Européennes : électeurs dubitatifs et record de candidats, un cocktail dangereux

Si les Français ont élu président un fervent défenseur de l’Europe, ils restent peu mobilisés sur la question des élections européennes, où quelque 33 listes vont s’affronter le 26 mai prochain. Un article de notre partenaire Euractiv.
33 listes vont participer au scrutin du 26 mai en France, un record.
33 listes vont participer au scrutin du 26 mai en France, un record. (Crédits : Reuters)

Pour la première fois depuis que la France élit des parlementaires européens, 33 listes ont été présentées officiellement selon le ministère de l'Intérieur. Ce qui signifie en théorie que les électeurs français se retrouveront le 26 mai devant 33 bulletins de vote - à supposer que toutes les listes parviennent à imprimer suffisamment de bulletins.

Cette subite envolée de l'offre politique traduit le malaise représentatif actuel : l'écart entre partis politiques et citoyens ne cesse de se creuser, ce qui motive de nouveaux aspirants en politiques flirtant avec les extrêmes. Seulement la moitié des listes relèvent de partis politiques modérés.

En 1999, le dernier scrutin européen qui s'était déroulé dans une circonscription unique avait vu 20 listes s'affronter. En 2014 lors des dernières élections, le scrutin s'était organisé sur 8 eurocirconscriptions, ce qui rend le comparatif difficile.

Un duo de tête

Depuis le début des sondages réalisés pour l'élection européenne et dans la suite logique de l'élection présidentielle, les partis de Marine Le Pen (Rassemblement national) et d'Emmanuel Macron (LREM) font la course en tête dans les intentions de vote, loin devant les partis traditionnels.

Depuis plusieurs mois, LREM ressort en tête dans ce duel entre les progressistes et les nationalistes, qui chacun des deux camps entretient. Mais pour la première fois, le RN a été donné cette semaine en tête des intentions de vote par une enquête de l'Ifop pour Paris Match CNews et Sud Radio ainsi que par l'institut OpinionWay, qui table sur 24% des voix en faveur du parti antieuropéen contre 21% pour LREM.

Lire aussi : Élections européennes : LREM et le RN au coude-à-coude

Le duel sur les enjeux européens entre le Rassemblement national et LREM devrait prendre un tournant pendant ce scrutin. Fervent défenseur de l'Europe, Macron a fait du sujet son principal clivage avec le parti de Marine Le Pen, qui était sorti  vainqueur du scrutin en 2014.

Le résultat des élections du 26 mai devrait ainsi sanctionner ou adouber la politique pro-européenne d'Emmanuel Macron, au risque de voir l'échéance se transformer en vote-sanction de la politique du gouvernement. Le résultat des élections donnera également à la liste LREM la légitimité ou non de s'imposer au Parlement européen comme nouvelle force politique au sein du groupe centriste en recomposition l'ALDE.

Du côté du Rassemblement national, réitérer le succès de 2014 apparaît comme impératif pour des raisons de politique nationale. Au niveau européen, la coopération du RN au sein de son groupe politique Europe des Nations des Libertés (ENL) n'apparaît pas comme une priorité du parti, qui favorise toujours un vote contre l'Europe sans chercher à se coordonner avec ses alliés dans les autres pays.

Bataille d'opinion

Derrière le duo de tête, les partis traditionnels affichent des formes diverses après le fiasco de l'élection présidentielle. La liste Les Républicains menée par François-Xavier Bellamy est créditée de 15% des intentions de vote. Les autres listes affichent des intentions de vote inférieur à 10%, à l'image d'Europe Écologie Les Verts (9%), La France insoumise (8,5%) ainsi que la liste  PS/Place publique (5%). Le parti souverainiste de Nicolas-Dupont Aignan (Debout le France), qui a annoncé son ambition de rejoindre le groupe ECR au Parlement européen, le parti de Benoît Hamon  (Générations) et le Parti communiste français (PCF) affichent tous des intentions de vote inférieur à 5%, soit le seuil minimum défini par la nouvelle loi électorale pour obtenir des sièges d'eurodéputés.

Invités surpris de ce scrutin européen, les "Gilets jaunes" seront finalement représentés au sein de trois listes différentes, après de nombreuses semaines d'incertitudes sur la continuité du mouvement sous une forme plus politique.

Alors que ce week-end a marqué la plus faible mobilisation des gilets jaunes depuis le début du mouvement, le Ministère de l'Intérieur a dévoilé le 4 mai l'ensemble des listes  qui participeront au scrutin, parmi lesquelles "Évolution citoyenne" de Christophe Chalençon, "Alliance jaune" du chanteur Francis Lalanne et "Mouvement pour l'initiative citoyenne" s'affichent dans la continuité du mouvement des Gilets jaunes.

