Paiement fractionné : BPCE intègre sa filiale Oney dans un nouveau pôle digital et paiements

Le groupe coopératif (qui regroupe les établissements de la Banque populaire ceux de la Caisse d'épargne) poursuit sa profonde réorganisation, accélérée depuis le retrait de la cote de sa filiale Natixis. Après avoir récupéré les activités d’assurance et des paiements, puis créé une filiale regroupant ses moyens informatiques, BPCE a eu l’idée, encore peu courante dans l’univers bancaire, de rapprocher les expertises digitales, les activités de paiement et sa filiale Oney, leader en France du paiement fractionné, au sein d’un même pôle. De quoi accélérer la digitalisation du groupe et répondre aux nouveaux défis dans le domaine des paiements.
Au sein du groupe BPCE, le rapprochement des expertises numériques et du paiement est devenu une évidence.
Au sein du groupe BPCE, le rapprochement des expertises numériques et du paiement est devenu une évidence. (Crédits : Reuters)

L'organisation d'une entreprise est le reflet d'une stratégie. C'est du moins ce que les manuels de management affirment. C'est en tout cas la conviction du groupe BPCE qui a engagé, depuis le retrait de la cote de sa filiale Natixis en juillet dernier, de profondes réorganisations internes. L'une d'entre elles est passée presque inaperçue. Elle est pourtant aussi stratégique pour le groupe qu'inédite dans le monde bancaire.

En septembre dernier, le groupe a ainsi créé un nouveau pôle, baptisé BPCE Payments & Digital, qui regroupe, sous une même direction, l'ensemble des ressources dans les domaines de l'innovation, du digital, de la data, des paiements, et même du crédit à la consommation, au travers de sa filiale Oney, codétenue avec le groupe Auchan. En tout, quelque 4.000 experts uniquement dédiés au digital et au paiement. Une très « grosse » fintech, en quelque sorte, au service des établissements de la Banque populaire et ceux de la Caisse d'épargne, et des clients du groupe.

Le choix d'une banque digitale internalisée

« Cette organisation répond à la fois à une logique client, collaborateurs, technologique et stratégique », avance Yves Tyrode, directeur général de BPCE Digital & Payments. Qui partage une conviction : « le paiement s'est beaucoup rapproché de la banque en ligne. C'est même une des conséquences inattendues de la directive européenne sur les paiements (DSP2) qui devait favoriser les nouveaux acteurs aux dépens des banques traditionnelles. Mais, finalement, les acteurs forts dans le paiement sont ceux qui ont su également développer leur banque digitale ».

Ce pôle est tout d'abord un centre d'expertises, organisé par filières (digital, data, IA,...) dont le sujet principal est d'apporter une cohérence et une parfaite homogénéité à la stratégique numérique des banques populaires et des caisses d'épargne.

Tout est ainsi développé en interne, en marque blanche, des applications web et mobiles aux parcours utilisateurs, en passant par le design. Le tout, « sans coutures, ni ruptures », dans une approche entièrement internalisée. Après l'échec de l'expérience Fidor, cette fintech allemande achetée à prix d'or en 2016, BPCE a décidé de développer sa propre banque en ligne comme un service bancaire pour l'ensemble de ses clients. Toutefois, aujourd'hui, la banque réfute l'idée d'avoir voulu récupérer Fidor pour en faire une banque en ligne.

« Le digital fait partie de notre core business et notre objectif est bien d'être au même niveau que les pure-players », souligne Yves Tyrode. Tout le groupe bénéfice des mêmes innovations, des mêmes supports techniques, de la même ergonomie, la politique commerciale et la relation clients restant de la compétence des banques ou des caisses régionales. C'est dans le même esprit que la BPCE réunit depuis deux ans toutes les expertises en data et IA.

Une culture data

« Notre préoccupation est d'éviter l'éparpillement des compétences et que chacun fasse son projet data dans son coin. Nous sommes ainsi une des rares banques à disposer d'un seul « data lake » (plateforme de stockage de big data, ndlr), explique le dirigeant.

Les chantiers peuvent ainsi se multiplier en coordination, avec de nombreux cas d'usage notamment en termes de reporting, de relevés de comptes plus lisibles, des scoring ou de lutte contre la fraude, grâce notamment à IA (les transactions cartes sont ainsi checkées en temps réel par un algorithme pour repérer les fraudes).

Et pour ne laisser personne au bord de la route, un ambitieux programme de formation interne sur « la démocratisation de la data » a été mis en place. D'ailleurs, le groupe s'est très tôt distingué, dès 2018, en signant des accords avec les syndicats pour développer en interne des compétences en digital.

Mais le gros morceau du pôle reste les services de paiement, autrefois logés dans Natixis, et désormais regroupés dans BPCE Payments Services (370 millions d'euros de produit net bancaire, 550 salariés), une activité historique de BPCE et un gros acteur sur le marché français (20% de part de marché dans le processing de paiement).

Le mariage du paiement et du crédit

Il est parfois sévèrement jugé par ses pairs pour sa stratégie indépendante, en raison notamment de sa grande proximité avec Visa (premier émetteur de cartes Visa en France, notamment de cartes Visa Only - sans passer par le GIE Cartes bancaires) ou de sa décision de privilégier Apple Pay plutôt que la solution de paiement mobile interbancaire Paylib.

Mais la grande originalité est donc d'avoir rapproché, sous une même casquette, l'activité paiement de la filiale Oney (456 millions d'euros de PNB, 2.500 salariés), leader en France du paiement fractionné. « Le fait d'intégrer Oney dans notre nouveau pôle Digital & Payments leur a permis de changer de dimension en quelque mois », soutient Yves Tyrode. C'est grâce aux synergies qu'Oney a pu lancer son service de paiement fractionné sur carte bancaire Oney +.

Cela lui permet également de remporter des appels d'offres face à des géants du paiement comme Stripe ou Klarna, comme récemment le contrat gagné avec Prestashop, une solution en open source de commerce en ligne. C'est l'alliance entre PlayPug, fintech spécialisée dans les solutions de paiement pour PME, filiale de BPCE Payments Services, et Oney qui a permis de proposer une solution de paiement packagée avec du paiement fractionné. Le fait qu'Oney soit dans la même filière que les paiements a visiblement grandement facilité les choses.

Autre exemple de synergies : les nouveaux terminaux de paiement sous Android que BPCE s'apprête à commercialiser et qui intègrent une « app store », avec de nombreuses fonctionnalités, comme le paiement fractionné, le tout dans une approche selfcare pour le commerçant (toute l'ergonomie a été conçue en interne par les équipes digitales). « C'est quelque chose que nous n'aurions pas pu faire il y a encore quelques mois », se félicite Yves Tyrode.

La route est donc désormais tracée. Et BPCE se dote des moyens, surtout humains, de revenir dans la nouvelle compétition que se livrent banques et nouveaux acteurs sur le terrain des paiements et de l'innovation.

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