Ukraine  : Zelensky demande plus d'armes au risque de caler face à la Russie

Tandis que l'aide américaine de 60 milliards de dollars en faveur de l'Ukraine est toujours bloquée au Congrès, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a lancé samedi un appel pressant à ses alliés occidentaux pour qu'ils livrent plus d'équipements militaires au pays, en insistant sur les armes de longue portée. Et ce, alors que la Russie vient de remporter une victoire significative dans l'est de l'Ukraine, à Avdiïvka.
(Crédits : GLEB GARANICH)

[Article mis à jour le 17/02/2024 à 17h07]

Le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, a déploré samedi matin à Munich le manque actuel d'armes de longue portée et de munitions à disposition de son armée, qui favorise selon lui la progression des troupes russes dans leur offensive contre son pays.

« Le fait de maintenir l'Ukraine dans un déficit artificiel d'armes, en particulier d'artilleries et de capacités à longue portée, permet à Poutine de s'adapter à l'intensité actuelle de la guerre », a-t-il affirmé au deuxième jour de la Conférence sur la sécurité à Munich, dans le sud de l'Allemagne, devant le gotha de la géopolitique et de la défense.

Si le dirigeant a été sonné par le retrait forcé de l'armée, annoncé dans la nuit, de la ville ukrainienne d'Avdiïvka, il n'en a rien laissé paraître lors de son intervention. Mais son message est clair : « nos actions ne sont limitées que par la quantité et la portée de l'éventail de nos forces - ce qui ne dépend pas de nous », a-t-il lancé aux responsables réunis pour cette grand-messe de la diplomatie mondiale, alors que l'Ukraine va entrer dans sa troisième année de guerre.

« Nous pouvons récupérer nos terres. Et Poutine peut perdre. Cela s'est déjà produit plus d'une fois sur le champ de bataille », a-t-il fait valoir.

Volodymyr Zelensky prêt à emmener Donald Trump sur le front

Il attend surtout, et depuis des mois, le déblocage d'une aide de quelque 60 milliards de dollars décidée par le gouvernement de Joe Biden pour l'aider à se ravitailler en armes et munitions, qu'il a qualifiée samedi de « vitale ». En effet, le Sénat américain a validé une nouvelle enveloppe débloquant 95 milliards de dollars pour l'Ukraine, Israël et Taïwan, mais son adoption est suspendue au bon vouloir des partisans de Donald Trump à la Chambre des représentants, qui refusent en l'état d'examiner le texte.

Dans ce contexte, Volodymyr Zelensky s'est déclaré prêt, ce samedi, à emmener Donald Trump sur le front de la guerre en Ukraine. « Je l'ai invité publiquement, mais tout dépend de ses souhaits », a déclaré le chef de l'État ukrainien à la tribune de la Conférence sur la sécurité de Munich, dans le sud de l'Allemagne, qui rassemble l'élite de la géopolitique et de la défense mondiale jusqu'à dimanche. « Si Donald Trump vient, je suis prêt à aller avec lui sur le front », a-t-il poursuivi.

Et d'ajouter : « Je pense que si nous dialoguons sur la manière de terminer la guerre, nous devons montrer aux décideurs ce que signifie la vraie guerre, pas sur Instagram ». En juillet dernier, Donald Trump avait affirmé qu'il serait capable de mettre fin au conflit « en 24 heures » s'il était réélu en novembre.

Le chef de l'Otan presse les Etats-Unis de livrer « ce qu'ils ont promis »

Le chef de l'Otan, Jens Stoltenberg, a également accentué la pression : les Etats-Unis doivent livrer « ce qu'ils ont promis » à l'Ukraine, a-t-il insisté samedi pour débloquer la fameuse enveloppe.

« Il est vital et urgent que les États-Unis se décident sur la série de mesures pour l'Ukraine, parce qu'elle ont besoin de ce soutien », a-t-il souligné au deuxième jour de la Conférence sur la Sécurité qui se tient à Munich, dans le sud de l'Allemagne.