La liste "Évolution citoyenne" a déjà affiché une proximité politique avec le Mouvement 5 étoiles. En effet, Christophe Chalençon avait rencontré le numéro deux du gouvernement italien et dirigeant du mouvement 5 étoiles Luigi di Maio, engendrant une grave crise diplomatique entre Paris et Rome.

Le potentiel de ces listes reste très incertain. Créditée d'environ 12% des intentions de vote lors du pic du mouvement, une liste « gilet jaune » ne serait plus créditée que de 2% selon les derniers sondages, publiés avant l'annonce officielle des listes.

Participation en berne

La multiplication des listes risque de perdre un peu plus les électeurs, déjà peu motivés puisque l'indice de participation stagne autour de 40% selon les différents sondages d'opinion. Un taux inférieur à la participation effective de 42,4% enregistrée en 2014.

Le fléau de l'abstention pour les élections européennes n'est pas nouveau. Depuis les premières élections au suffrage universel du Parlement européen en 1979, la participation aux élections européennes a baissé de 18 points, passant de 61% à 42,4%.

De même, du côté des partis politiques, la campagne européenne n'a que peu commencé, l'actualité politique ayant tourné autour de la crise des "Gilets jaunes" et du Grand débat national qui a suivi. LREM et le liste PS/Place publique n'ont d'ailleurs toujours pas publié leurs programme officiel pour les élections à une mois de l'échéance.

Selon le premier sondage publié après l'annonce du nombre record de listes, les partis politiques plus traditionnels semblent souffrir de cet éclatement : ils perdent tous quelques points. La liste PS/Place publique tombe ainsi en dessous de la barre des 5%, en dessous de laquelle les partis n'ont pas d'élus.

Lire aussi : Élections européennes : 4 Français sur 10 dans l'indifférence

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Par Cécile Barbière, Euractiv.fr

(Article publié le lundi 6 mai 2019 à 9h42, mis à jour à 16h14)

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Commentaires 10
à écrit le 09/05/2019 à 18:30
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Ce sont des élections Européennes : qui est le mieux placé pour défendre les valeurs de la France ? A mon avis , le résultat sera un «  mix avec LREM et LR » L’outsider c’est le RN. Bref rien ne va changer en «  Europe » toujours le même scénario ...

à écrit le 09/05/2019 à 14:36
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Ce qui inquiète LREM c'est surtout que les francais qui vont aller voter vont le faire majoritairement contre eux, c'est pour cela qu'ils insistent tant pour que tout le monde y aillent... Croyez vous que les gillets jaunes et les retraités vont rest...

à écrit le 07/05/2019 à 17:31
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Cecile Barrière fait, comme bien d'autres médias, dans le réductionnisme hors sujet en parlant de bataille d'opinion entre les "progressistes" du LREM et les nationalistes du RN. Encore mieux en disant que les Français ont élu un ardent défenseur de...

à écrit le 07/05/2019 à 16:38
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Il ont descendu les retraités au niveau sdf tous septennat confondus Ne pas oublier ils sont issus de 68 .ils ont le droit de vote .ils savent qui mettre au pouvoir

à écrit le 07/05/2019 à 16:25
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Il ressort des différents sondages qu'aucun parti ne peut prétendre détenir la majorité. Il faudra qu'un jour les politiques au pouvoir en tiennent compte, ils feront ainsi l'économie de manifestations du type "gilets jaunes". Macron et son groupe ne...

à écrit le 07/05/2019 à 10:59
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Tant au niveau européen qu’au niveau national la démocratie est bidon. Le peuple est soigneusement tenu à l’écart des prises de décisions, il a seulement le droit d’élire une élite pour prendre les décisions à sa place. C’est un peu comme signer un c...

à écrit le 07/05/2019 à 10:14
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ECONOMISEZ DU PAPIER? 60%ILS N IRONS PAS VOTEZ/ ILS ONT COMPRIS QUE L UE LEURS DEMENDERAS ENCORE PLUS DE SACRIFICE. AFIN DE REMBOURSE NOTRE DETTE 1300MILLIARDS QUE L ON DOIT AUX BANQIERS EUROPEENS???

à écrit le 07/05/2019 à 10:04
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nous étions 17 a avoir votez macron là c'est 25 CONTRE le cercle s"est agrandi ce sera tout sauf macron et surtout qu'il n'arrive pas en tête il a assez massacré les vieux on va le lui rendre

à écrit le 07/05/2019 à 8:32
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"un cocktail dangereux" En effet vu qu'en France les médias de masse nous martèlent avec soit le candidat du front national, soit une ancienne du GUD... Ça fait combien de mois que l'on nous parle que de ce "duel" ? Le fascisme est là, ...

à écrit le 07/05/2019 à 8:16
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M.Macron va probablement payer cher son refus du vote blanc.

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