L'Union européenne engage un nouveau bras de fer avec la Chine. Après l'automobile, le ferroviaire et les panneaux solaires, Bruxelles la soupçonne d'avoir octroyé des subventions à des fabricants chinois d'éoliennes, faussant la concurrence sur le marché européen.
« Aujourd'hui (mardi, ndlr), nous lançons une nouvelle enquête sur les fournisseurs chinois d'éoliennes. Nous étudions les conditions de développement de parcs éoliens en Espagne, en Grèce, en France, en Roumanie et en Bulgarie », a déclaré la commissaire européenne à la Concurrence, Margrethe Vestager, lors d'un discours à l'Université de Princeton aux États-Unis, ce mardi 9 avril. La responsable n'a toutefois pas fourni de précisions sur les entreprises ni sur les procédures concernées.
Déjà plusieurs enquêtes contre des entreprises chinoises
Cette enquête s'inscrit en tout cas dans le cadre des nouvelles règles européennes entrées en vigueur mi-2023. Leur but : empêcher les subventions de pays tiers soupçonnées de créer une concurrence déloyale dans le cadre d'appels d'offres.
Une première enquête suivant cette nouvelle réglementation a ainsi été ouverte mi-février, ciblant une filiale du constructeur ferroviaire chinois CRRC, numéro un mondial du secteur. Ce groupe étatique, candidat pour la fourniture de trains électriques en Bulgarie, s'était finalement retiré de l'appel d'offres fin mars.
Le 3 avril, la Commission a annoncé une deuxième enquête, dans le cadre du même instrument, visant deux consortiums candidats pour concevoir, construire et exploiter un parc photovoltaïque en Roumanie. Le premier ciblé associe le groupe roumain Enevo et une filiale - basée en Allemagne - du géant chinois Longi, premier fabricant mondial de cellules photovoltaïques. Le second consortium ciblé concerne deux filiales entièrement contrôlées par le même groupe étatique chinois, Shanghai Electric, sous étroite supervision du gouvernement central.
De son côté, la Chine a jusqu'à présent balayé les inquiétudes au sujet de son soutien appuyé à ses industries. Mais la Chambre de commerce chinoise dans l'UE s'est néanmoins dite « gravement préoccupée » par ces enquêtes, exprimant son « sérieux mécontentement face (...) à l'usage de ce règlement comme nouvel outil de coercition économique » dans les technologies vertes. L'organisation dénonce « un pouvoir discrétionnaire excessif accordé à la Commission » et des « définitions trop larges et ambiguës » concernant les aides étrangères « imposant des charges excessives et potentiellement discriminatoires à l'égard des entreprises étrangères, y compris chinoises ».
Dans un autre cadre réglementaire, l'UE a lancé en septembre 2023 une enquête sur des subventions publiques chinoises aux automobiles électriques. Selon elle, Pékin leur a octroyé des aides illégales, comme des prêts à taux favorables et des exonérations fiscales, ce qui leur a permis de vendre leurs véhicules sur le marché européen à des prix jugés « artificiellement bas ».
La Chine aussi dans le viseur américain
Les subventions chinoises ne sont pas seulement vues d'un mauvais œil par l'UE. Outre-Atlantique aussi, la critique est de mise. Ces dernières semaines, la secrétaire américaine au Trésor Janet Yellen a régulièrement mis en garde contre les vastes subventions du gouvernement chinois dans les technologies, qu'il s'agisse des énergies vertes, des véhicules électriques ou encore des batteries.
Des inquiétudes formulées encore vendredi dernier, lors d'une visite à Pékin. « Les aides directes et indirectes du gouvernement sont en train de conduire à une capacité de production qui excède largement la demande intérieure de la Chine, ainsi que ce que le marché mondial peut supporter », a-t-elle dit à des entrepreneurs américains travaillant dans ce pays.
« Les surcapacités peuvent conduire à de gros volumes d'exportations à des prix en baisse » et à une « surconcentration des chaînes d'approvisionnement, posant un risque pour la résilience économique mondiale », a-t-elle ajouté. Ce qui représente, selon elle, une menace pour la viabilité des entreprises américaines et d'autres pays.
(Avec AFP)