Il y a quelques jours, le président Joe Biden a lui-même appelé les républicains de la Chambre à voter sur le projet de loi dans des remarques de la Maison Blanche, affirmant qu'une « minorité des voix les plus extrêmes de la Chambre » ne devrait pas être autorisée à bloquer le projet de loi. Un échec dans le déblocage de cette aide au Congrès américain reviendrait à « faire un cadeau à Poutine », a quant à elle averti vendredi la vice-présidente américaine, Kamala Harris, dans un discours à Munich. Celle-ci a d'ailleurs tenté de rassurer Volodymyr Zelensky, lors d'entretiens à Munich, là même où elle l'avait déjà rencontré il y a deux ans, « cinq jours avant l'invasion russe », a-t-elle rappelé.

En l'état, le projet de loi comprend donc 60 milliards de dollars pour soutenir l'Ukraine. Une grande partie de cette somme prendrait la forme d'armes et d'équipements militaires achetés à des sociétés de défense américaines et permettrait de reconstituer les stocks américains après deux ans de transferts pour la lutte de l'Ukraine contre les envahisseurs russes, selon l'agence de presse Reuters.

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Accords de sécurité bilatéraux

Pour rappel, Volodymyr Zelensky a par ailleurs signé vendredi à Berlin puis Paris des accords de sécurité bilatéraux inscrivant dans la durée l'aide de l'Allemagne et de la France à l'Ukraine, avec une dizaine de milliards de soutien militaire promis pour 2024. Dont trois milliards d'euros d'aide supplémentaire cette année pour la France, selon Emmanuel Macron. Côté allemand, le document signé contient une aide militaire supplémentaire et immédiate d'un montant de 1,1 milliard d'euros, qui est une tranche des sept milliards de soutien déjà annoncés par l'Allemagne pour 2024.

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Ces soutiens interviennent après celui du Royaume-Uni en janvier tandis qu'une aide de 60 milliards d'euros est bloquée aux Etats-Unis. Ils interviennent aussi au moment où les forces ukrainiennes sont en difficulté. Dans l'est du pays, Avdiïvka est l'épicentre de « combats acharnés » et menace désormais de tomber après des mois d'assauts russes.

Vendredi, Jens Stoltenberg a ainsi mis en avant la hausse « sans précédent » des investissements de défense. « D'ici à fin 2024, les Alliés européens et le Canada auront consenti un effort supplémentaire de plus de 600 milliards de dollars depuis l'adoption de l'engagement en matière d'investissements de défense », a-t-il déclaré, ajoutant que cette année, 18 Alliés devraient consacrer 2 % de leur PIB à la défense.

Mais Kiev souhaite également que Berlin l'équipe avec des Taurus, l'un des missiles les plus modernes et les plus efficaces de l'armée de l'air allemande. Le gouvernement allemand y rechigne, de crainte que le territoire russe soit également touché par ces armes de précision, entraînant potentiellement une escalade du conflit.

Le chancelier, Olaf Scholz, a rappelé que l'Allemagne - deuxième contributeur en valeur absolue après les Etats-Unis - était un soutien clé de la défense de l'Ukraine et venait encore de le prouver en signant, vendredi, l'accord de sécurité bilatéral ancrant dans la durée l'aide à l'Ukraine.

Retrait de l'armée ukrainienne de la ville d'Avdiïvka

Cette Conférence sur la sécurité de Munich et la tournée européenne de Volodymyr Zelensky pour garantir à son pays un soutien durable intervient à un moment critique pour l'Ukraine et ses soldats qui sont sous la pression des attaques russes dans l'est, autour de la ville d'Avdiïvka. En effet, l'armée ukrainienne a été contrainte d'abandonner samedi la ville d'Avdiïvka, dans l'est du pays, concédant à la Russie sa plus grande victoire symbolique après l'échec de la contre-offensive lancée par Kiev l'été dernier.

