Echec de la fusion EADS-BAE Systems : les plats ne repassent jamais

Après l'échec des négociations avec BAE Systems, EADS craint une offre d'un concurrent sur le groupe britannique. Et quand bien même l'Allemagne reviendrait un jour sur sa position, les conditions de rachat ne seraient pas forcément les mêmes que celles de la négociation avortée.
Copyright Reuters

Après l'échec des négociations entre EADS et BAE Systems, certains observateurs, optimistes, n'excluent pas qu'une deuxième opportunité se présente pour les deux groupes. Selon le droit boursier britannique, impossible certes de relancer un processus pendant les six mois qui ont suivi l'annonce de l'échec. Mais qu'un jour après cette échéance, pourquoi ne pas imaginer un revirement de l'Allemagne qui aurait eu le temps d'ici là de comprendre son erreur historique. A ces optimistes, un acteur de l'opération BAE dans le camp d'EADS répond de manière pragmatique. "Les plats ne repassent pas", explique-t-on chez EADS.

Elections législatives allemandes en 2013

Et quand bien même ils repassaient, l'Allemagne, après les élections législatives 2013, revenant sur sa position : les plats risquent de ne pas avoir la même saveur. L'opération aurait peu de chances de se faire dans les conditions prévues dans le projet qui vient d'avorter. Rien ne dit en effet, que le prix relatif du rachat - avec cette parité 60 %-40 % retenue en faveur d'EADS - qui n'avait jamais été aussi favorable depuis 2004 se retrouve à l'avenir.

Certes, de nouvelles coupes dans les budgets militaires des Etats-Unis ou du Royaume-Uni réduiraient d'autant la valeur du groupe de défense britannique, dont 45 % de son chiffre d'affaires sont réalisés outre-Atlantique. Pour autant difficile de présager l'avenir. "Aujourd'hui, la tendance est en effet à la baisse des commandes dans la défense, explique une source impliquée dans le deal avec BAE Systems. Pour autant, cette tendance peut s'inverser". L'hypothèse d'un conflit en Iran ou ailleurs par exemple pousserait probablement Washington a repassé des commandes massives, ce qui augmenterait probablement le cours de bourse de BAE Systems. A l'inverse, la position d'EADS n'est pas acquise. "Faut-il rappeler que l'aéronautique est une activité cyclique ? Si on ne vend plus un avion parce le trafic aérien chute à cause d'un baril à 150 dollars, ou parce que l'euro s'envole, ou encore parce que le ralentissement de l'économie chinoise calme l'appétit des compagnies chinoises", le cours d'EADS pourrait en souffrir fait-on remarquer dans le camp d'EADS. Aux oubliettes donc une parité faisant que BAE vaut deux tiers d'EADS.

La crainte de voir BAE se rapprocher d'un concurrent

En outre, dans l'hypothèse où BAE Systems fasse l'objet d'une offre et que EADS décide de surenchérir (le groupe peut le faire même dans les six mois qui suivent la fin des négociations selon la règlementation boursière), l'addition risque d'être salé. Se faire coiffer par un concurrent européen ou américain constitue une réelle menace. "Nous craignons ce scénario", confie une autre source également impliquée dans l'opération BAE Systems.

En effet, l'un des enseignements des négociations avec EADS met en lumière un élément crucial : BAE Systems est en vente. "Ses administrateurs ont fait officiellement le choix stratégique de s'adosser car ils sont allés aussi loin qu'ils pouvaient dans leur stratégie en solo. Aujourd'hui le groupe britannique doit rééquilibrer son portefeuille d'activités avec du civil", précise-t-on chez EADS. Si demain un groupe concurrent d'EADS lance une opération sur BAE Systems, le groupe européen aura dû mal à riposter tant que la cicatrice ne sera pas complètement refermée. Cela prendra du temps. Car les négociations complexes et difficiles ont "laissé des traces" entre les entourages des deux groupes, de la France d'un côté et celui de l'Etat allemand. Du coup, un concurrent d'EADS a tout intérêt à lancer une offensive éclair sur BAE Systems.

