Les investisseurs se sont montrés hésitants à Wall Street. Mais, à la cloche de clôture mercredi, la sanction est tombée : les principaux indices boursiers américains ont terminé en nette baisse, de 1,7% pour le Dow Jones à 1,79 % pour le Nasdaq, après la décision de la banque centrale américaine (Fed) de relever ses taux directeurs de 75 points de base, soit désormais dans une fourchette comprise entre 3% et 3,25%. Jamais la Réserve Fédérale n'avait aussi vite durci sa politique monétaire depuis les années 80 sous la présidence du très monétariste Paul Volker. La Bourse est toujours mal orientée ce jeudi et les indices européens sont franchement en territoire négatif. A Paris, le CAC 40 glisse même vers les 5.900 points.
Cette hausse de 75 points de base n'est pourtant pas une surprise : elle était anticipée à plus de 80% par le marché, selon l'indice FedWatch. Mais la fermeté du discours du président de la Fed, Jerome Powell, a laissé la porte grande ouverte à de nouvelles hausses, lors des deux prochaines réunions du comité de politique monétaire en novembre et décembre.
Les banquiers centraux prévoient en effet une hausse d'au moins 125 points de base, ce qui porterait le taux directeur médian à 4,4% et le « taux terminal » - ou pic - à 4,6% en 2023. Et il ne faut plus attendre de baisse des taux avant... 2024. L'illusion, un moment caressé après le précédent relèvement de 75 points de base en juillet, d'une pause dans le resserrement monétaire, est bel et bien complètement dissipée.
Jusqu'à ce que le travail soit fait
Les commentaires de Jerome Powell sont ainsi en droite ligne avec ceux de Jackson Hole (où la Fed accueille une conférence annuelle avec les banques) : priorité donnée à la lutte contre l'inflation au risque de provoquer un atterrissage brutal de l'économie américaine, voire une récession. La parole est ferme et elle ne dévie plus de l'objectif de ramener l'inflation autour de 2% (contre 8,3 % en août).
« Depuis Jackson Hole, le marché a bien intégré que la Fed devra maintenir des taux à un niveau élevé pendant un certain temps pour avoir un effet sur une inflation qui est devenue structurelle », nous confiait un gérant obligataire avant la réunion de mercredi. « Nous allons continuer jusqu'à ce que le travail soit fait », a notamment souligné mercredi Jerome Powell, sans donner d'ailleurs de précision sur le temps qu'il faudra pour juguler l'inflation.
Tous les yeux sont désormais rivés sur les chiffres de l'emploi aux Etats-Unis, devenu le baromètre pour tester l'agressivité de la politique monétaire de la Fed. Une chose est désormais sûre, les investisseurs ne peuvent plus compter sur le soutien de la banque centrale, comme ils ont eu l'habitude de la faire depuis la crise financière de 2008.
C'est ce changement de paradigme qui pousse les marchés, actions et obligations, à la baisse. Après un certain déni, les investisseurs sont ramenés - brutalement- au principe de la réalité, celui d'une longue période avec des taux élevés.
La hausse entraîne la baisse
C'est pourquoi, cette fois-ci, le relèvement des taux de septembre n'a pas été saluée, comme auparavant, par un rebond des actions. A chaque précédente hausse des taux aux Etats-Unis (16 mars, 4 mai, 15 juin et 27 juillet), l'indice S&P avait en effet progressé respectivement de 0,56%, 2,2%, 3 % et 2,6%. Certes, ces rebonds sont vite apparus éphémères, sauf peut-être en juillet, et l'indice S&P affiche une baisse de 20% depuis le début de l'année. De quoi qualifier le marché de baissier.
« Personne ne sait si le processus (de remontée des taux, NDLR) va conduire ou non à une récession », a souligné Jerome Powell, pour qui cela va « dépendre de la rapidité avec laquelle les pressions inflationnistes sur les salaires et les prix vont diminuer ». Laissant au passage peu d'espoir pour un atterrissage en douceur de l'économie. Et, pourtant, la Bourse y croit toujours !
En attendant, les marchés devraient continuer leur glissade en pente douce, même si des voix de plus en plus nombreuses à Wall Street estime que l'essentiel de la baisse est désormais fait. Le marché a besoin de temps pour digérer ce nouveau contexte mais la baisse des valorisations, sur les actions comme sur les obligations, peuvent donner de nouvelles opportunités d'achat.
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