C'est un vent glacial qui souffle sur le crédit à la consommation. Selon les derniers chiffres de l'Association française des sociétés financières (ASF), le nombre de crédits accordés recule de 2,6% en décembre à 4,12 milliards d'euros, après un repli de 0,5% en novembre. Ce sont les prêts personnels qui accusent le plus fort recul (-23,5%), « très pénalisés par le taux d'usure », selon un porte-parole de l'ASF, mais tous les types de crédit affichent une santé chancelante, qui semble s'aggraver mois après mois.
C'est d'ailleurs ce que constate également la 35ième vague de l'Observatoire des crédits aux ménages, qui sonde chaque année un échantillon représentatif de la population française de 13.000 ménages. Le constat est sans appel : « nous observons la poursuite du repli du taux de détention d'au moins un crédit par les ménages, à un point le plus bas observé depuis les années 80 », souligne Michel Mouillart, professeur des Université, qui a présenté cette étude. Et le phénomène est encore plus marqué pour les crédits à la consommation : 21,8% des ménages détenaient au moins un crédit à la consommation en 2022, contre 24,9 % en 2020 et 27,2% en 2017.Au total, c'est 1,2 million de ménages en moins pour le crédit à la consommation. Et la tendance n'est pas près de se retourner : seuls 3,6% des ménages interrogés pensent souscrire un crédit à la consommation dans les six prochains mois.
Bien sûr, plusieurs facteurs peuvent expliquer ce coup de frein. La montée des inquiétudes sur le pouvoir d'achat, la flambée des prix de l'énergie, la montée des taux, même si les conditions d'accès au crédit restent aujourd'hui encore très bonnes. Dans cet environnement morose, où le pessimisme des ménages n'a jamais été aussi fort, tous les canaux de distribution du crédit sont affectés. Mais plus récemment, l'Observatoire relève pour la première fois une baisse très sensible du taux de détention d'un crédit directement auprès d'une banque ou d'un établissement spécialisé, de 19% à 15% en deux ans.
Restructurations à venir
Le mouvement de désaffection vis-à-vis du crédit à la consommation ne s'explique pas seulement par la guerre en Ukraine. Il remonte en fait à la crise sanitaire. « En 2021, nous n'avons pas connu le rebond de production que l'on aurait pu attendre. C'est un élément qui nous a surpris. La question que l'on pose aujourd'hui est de savoir si nous sommes face à un changement de comportement des ménages, notamment vers une consommation plus durable, ou face à des ménages qui puisent dans leur épargne pour financer leurs investissements », relate un dirigeant d'un des leaders du crédit à la consommation.
Ce qui est certain, c'est que la remontée rapide du coût du refinancement (autour de 4% aujourd'hui), un coût du risque qui reprend ses niveaux d'avant crise (190 points de base pour le prêt personnel chez BNP Paribas) et un manque d'appétence pour le crédit en France obligent les acteurs à resserrer les boulons. Ainsi, un plan social visant la suppression de plus de 900 postes chez BNP Paribas Personal Finance est actuellement engagé en France, avec à la clé, une revue stratégique de la présence internationale du groupe dans le crédit à la consommation.
Même logique chez Oney Bank, filiale crédit à la consommation, du groupe BPCE, qui va devoir revoir ses ambitions à l'international à la baisse. « Nous avons un plan de transformation chez Oney pour asseoir un modèle d'affaires rentable dans le temps. Il s'agit de mettre l'accent sur les expertises et ce plan se fera sans plan de départ », avait indiqué Nicolas Namias, président du directoire de BPCE lors de la présentation des résultats annuels.
Le tableau n'est pas plus rose du côté des fintechs, coincées entre des coûts de refinancement et un risque qui explose. Il ne serait pas surprenant qu'un acteur étranger décide de quitter le marché français..
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