« Conformément à l'ordre reçu, (nous nous) sommes retirés d'Avdiïvka pour aller sur des positions préparées d'avance », a annoncé le général ukrainien Oleksandre Tarnavsky, qui commande cette zone, dans un message publié sur le réseau social Telegram la nuit de vendredi à samedi.

Confrontée à un manque de moyens croissant en raison notamment du blocage de l'aide militaire américaine, l'Ukraine pouvait difficilement éviter ce retrait face à la Russie qui, forte de davantage de soldats et de munitions, poussait ses troupes pour obtenir une conquête à quelques jours du deuxième anniversaire du début de l'invasion, le 24 février.

« Dans la situation où l'ennemi avance en marchant sur les cadavres de ses propres soldats et à dix fois plus d'obus [...] c'est la seule bonne décision », a poursuivi le général Tarnavsky. Les forces ukrainiennes ont ainsi évité l'encerclement, près de cette cité industrielle largement détruite, a-t-il assuré.

Il s'agit d'une première grande décision du nouveau commandant en chef des armées ukrainiennes Oleksandre Syrsky après sa nomination à ce poste le 8 février. Il l'a justifiée par la volonté de « préserver » la vie de ses soldats.

Avdiïvka, qui comptait environ 34.000 habitants avant l'invasion russe lancée en février 2022, a une valeur symbolique importante. La ville est aujourd'hui en grande partie détruite mais quelque 900 civils y demeurent, selon les autorités locales. Moscou espère que sa prise rendra plus difficiles les bombardements ukrainiens sur Donetsk.

La tournée européenne de Volodymyr Zelenski a également été assombrie par l'annonce de la mort en prison d'Alexeï Navalny, l'opposant numéro un à Vladimir Poutine, éteignant un peu plus tout espoir d'ouverture à Moscou.

Lire aussiSoutien à l'Ukraine : Volodymyr Zelensky en visite à Berlin et à Paris pour signer deux accords de sécurité

(Avec agences)

Commentaires 9
à écrit le 18/02/2024 à 10:22
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En fin de compte, cela ne demande que des morts et de la souffrance supplémentaire car nous ne pouvons dire, à l'heure d'aujourd'hui, qu'il y a encore des patriotes !

à écrit le 17/02/2024 à 20:53
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A l'évidence les américains n'ont que faire des jérémiades ukrainiennes au regard de l'agression migratoire massive sud américaine qu'ils subissent à la frontière avec le Mexique. Par ailleurs, l'Ukraine est riche de ses oligarques et de son égl...

à écrit le 17/02/2024 à 16:22
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il faut pas rever. Trump joue la carte poutine et bloque toute livraison. Si Trump perd en novembre elles reprendront. s il gagnent, les chars russes seront au mieux a la frontiere polonaise, au pire a la frontiere allemande, Poutine se faisant les p...

le 17/02/2024 à 18:22
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C'est beau l'espoir . ....mdr

le 17/02/2024 à 18:53
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La Russie est un pays pauvre et sous-developpé qui fait fuir les gens de talent et n'ira nul part. Aucun entrepreneur veut créer de oa richesse dans un pays où l'état fait ce qu'il veut . Poutine a besoin d'un ennemi pour exister que nous lui offrons...

le 17/02/2024 à 21:34
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@Adieu BCE Ne vous déplaise la fédération de Russie est riche d'oligarques opportunistes qui prospèrent aussi bien sur le territoire russe que sur le territoire européen (cf. scandale Danske Bank) sans aucune entrave (cf. exemption danoise sur ...

à écrit le 17/02/2024 à 13:58
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L'ukraine c'est où ? c'est quoi ? Dans L'OTAN ? En Europe ? Une démocratie?

le 17/02/2024 à 15:21
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La Russie c’est où, c’est quoi? C’est dans l’OTAN? C’est une démocratie?

le 17/02/2024 à 15:53
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@jc - Si vous ne savez rien, ne dites rien.

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