Les amis allemands de Bardella et Le Pen

Pour élagir les rangs de son groupe au Parlement européen, le RN compte sur le parti allemand AfD. Mais la dernière polémique suscitée par les nationalistes pourrait freiner la stratégie de normalisation de Marine Le Pen en France.
Jules Pecnard
(Crédits : © IMAGO/dts Nachrichtenagentur via reuters)

Les dirigeants du Rassemblement National sont des pragmatiques. Au Parlement européen, ils savent que le poids du groupe auquel ils sont rattachés - Identité et Démocratie, qui représente aujourd'hui 59 sièges sur 705 - n'est pas dissociable de leur dynamique en France. Plus il restera marginal après les européennes du 9 juin, moins il servira de levier à la normalisation de Marine Le Pen, clé de voûte de sa stratégie présidentielle pour 2027. Crédité de 27,5 % des voix dans la dernière enquête Elabe pour La Tribune Dimanche, le RN pourrait passer de 19 à près d'une trentaine d'élus à Strasbourg. Son allié historique, le parti italien Lega de Matteo Salvini, qui en compte 24, est dans les choux sur le plan national. Son contingent pourrait être supplanté par celui d'Alternative für Deutschland (AfD), actuellement à 9 mais qui vise la vingtaine.

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Pour Marine Le Pen et le président du RN, Jordan Bardella, l'apport des amis allemands peut donc se révéler décisif. Or, ce sont eux qui, récemment, ont ramené les frontistes à leur marginalité. Le parti codirigé par Alice Weidel et Tino Chrupalla est dans la tourmente depuis que le site d'investigation Correctiv a révélé la présence de cadres AfD, le 25 novembre, à un raout avec des néonazis. Réuni près de Potsdam, le colloque aurait mis au pot, entre autres idées, celle d'une expulsion massive - 2 millions - d'Allemands d'origine étrangère « non assimilés » vers un « État modèle » en Afrique.

Dans la foulée, Marine Le Pen a tempêté. Elle sait combien le concept racialiste de « remigration » est associé à l'extrême droite radicale. Face à la presse hexagonale, le 25 janvier, la députée du Pas-de-Calais s'est dite en « opposition flagrante avec l'AfD » sur le sujet, évoquant de possibles « conséquences » sur la capacité des deux formations à collaborer. Elle a même rejeté, par avance, l'excuse des aléas inhérents à la gestion fédérale d'un parti allemand. Et puis, le 20 février, la veille de sa participation décriée à la cérémonie d'entrée au Panthéon du résistant communiste Missak Manouchian, Marine Le Pen a déjeuné discrètement avec Alice Weidel. Elle était flanquée de Thibaut François, chargé des questions internationales au RN, et de Jordan Bardella. Le patron du mouvement indiquait à son entourage il y a encore quelques mois que la question de l'appartenance de l'AfD au groupe ID « ne se pos[ait] pas ».

De fait, malgré la polémique, des membres de la délégation RN au Parlement européen ménagent l'encombrant partenaire en rappelant qu'il n'y a pas de « remigration » dans son programme. Cela n'empêche pas quelqu'un comme Maximilian Krah, tête de liste AfD aux européennes, d'exalter le concept dans son manifeste, Allemagne : plaidoyer pour une droite identitaire. L'élu saxon - qui a préféré Éric Zemmour à Marine Le Pen en 2022 - veut restaurer « un ordre public qui soit culturellement allemand » tout en rendant le système social inaccessible aux immigrés, afin que les peuples puissent se maintenir « dans leur substrat ethnique ».

À l'image des atermoiements frontistes, un proche de Marine Le Pen remet au lendemain du 9 juin la question des alliances - « Le groupe, ce n'est rien qu'un outil ! » -, mais admet que d'autres mouvements puissent juger l'AfD radioactif. Quand on lui dit que le chef du FPÖ autrichien, ami potentiel au Parlement européen, défend également la « remigration », ce cadre nous répond : « Ça veut tout et rien dire... Mais je ne connais pas précisément le programme du FPÖ là- dessus. » Il reste trois mois au Rassemblement national pour se mettre à jour.

Jules Pecnard
Commentaires 3
à écrit le 25/02/2024 à 14:54
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Asinus asinum fricat. MLP s'en fout: après l'Ufraine reconquise, lorsque la Russie continuera vers l'Ouest, elle sera morte. Dommage pour les successeurs...

le 25/02/2024 à 22:08
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Même si on ne connaît pas le latin on voit bien le sens de ces 3 mots. Largement suffisant pour qualifier les extrêmes droites. Des ânes!

à écrit le 25/02/2024 à 9:44
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Sauf que vous ne savez pas avec qui Macron parle au téléphone non plus or l'oligarchie allemande est restée celle du troisième Reich.

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