Restera ou restera pas ? Ou en d'autres termes le PDG de Nexter et coprésident de KNDS, la filiale à 50/50 entre Nexter et Krauss-Maffei Wegmann (KMW) Stéphane Mayer sera-t-il reconduit dans ses fonctions dans les deux sociétés. La réponse appartient à l'État, qui contrôle 100% de Giat Industries, actionnaire direct de KNDS (50%). En tout cas, la question occupe beaucoup les esprits chez Nexter et dans la filière française de l'armement terrestre, qui soupçonne le gouvernement de vouloir profiter de cette période de transition pour confier les clés de l'armement terrestre à l'Allemagne. Ce qui entraine depuis quelques semaines une très grande fébrilité dans la filière en France, et bien évidemment chez Nexter également. Un nom a même circulé pour le remplacement de Stéphane Mayer, celui de Martin Sion, président de Safran Electronics & Defense. A confirmer.
Évolution de la gouvernance de KNDS
Le dossier KNDS s'est d'ailleurs accéléré ces derniers jours au ministère des Armées mais également au ministère de l'Économie, via l'Agence des participations de l'Etat (APE), Bruno Le Maire ayant fait preuve d'un appétit pour le sujet franco-allemand. Les deux ministres se sont rencontrés il y a une dizaine de jours environ pour adopter une position commune, selon nos informations. Ce qui est sûr, c'est que la gouvernance de KNDS va évoluer. Au lieu de deux coprésidents à la tête de KNDS (Stéphane Mayer et Frank Haun, président du conseil de direction de KMW), les actionnaires français (État) et allemand (la famille Bode-Wegmann, via la holding Wegmann & CO Gmbh) ont acté une évolution. Il est fort possible : un président du conseil d'administration et un directeur général.
Une assemblée générale de KNDS, dont le siège est à Amsterdam, doit être convoquée pour entériner ce changement. Elle doit l'être sous peu, avant le 15 décembre, date de l'échéance des mandats de Stéphane Mayer et de Frank Haun. Seule certitude, elle se fera en visioconférence.
KNDS déjà sous pilotage allemand ?
En dépit de la parité actionnariale dans KNDS (2,5 milliards d'euros de chiffre d'affaires pour 7.873 salariés en 2019), on assiste à l'instauration lente mais progressive d'un leadership allemand au sein de KNDS, Nexter s'inscrivant de plus en plus dans un rôle d'équipementier de KMW. Dans le terrestre, il faut "accepter un vrai partage avec des partenaires fiables comme les Allemands pour construire une industrie d'armement terrestre où peut-être la France ne maitriserait pas tout mais à deux, elle aurait un accès autonome à des équipements terrestres, ce qui répondrait à notre souveraineté dans la durée et de façon efficiente", explique-t-on au sein de la Direction générale de l'armement (DGA).
C'est déjà le cas dans les produits communs en cours de développement, qui sont sous pilotage allemand au sein de KNDS : le char E-MBT qui sera mis en service avant le MGCS (Main Ground Combat System), voire MGCS quand le programme sera définitivement lancé par la France et l'Allemagne. Sur le Boxer T40, la tourelle de 40mm de Nexter sur châssis allemand est proposée pour le Royaume-Uni et potentiellement sur d'autres prospects à l'export. KMW assume son rôle d'intégrateur tandis que Nexter intervient comme équipementier de KMW au sein de KNDS.
En outre, les rares campagnes commerciales conjointes sont également sous pilotage allemand au sein de KNDS, qui possédait fin 2019 e un carnet de commandes de 9,6 milliards d'euros : Royaume-Uni (T40), Pologne (E-MBT), commercialisation des munitions Nexter sur des canons KMW. Au-delà, Français et Allemands continuent à se faire de la concurrence sur certains produits (Aravis contre Dingo, VBCI contre Boxer...). Enfin, les opérations de fusion/acquisitions sous initiative française ont été déclinées ou sabotée par la partie allemande. Notamment le rachat d'Arquus. Le prix proposé par KNDS sur proposition allemande, a été jugé trop bas par le groupe Volvo (entre 300 et 350 millions d'euros alors que le groupe suédois en attendait au moins 500 millions d'euros, voire 700 millions).
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