En Europe, un rapprochement entre BAE Systems et Finmeccanica a du sens, même s'il faudrait au préalable que le groupe italien se déleste de certains actifs, notamment dans les transports. A l'étranger, c'est du côté des Etats-Unis évidemment que la crainte est la plus importante. "Si Boeing bouffe la moitié de BAE, tout le monde le savait. Tout le savait que les plats ne repassent pas", s'emporte un négociateur. "L'Europe a raté une occasion historique".

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaires 13
à écrit le 12/10/2012 à 11:45
Signaler
Voilà le résultat de l'incompétence de nos politiciens depuis 31 ans. Les 5 dernières années nous ont été fatales.

à écrit le 12/10/2012 à 8:08
Signaler
La géopolitique reste instructive, EADS c'est en gros Toulouse, Munich et Hambourg, si eads fusionnait avec bae on aurait eu la perte de munich( pôle défense passé à londres), et finalement si vous regardez londres-toulouse-hambourg vous avez la zone...

le 12/10/2012 à 14:17
Signaler
Je ne pense pas que c'était un problème géographique. Mais plutôt géopolitique alors.

à écrit le 11/10/2012 à 21:38
Signaler
D'un autre côté, Tom Enders et Ian King ont beau jeu d'accuser autrui de leur insuccès commun : quand un groupe a un carnet de commande de 550 milliards d'Euros, et un autre groupe un carnet de moins de 60 milliards d'Euros, on ne propose pas de les ...

le 12/10/2012 à 14:16
Signaler
Pas faux. Mais n'oublie pas que EADS auraient quand même été majoritaire dans la fusion. Cela aurait donné une pierre angulaire à l'Europe de la Défense. Partie remise peut-être...j'espère.

à écrit le 11/10/2012 à 18:24
Signaler
Les européens continentaux n'ont rien à gagner à s'allier avec la perfide Albion. Le bloc américano-occidental est en décadence et son effondrement va engendrer des conflits. C'est pour ça qu'il faut garder notre indépendance car demain l'ennemi vien...

le 12/10/2012 à 14:13
Signaler
Je te rassure, ca n'est pas demain c'est déjà aujourd'hui. La perfide Albion est quand même plus proche géographiquement parlant de nos côtes que celles des USA...

à écrit le 11/10/2012 à 17:55
Signaler
Sur Boursorama tout le monde crie de joix en critiquant la perfide Albion, sur La Tribune on voit un peu plus loin sur le sens économique et l'avenir de l'entreprise :).

à écrit le 11/10/2012 à 17:45
Signaler
Lamentable. L'Europe c'est notre avenir.Mais pas cette Europe. Et je me désole de ces situations. Aucune vision, aucun enjeu, aucun projet. Chacun dans son coin. Chacun dans sa merde. Et merde x merde ( c'est comme 0 x qq chose) , c'est toujours ...

le 11/10/2012 à 23:54
Signaler
Complètement d'accord avec vous. Il manque une personnalité forte, charismatique, qui puisse donner du sens à la construction européenne. Les néo-libéraux ont brisé cet élan, mais en se cachant bien devant les pesanteurs administratives de l'Union Eu...

le 12/10/2012 à 2:00
Signaler
Je ne suis pas sûr que vous utilisiez le mot libéral au sens exact du terme. Je ne vois pas en quoi cette UE est libérale, ni la Commission, ni leurs pompiers, fussent-ils pyromanes. A vrai dire, je ne vois que des autocrates, d'ex maoistes ou trotsk...

à écrit le 11/10/2012 à 17:23
Signaler
Bien fait pour l'Europe elle nous en merde assez comme ça, c'est les ricains qui vont l'avoir ...et hop !

le 12/10/2012 à 14:10
Signaler
Lorqu'on ne connait pas le sujet, on se tait...

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.