Hier en fin de matinée, des corps blindés israéliens, des soldats d'infanterie et du génie, étaient toujours présents dans le petit territoire palestinien. Au lendemain d'une nuit de bombardements d'une extrême violence, l'armée a diffusé des images de ses puissants chars Merkava opérant dans le nord-est de ce territoire sablonneux. Elle a affirmé avoir « frappé 150 cibles souterraines » dans la nuit de vendredi, et avoir tué plusieurs membres du Hamas, responsables entre autres de l'organisation des opérations terroristes du 7 octobre. Des combats au sol, entre soldats israéliens et combattants du Hamas, se seraient d'ailleurs déroulés aux alentours de Beit Hanoun, dans le nord-est de l'enclave, et près d'El-Boureij, dans le centre.
La deuxième phase de la riposte d'Israël aux attaques terroristes du Hamas du 7 octobre a commencé vendredi vers 19 heures, heure française. Plongée dans le noir par l'État hébreu, sans électricité ni réseau téléphonique filaire ou mobile, la bande de Gaza a essuyé des bombardements aériens et des frappes d'artillerie d'une telle ampleur que certaines fenêtres de la ville israélienne d'Ashkelon, à 20 kilomètres de là, ont tremblé. Les bombardements se sont concentrés sur les zones de deux hôpitaux palestiniens : l'une située dans le quartier de Jabalia, dans le nord de l'enclave, et l'autre dans la ville de Gaza, près du célèbre hôpital Al-Shifa autour duquel, selon l'armée israélienne, le Hamas aurait creusé des tunnels pour rejoindre l'établissement et y cacher un centre d'opérations.
Des objectifs flous
De rares Palestiniens ont réussi à témoigner samedi matin, grâce à des cartes SIM occidentales ou israéliennes. En s'approchant entre autres de la barrière de sécurité qui entoure la bande de Gaza, ils ont pu capter du réseau. Ils ont décrit aux agences de presse une soirée et une nuit apocalyptiques. « Des centaines d'immeubles et de maisons ont été entièrement détruits », a précisé le porte-parole de la défense civile à Gaza, ajoutant que les bombardements avaient « changé le paysage » du nord du territoire. « Quand tout sera terminé, Gaza sera très différent », avait d'ailleurs prévenu Mark Regev, un haut conseiller du Premier ministre Benyamin Netanyahou, dans un entretien vendredi à MSNBC, une chaîne d'information continue diffusée aux États-Unis et au Canada.
Malgré l'ampleur des frappes vendredi et l'incursion de soldats dans le nord du territoire, l'opération terrestre de grande ampleur annoncée depuis trois semaines n'a pas commencé. Les objectifs militaires précis dans cette guerre urbaine, qui risque d'être meurtrière pour les soldats israéliens, restent d'ailleurs flous. Mais le traumatisme est tel en Israël, après les massacres du 7 octobre et les failles de l'armée et du renseignement, que les autorités veulent enfin se montrer capables de rétablir le rapport de force militaire en leur faveur. Hier, elles ont promis de poursuivre leurs opérations « jusqu'à nouvel ordre ». Depuis le début de la guerre, plus de 7 300 Gazaouis ont été tués, dont 3 500 enfants. Plus de 400 Palestiniens seraient morts depuis vendredi soir, mais le black-out du territoire empêche pour le moment d'avoir des chiffres fiables.
Le porte-parole de l'armée israélienne a aussi rappelé aux Gazaouis de quitter le nord de leur territoire pour se réfugier au sud du Wadi Gaza : « Votre fenêtre d'action se ferme, déplacez-vous vers le sud pour votre propre sécurité. Ce n'est pas une simple précaution, c'est un appel urgent. » Depuis les premiers appels à évacuer le Nord il y a deux semaines, des frappes ont pourtant visé des civils dans le centre et le sud de l'enclave, où près de 1 million de Gazaouis - sur les 2,3 millions d'habitants - se sont déplacés et survivent aujourd'hui dans des conditions catastrophiques. « Effondrement total », « avalanches de souffrances humaines », les différentes agences de l'ONU alertent sur la situation humanitaire à Gaza et tentent de faire pression sur le cabinet de guerre de Netanyahou pour qu'il stoppe ces opérations. Sans succès. ■