Il n'y avait pour l'un comme pour l'autre aucune évidence à se retrouver là. L'entrepreneuse Flora Ghebali et le mathématicien Cédric Villani font tous deux campagne pour Marie Toussaint inaudible, en nette baisse dans les sondages, et qui vit des semaines difficiles. Dans cette perspective, aucun des deux n'a de chances sérieuses d'être élu au Parlement européen le 9 juin, mais leur présence vise à prouver la capacité des écologistes à s'ouvrir à de nouvelles têtes.
Ils ont en commun d'être passés par la Macronie et d'en avoir été déçus. Les profils du médaillé Fields et de la spécialiste de l'économie sociale et solidaire ont intéressé Marie Toussaint, qui avait déposé une motion au congrès du parti avec pour titre le slogan de McDo : « Venez comme vous êtes. »
De flexitarien à végétarien
Après une dispute avec Emmanuel Macron en 2020, Cédric Villani avait quitté La République en marche. Et c'est lors du premier confinement que l'ancien député de l'Essonne raconte s'être « mis en alignement » avec lui-même : il est passé de flexitarien à végétarien, il s'est plongé dans des tas d'ouvrages scientifiques sur les animaux d'élevage, il a supprimé l'application G7 de son téléphone. De cette mue, il a fini par conclure que « les écolos sont les plus sensibles aux questions scientifiques ». Mi-mars, il a pris la présidence de la Fondation de l'écologie politique, un cercle de réflexion qui nourrit les travaux des Écologistes. « Mon boulot, c'est de faire l'intellectuel en politique », résume-t-il.
L'arrivée de Flora Ghebali, qui est passée par la communication de l'Élysée sous François Hollande, a suscité un tweet très désagréable de la part d'une militante qui a depuis été virée du parti. « Flora Ghebali, c'est l'incarnation de l'écologie de marché qui résume le non-choix idéologique des écologistes », raille aussi Paul Vannier, responsable du pôle élections chez LFI.
La trentenaire est une entrepreneuse qui accompagne les dirigeants dans la transition écologique. « Je suis parisienne et je ne sais pas si je pourrai vivre ici ces quinze prochaines années. L'écologie n'est autre qu'une question de survie », plaide la jeune femme issue d'une famille de socialistes (son père, Eric Ghebali, est membre fondateur de SOS Racisme, et sa mère est l'animatrice Daniela Lumbroso). Elle est aussi chroniqueuse aux Grandes Gueules et vient tous les dimanches sur BFM. « On a peur de tout ce qu'on dit mais je n'ai pas envie de devenir une politicarde reloue. C'est ce qui explique la fuite des talents », souffle Flora Ghebali, classée par le magazine Forbes en 2021 parmi les 30 personnalités de moins de 30 ans les plus influentes en France.
Le temps des européennes, elle a mis de côté sa vie de chroniqueuse et mène sa campagne sur les réseaux sociaux. Sur Instagram, où elle est davantage suivie que Marie Toussaint, avec plus de 30 000 abonnés, elle poste de courtes vidéos dans lesquelles elle se prend des vents pendant qu'elle est en train de tracter, assure que « l'écologie, c'est pas un truc de babos en sarouel », ou compare encore Jordan Bardella à « du tofu, ça prend le goût que vous voulez lui donner ».
