Élections aux îles Salomon : un aspirant Premier ministre promet d'abolir le pacte avec la Chine

L'un des principaux candidats au poste de Premier ministre des îles Salomon a déclaré ce jeudi qu'il abolirait, s'il est élu, le pacte de sécurité qui lie l'archipel à la Chine. Le résultat de cette élection est très attendu car il pourrait avoir un impact sur la situation sécuritaire dans le Pacifique, ce petit pays étant au cœur d'une bataille diplomatique intense opposant la Chine aux puissances occidentales.
L’organisation du scrutin a représenté un défi logistique pour les îles Salomon, pays de quelque 720.000 habitants répartis sur des centaines d'îles volcaniques et d'atolls coralliens.
L’organisation du scrutin a représenté un défi logistique pour les îles Salomon, pays de quelque 720.000 habitants répartis sur des centaines d'îles volcaniques et d'atolls coralliens. (Crédits : CHINA STRINGER NETWORK)

Au lendemain des élections qui doivent renouveler le Parlement et choisir le Premier ministre des îles Salomon, le dépouillement des votes est toujours en cours. Il faut dire que l'organisation du scrutin a représenté un défi logistique pour l'archipel, pays de quelque 720.000 habitants répartis sur des centaines d'îles volcaniques et d'atolls coralliens, où les urnes et les bulletins ont été apportés en bateaux, avions et hélicoptères. Le résultat est en tout cas attendu pour son impact sur la situation sécuritaire dans cette région du globe.

Pour rappel, les îles Salomon sont entrées dans l'orbite chinoise sous la houlette du Premier ministre Manasseh Sogavare, qui a signé un pacte de sécurité avec Pékin en 2022. Bien que les détails de cet accord demeurent obscurs, les États-Unis et l'Australie, partenaires traditionnels de l'archipel, craignent qu'il ne pose la première pierre d'une base militaire chinoise permanente dans le Pacifique Sud, qui pourrait changer la donne en matière de sécurité régionale.

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« Si nous sommes au pouvoir, nous abolirons le traité de sécurité. Nous ne pensons pas qu'il soit bénéfique pour les îles Salomon », a déclaré Peter Kenilorea à l'AFP ce jeudi, depuis son village sur l'île de Malaita.

Cet ancien juriste des Nations unies, considéré comme un membre de l'élite politique de l'archipel, est l'un des principaux aspirants au poste de Premier ministre. Il a déploré que les îles Salomon soient devenues une pomme de discorde entre la Chine et les États-Unis. « Cela nous a donné une notoriété pour de mauvaises raisons (...) Nous n'avons pas vraiment besoin d'attiser des tensions inutiles ici », a-t-il ajouté.

Cette position tranche avec celle du Premier ministre sortant, qui a promis de renforcer les liens avec la Chine s'il est réélu. Elle est par contre commune à l'un des autres candidats en lice, Matthew Wale, un expert-comptable et militant des droits humains.

Les États-Unis et la Chine accusés d'ingérence

Signe d'un scrutin sous pression, les bulletins de vote ont été acheminés par camion dans un centre de dépouillement très protégé dans la capitale Honiara, sous la surveillance d'équipes internationales composées de soldats fidjiens en uniforme et de policiers australiens.

Des médias d'État chinois ont suggéré que les États-Unis pourraient orchestrer des émeutes pour empêcher le dirigeant sortant de revenir au pouvoir. Des rumeurs qualifiées de « tromperie éhontée » par l'ambassadrice des États-Unis, Ann Marie Yastishock.

« Nous réfutons fermement les allégations faites par des organes de propagande connus qui prétendent que l'USAID (ndlr : l'Agence américaine pour le développement) et le gouvernement américain ont cherché à influencer » les élections, a-t-elle déclaré dans un communiqué.

Les États-Unis ne sont pas les seuls à être accusés d'essayer de s'immiscer dans ce scrutin. Daniel Suidani, l'une des principales figures de l'opposition dans l'archipel, a pointé du doigt la Chine en début de semaine dans une interview à l'AFP. Il a assuré que des acteurs liés à Pékin travaillent en coulisses pour aider à maintenir les élus pro-Chine au Parlement. « Ils sont très, très impliqués dans ce gouvernement », a-t-il déclaré. « Ils sont impliqués dans d'autres choses, il n'y a donc aucun doute qu'ils doivent être impliqués dans les élections. C'est ce qu'ils font depuis un certain temps ». Ce qu'a nié le principal concerné. « La Chine mène toujours une politique de non-ingérence dans les affaires intérieures » d'autres pays, a répondu dans la foulée Lin Jian, un porte-parole de la diplomatie chinoise.

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Un suspens qui pourrait durer

Reste que le calme prévaut dans le pays, pour le moment. Signe du climat de tension, l'ambassade de Chine, située dans le centre de la ville d'Honiara, a en tout cas érigé à la hâte cette semaine une clôture temporaire en acier devant le bâtiment afin de se préparer à de possibles violences.

« Tout est pacifique », rassure Jasper Anisi, responsable en charge des élections.

Ce qui n'a pas toujours été le cas dans le passé, où les précédentes élections ont souvent débouché sur des violences. En 2006, par exemple, des forces internationales de maintien de la paix avaient été déployées pour réprimer des violences post-électorales, et le Premier ministre Snyder Rini avait été chassé au bout de huit jours seulement. Et précédemment, en 2000, le Premier ministre Bart Ulufa'alu avait été contraint à la démission après avoir été enlevé par des hommes armés.

Même après le dépouillement de l'ensemble des votes, les îles Salomon pourraient toutefois ne pas connaître leur nouveau Premier ministre avant plusieurs semaines. Les élections dans l'archipel ont ceci de particulier que les électeurs ne choisissent pas directement leur Premier ministre : ils élisent des représentants qui négocient à huis clos pour former une coalition et choisir un dirigeant. Un processus qui peut durer des semaines.

(Avec AFP)

Commentaire 1
à écrit le 18/04/2024 à 22:00
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"Élections aux îles Salomon : un aspirant Premier ministre promet d'abolir le pacte avec la Chine" Comme le dit l'adage, les promesses n'engagent que ceux qui y croient...

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