Le commerce mondial devrait ralentir fortement en 2019 et 2020

Les échanges commerciaux à l'échelle mondiale ne devraient ainsi croître que de 1,5% cette année contre 3,8% en 2018, selon une étude d'Euler Hermes. Les économistes de l'assureur-crédit envisagent un changement de régime à long terme du commerce mondial.
Grégoire Normand
Ce ralentissement a davantage affecté les économies les plus ouvertes et exposées aux échanges internationaux comme l'Allemagne ou les trade hubs asiatiques que sont le Japon, la Corée du Sud, Singapour et Hong Kong indique Euler Hermes.
"Ce ralentissement a davantage affecté les économies les plus ouvertes et exposées aux échanges internationaux comme l'Allemagne ou les "trade hubs asiatiques" que sont le Japon, la Corée du Sud, Singapour et Hong Kong" indique Euler Hermes. (Crédits : REUTERS/Fabian Bimmer)

L'horizon ne se dégage pas vraiment pour le commerce mondial. Selon les dernières prévisions d'Euler Hermes publiées ce mercredi 20 novembre, la croissance des échanges de biens et services devrait augmenter de seulement 1,5% en 2019 et 1,7% en 2020. La persistance des tensions entre la Chine et les Etats-Unis, la perspective du Brexit à la fin du mois de janvier prochain, et le ralentissement des grandes économies dans la zone euro amènent les économistes à penser que le commerce mondial est entré dans un cycle de croissance faible. À titre de comparaison, la moyenne du rythme des échanges était de 3,6% entre 2013 et 2018.

"Pas de reprise à venir"

Le commerce de biens à l'échelle de la planète est entré en récession en fin d'année 2018 avec plus de deux trimestres en territoire négatif. Depuis, la situation s'améliore légèrement selon l'indice construit par Euler hermes mais il reste toujours en contraction.

"Le pire est sûrement derrière nous en termes de surprises négatives et de leur impact sur le commerce des biens et services. Il pourrait y'avoir des gains à l'export notamment pour la Chine et les Etats-Unis mais il n'y aura pas de reprise dynamique. Cette faible reprise s'explique pour deux raisons :  un premier accord entre les Etats-Unis et la Chine assez superficiel et une année politique très chargée en 2020 avec notamment l'élection présidentielle aux Etats-Unis", a expliqué l'économiste Georges Tib.

Face aux nombreuses incertitudes persistantes, les investisseurs devraient se montrer très prudents et la demande mondiale ne devrait pas accélérer en 2020. La croissance  de l'économie planétaire devrait marquer le pas à 2,4% l'année prochaine selon les dernières projections de l'assureur contre 2,9% en 2019 (prévisions OCDE de septembre dernier).

La Chine et l'Allemagne, premières victimes de ce ralentissement

D'après les travaux réalisés par les économistes, la Chine, l'Allemagne et Hong Kong ont été les principales victimes des droits de douanes en 2019. Le poids du commerce extérieur dans la valeur ajoutée de ces pays et leur exposition aux soubresauts du commerce mondial peuvent expliquer en grande partie toutes ces difficultés. Les pertes enregistrées par la Chine à l'export devraient frôler les 80 milliards de dollars rien qu'en 2019. Lors d'un récent point presse, l'économiste Christine Peltier, spécialiste de la Chine et des économies émergentes chez BNP-Paribas, rappelait qu'il y avait "un choc externe avec la stagnation des exportations sous l'effet des hausses des droits de douane américains et de l'affaiblissement de la demande mondiale mais aussi un ralentissement interne avec un coup de frein de l'investissement  et de la consommation des ménages [...] Il y a à nouveau un fléchissement de la croissance en Chine au quatrième trimestre avec un effondrement des ventes automobiles, du commerce de détail et des ventes de services".

En Allemagne, le moteur industriel continue de souffrir sérieusement. Même si la première économie de la zone euro a échappé de peu à la récession technique au troisième trimestre, le PIB outre-Rhin affiche une hausse de seulement 0,1% par rapport au second trimestre. Les voix se multiplient d'ailleurs en Allemagne pour demander au gouvernement de relancer la croissance par l'investissement, en profitant des taux bas. Lundi dernier, la fédération du secteur industriel BDI s'était notamment associée à la fédération allemande des syndicats, DGB, pour demander "au moins 450 milliards d'euros" d'investissements sur dix ans.

La France tire son épingle du jeu

Dans ce contexte morose, la France s'en sort mieux que la plupart des grandes économies de l'Union monétaire européenne. L'économie tricolore a notamment profité d'un effet d'aubaine. En 2019, "les entreprises françaises se sont substituées aux entreprises chinoises comme fournisseurs d'entreprises américaines à hauteur de 3,8 milliards d'euros et en parallèle, elles ont capté 1,4 milliard d'euros de débouchés chinois. Cela s'explique en grande partie par la performance du secteur aéronautique", précise Georges Dib.

Malgré ces bonnes nouvelles, les perspectives pourraient s'assombrir. Au début du mois d'octobre, l'organisation mondiale du commerce (OMC) a autorisé les Etats-Unis à muscler son arsenal de sanctions douanières contre l'Union européenne. Désormais, Airbus peut toujours vendre des avions outre-Atlantique mais avec un prix majoré de 10%. Au total, plus de 150 produits provenant de l'Union européenne sont dans le viseur des autorités américaines.

> Lire aussiAprès le "go" de l'OMC, Washington passe à l'acte et taxe les Airbus à 10%

La signature des accords régionaux au ralenti

La remise en cause du multilatéralisme par les grandes puissances économiques mondiales et la contestation grandissante des accords de libre-échange dans l'opinion publique ont rebattu les cartes du commerce international. Depuis le début des années 2000, de nombreux accords commerciaux régionaux ont été signés à l'image du Jefta, l'accord entre l'Union européenne et le Japon. Malgré une tendance à la hausse, le rythme de croissance des accords régionaux est à un niveau historiquement bas. "Entre 2017 et 2019, les pays ont signé trois fois moins de grands accords commerciaux régionaux qu'entre 2015 et 2017", rappellent les auteurs du document.

capture accords régionaux

Grégoire Normand

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Commentaires 5
à écrit le 22/11/2019 à 9:55
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L'avenir aux USA et donc du marche mondial sera determine apres les elections. Trump risque fort d'etre degage, tout sera detricote et redeviendra comme avant.

à écrit le 21/11/2019 à 16:13
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On nous accuse de polluer, et on nous intime de faire des efforts à coup de taxes carbones. Et bien qu'ils commencent par appliquer une taxe carbone dissuasive sur le commerce international.

à écrit le 21/11/2019 à 11:56
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Trump aura fait plus contre la pollution en trois ans que tous les écologistes du monde en trente, j'insiste.

à écrit le 21/11/2019 à 8:57
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Trump aura fait plus dans la lutte contre la pollution que tous les écologistes du monde réunis, amis de la pensée binaire passez votre chemin !

à écrit le 20/11/2019 à 17:11
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Oui, et alors ? Ça ne peut être que bénéfique pour aller vers un système économique moins basé sur les transports, relocalisé, moins polluant. La croissance pour "la croissance" qui détruit l'environnement, gaspille les ressources naturelles, qui s'a...

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