La BCE se dit prête à parer à toute remontée injustifiée des taux d'intérêt

Tantôt inquiète sur de potentielles vagues de faillites au moment de la coupure des aides publiques, tantôt rassurante sur les conditions de rachat des obligations d'Etat, la Banque centrale européenne veut se montrer active dans un contexte qu'elle juge encore "incertain". "Des hausses importantes et persistantes des taux d'intérêt ne sont pas justifiées par les perspectives économiques actuelles et elles seront contrées", a indiqué l'un de ses porte-parole.
L'incertitude sur le calendrier et la vigueur de la reprise exige que les conditions financières restent favorables pendant longtemps, a déclaré Ignazio Visco.
"L'incertitude sur le calendrier et la vigueur de la reprise exige que les conditions financières restent favorables pendant longtemps", a déclaré Ignazio Visco. (Crédits : Kai Pfaffenbach)

Pour l'heure, pour financer la crise Covid-19, l'Etat français le répète, il emprunte des dizaines de milliards d'euros chaque mois sur les marchés à des taux favorables. Grâce notamment au programme de rachat d'obligation de la Banque centrale européenne (BCE), la France bénéficie de taux d'intérêt très faibles, comme l'a expliqué le directeur général de l'Agence France Trésor (AFT) Anthony Requin dans nos colonnes. Mais ces conditions sont-elles pérennes dans un contexte de reprise économique incertaine en zone euro ?

Oui, si l'on en croit ce lundi Ignazio Visco, membre du conseil des gouverneurs de la BCE. Selon lui, la BCE ripostera à toute remontée brutale des taux d'intérêt qui ne serait pas justifiée par les conditions économiques, a-t-il déclaré.

Dans la situation actuelle,"l'incertitude sur le calendrier et la vigueur de la reprise exige que les conditions financières restent favorables pendant longtemps", a-t-il ajouté lors de l'assemblée annuelle de la Banque d'Italie à Rome.

De fait, si la Commission européenne vient de relever ses prévisions de croissance de 4,3% en 2021 et de 4,4% en 2022 (contre 3,8% prévus précédemment), la reprise n'en reste pas moins fortement conditionnée à la levée des restrictions et aux campagnes de vaccination. "En 2022, le Covid-19 restera un problème de santé publique", a rappelé la Commission.

Dès lors, pour rassurer, "des hausses importantes et persistantes des taux d'intérêt ne sont pas justifiées par les perspectives économiques actuelles et elles seront contrées", a déclaré Ignazio Visco, ajoutant que l'institution était prête à faire "pleinement usage de son programme d'achats d'obligations déjà défini".

Eviter les scénarios de 2008

Le gouverneur de la Banque d'Italie a expliqué que la crise financière de 2008-2009 avait illustré les risques d'un retrait prématuré des mesures de relance monétaire.

D'ailleurs, comme le rappelle Anthony Requin de l'AFT, « lors de cette crise, la France a pu bénéficier de taux beaucoup plus attractifs que lors du choc de 2008-2009 où les taux étaient entre 3% et 4%. La France traverse cette crise avec des conditions d'emprunt bien plus faibles et une maturité d'émissions pour les opérations de l'année bien plus élevée. »

A noter que les Etats européens sont aussi en attente du versement des premiers subsides du plan européen de 750 milliards, prévues en juillet.

De fait, si la BCE affiche son soutien, c'est qu'elle craint dans le même temps des vagues de faillites en cascade au moment de la coupure des aides publiques. Aussi, elle pourrait débattre en juin d'un nouveau programme d'achats d'actifs lors de la prochaine réunion monétaire. Lancé en mars 2020, l'enveloppe globale de son Programme d'achats d'urgence face à la pandémie (PEPP) a été portée depuis à 1.850 milliards d'euros.

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Une inflation symétrique pour plus de stabilité en zone euro

Ignazio Visco a par ailleurs appelé la BCE à passer à un objectif d'inflation symétrique de 2%, affirmant que cela serait "plus clair" que la politique actuelle axé sur un objectif d'une hausse des prix proche de mais inférieure à 2% sur un an.

Un objectif symétrique serait "plus clair et renforcerait l'ancrage des anticipations d'inflation à moyen et long terme", a-t-il déclaré.

Pour l'heure, la Commission prévoit une inflation en zone euro de 1,7% en 2021 et 1,3% en 2022.

Les banques italiennes présentent des faiblesses structurelles

En ce qui concerne l'Italie, Ignazio Visco a déclaré que plusieurs banques du pays, en particulier celles de petite taille, présentaient des faiblesses structurelles et devaient reconsidérer "en urgence" leur modèle économique.

Toute faillite dans le secteur "sera traitée en essayant de faire en sorte que les banques sortent du marché de la manière la plus ordonnée possible", a-t-il ajouté.

Commentaires 3
à écrit le 01/06/2021 à 6:47
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Il est rassurant que la BCE joue pleinement son rôle et ne se laisse pas abuser par la pensée orthodoxe qui a, depuis toujours ,un problème dans la nature de la monnaie en particulier avec le concept de neutralité.

à écrit le 31/05/2021 à 19:18
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Faut bien garantir la capitalisation de la période covid pour les groupes, du coup le risque est explosif par principe de ce qu'ils déclarent !!! Cela veut dire aussi économiquement, que tout l'argent ne sera pour "aucune transformation dans la mesur...

à écrit le 31/05/2021 à 15:46
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c'est tres inquietant ca veut dire quoi ' injustifie'? financer gratuitement des dettes d'etats qui gaspillent sans compter dans des projets sans valeur? en exigeant un deuxieme plan avant que le fric du premier n'ait ete claque?..........ils n'ont ...

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