le 14/04/2023 à 11:52
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@lachose: Vous ne faites pas la différence entre les déclarations et les actions, en plus, ne savez pas interpréter. L'UE a dit de sortir de la dépendance progressivement en plusieurs années, évidemment, en gardant la possibilité de revenir à cette d...

à écrit le 13/04/2023 à 14:23
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Il serait stupide d'alléger les sanctions envers la Russie. Au contraire il faut épuiser l'économie Russe. Il faut que la guerre Poutinienne coûte de plus en plus cher aux (malheureux) Russes de façon à les amener rapidement à la table des négociati...

le 13/04/2023 à 20:34
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Depuis 2014 et l'annexion de la Crimée, les occidentaux sanctionnent la Russie sans pour autant epuiser l'economie Russe. Il me semble que le FMI annonce même une croissance de 0.3 point en 2023 et 2,4 point en 2024. Quellle est donc l'efficacité...

le 14/04/2023 à 0:47
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@GMT: Les sanctions entre 2014 et 2022 étaient faibles et concernaient un faible nombre de personnalités et d'entreprises. Elles étaient assez sensibles pour la Russie dans le secteur de défense, mais toujours respectées.

à écrit le 13/04/2023 à 14:18
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Il serait stupide d'alléger les sanctions envers la Russie. Au contraire il faut épuiser l'économie Russe. Il faut que la guerre Poutinienne coûte de plus en plus cher aux (malheureux) Russes de façon à les amener rapidement à la table des négociati...

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