Daech contrôle un territoire plus restreint qu'en 2014

Par Giulietta Gamberini  |   |  786  mots
Un "impact financier négatif" sur l'Etat islamique dû à la perte de cet important poste de frontière avait été constaté "avant l'intensification récente des frappes aériennes contre les capacités de production de pétrole du groupe", observe un analyste de IHS.
L'organisation terroriste et autoproclamé Etat islamique a subi des pertes significatives de son territoire (-14% de surface) surtout au Nord de la Syrie, constate l'institut d'analyses IHS. Les Kurdes syriens ont en revanche élargi leur territoire contrôlé de 186%.

Malgré l'attention médiatique croissante que Daech a su attirer en multipliant exécutions et attentats, son territoire s'est resserré en 2015. Et ce "de manière continue mois après mois", affirme l'institut d'analyses IHS, sur le fondement d'"informations publiquement accessibles incluant réseaux sociaux et sources locales".

Le territoire aujourd'hui contrôlé par l'autoproclamé Etat islamique, en Iraq et Syrie, mesure 78.000 kilomètres carrés : à savoir 14% (12.800 kilomètres carrés) de moins qu'en 2014, précise IHS, qui a publié lundi 21 décembre les résultats d'observations menées entre le 1er janvier et le 14 décembre 2015.

Des pertes surtout au Nord de la Syrie et en Irak

Les pertes de territoire les plus significatives ont notamment été relevées au long de la frontière septentrionale de la Syrie, qui la sépare de la Turquie, notamment autour de la ville de Tal Abyad qui constituait le principal point d'accès de Daech au territoire turc depuis Raqqa. Un "impact financier négatif" sur l'organisation terroriste dû à la perte de cet important poste de frontière avait été constaté "avant l'intensification récente des frappes aériennes contre les capacités de production de pétrole du groupe", observe un analyste d'IHS, Columb Strack.

Mais d'autres "pertes substantielles" ont aussi été subies par Daech en Iraq : notamment celles de la ville de Tikrit, de la raffinerie de Baiji , et d'une partie de la principale de l'autoroute reliant Raqqa et Mosul, "qui complique le transfert de marchandises et de combattants entre les deux plus grandes villes contrôlées par Daech", ajoute Columb Strack.

Gains et pertes de territoire pour Daech en 2015. Cliquer sur l'image pour l'agrandir.

Les Kurdes, un obstacle plus qu'un objectif pour Daech

En revanche, les conquêtes les plus significatives du groupe terrorise en 2015 ont été réalisées dans l'Ouest de la Syrie, suite à l'offensive quasi simultanée lancée en mai contre Palmyre et Ramadi. C'est justement à cause de ces attaques, ayant exigé un redéploiement d'hommes (du Nord à l'Ouest et ensuite de Raqqa à Tal Abyad), que Daech a perdu la partie septentrionale de la Syrie, explique IHS, soulignant :

"Cela indique que l'Etat islamique était débordé, et aussi que contrôler le territoire kurde est considéré comme moins important qu'expulser le gouvernements syrien et irakien des terres traditionnellement sunnites."

"Les analyses géospatiales de nos données montrent que l'activité de l'Etat islamique en dehors des zones qu'il contrôle est fortement concentrées autour de Bagdad et Damas, et beaucoup moins dans le territoire kurde. Les Kurdes semblent représenter surtout un obstacle pour l'Etat islamique, plutôt qu'un objectif en soi", ajoute IHS.

Le gouvernement syrien récupère un peu grâce à la Russie

Les Kurdes syriens apparaissent ainsi être les "grands gagnants" de l'années 2015, comparés à Daech, mais aussi à leurs frères et sœurs d'Irak, aux gouvernements irakien et syrien et aux rebelles sunnites syriens, relève l'institut d'analyse. Non seulement "ils ont établi leur contrôle sur quasiment tous les territoires syriens traditionnellement kurdes", en élargissant  les zones dominées de 186%. Ils représentent aussi "la composante la plus large des Forces démocratiques syriennes", qui aux yeux des Etats-Unis devront constituer l'élément clé en cas d'envoi de troupes au sol contre Daech en 2016, note IHS.

Quant au gouvernement syrien, il "est parvenu à renverser quelques-unes des pertes territoriales souffertes auparavant, grâce à l'intervention militaire de la Russie en septembre". Toutefois, selon IHS, le gouvernement syrien ne contrôle que 30.000 kilomètres carrés, "ce qui constitue une perte nette globale de 16% de ses terres en 2015", souligne IHS.

Un "califat éloigné" en Indonésie?

Le constat d'un rétrécissement du territoire contrôlé par Daech n'empêche pas d'autres pays de s'inquiéter. L'Australie a notamment lancé mardi 22 décembre une alerte quant au risque de création par l'organisation terroriste d'un "califat éloigné" en Indonésie, en tentant d'accroître sa présence et ses activités dans le pays musulman le plus peuplé du monde. Interrogé par le journal The Australian au lendemain d'une rencontre avec des ministres et responsables de la police australiens et indonésiens, le ministre australien de la Justice George Brandis a expliqué :

"L'Etat islamique a déclaré son intention d'établir des califats au-delà du Proche-Orient, en fait des califats de province. Il a identifié l'Indonésie comme le site de ses ambitions."

Les autorités indonésiennes ont d'ailleurs annoncé avoir déjoué un attentat suicide projeté à Jakarta pour le Nouvel An. Les autorités australiennes estimeraient cependant que les chances de réussite d'un tel projet d'élargissement de Daech seraient peu nombreuses, nuance The Australian, cité par Europe 1.