L'objectif de Latécoère ? Ne pas rater le train du MOM de Boeing !

L'équipementier aéronautique toulousain transforme son organisation industrielle dans le but d'être suffisamment compétitif d'ici à 2020 pour être sélectionné par Boeing pour son nouvel avion destiné à contrer l'A321 sur le segment du "Middle of the Market".
Fabrice Gliszczynski
Agacé par le succès de l'A321 (photo), Boeing travaille sur une réponse à apporter sur le marché du « Middle of the market ».

Le programme « Middle of the Market » (MOM) sur lequel travaille Boeing excite tous les équipementiers et motoristes de l'aéronautique. Le directeur général de Safran, Philippe Petitcolin l'indiquait récemment à La Tribune : censé succédé au B757, cet avion de 200 à 300 sièges, avec son cœur de marché sur le segment du 220-250 sièges, est « la  priorité des motoristes ».

Deux horizons de temps

L'équipementier aéronautique français Latécoère ne dit pas autre chose. Le MOM est au cœur de son programme stratégique « Transformation 2020 », présenté en juin dernier. Au point même d'en dicter le tempo.

« Les horizons de temps dans l'aéronautique sont un élément clé dans notre dispositif. Nous sommes confrontés à deux horizons de temps différents. Le premier, qui concerne les 3 ou 4 prochaines années, correspond à un environnement aéronautique mature avec des avionneurs qui ont comme priorité de capitaliser sur les avions actuels », expliquait ce vendredi Olivier Regnard, le directeur général délégué de Latécoère lors de la présentation des résultats financiers du premier semestre.

Une période dont l'enjeu pour les fournisseurs (il est de taille) est essentiellement de répondre à la hausse des cadences des versions remotorisées de l'A320 ou du B737.

« Le deuxième horizon de temps est plus lointain et correspond au besoin du marché de lancer de nouveaux programmes. Ce besoin viendra du MOM dont le marché s'accorde sur un lancement entre 2020 et 2025. Si nous ne savons pas de qui viendra le premier coup, nous sommes certains que qu'il s'agira d'un blockbuster. Nous ne pourrons pas être absents de ce marché. Le train ne repassera pas », a-t-il précisé.

Agacé par le succès de l'A321, Boeing travaille sur une réponse à apporter sur le marché du « Middle of the market ». En juillet, son PDG, Dennis Muilemburg, indiquait qu'un tel avion pourrait voir le jour en 2024.

Transformation industrielle

L'objectif de Latécoère est clair :

« Il faut être compétitif au moment du redémarrage des investissements des grands programmes  aéronautiques », a de son côté expliqué Pierre Gadonneix, le Président du conseil d'administration de l'équipementier toulousain.

Ce qui passe donc par la nécessité d'avoir un outil industriel en mesure l'être à cette échéance. D'où le plan de transformation industrielle lancé en juin dernier.

« Toute l'empreinte industrielle du groupe est repensée et optimisée en France et à l'étranger avec un redéploiement sur des segments de marché sur lesquels Latécoère est leader (portes, meubles avioniques, les harnais), mais aussi avec la mise en place d'une certaine diversification sur les marchés adjacents sur lesquels nous avons une compétence et une légitimité, et avec enfin une réintégration d'un certain nombre d'activité, a précisé Pierre Gadonneix.

Ce sera donc à Yannick Assouad, qui arrivera en novembre de chez Zodiac pour diriger Latécoère, de mener à bien cette stratégie.

Diminution de l'empreinte industrielle en France

Déjà entamée, la stratégie d'accroître l'empreinte industrielle à l'étranger n'est pas remise en cause (aujourd'hui la moitié des effectifs du groupe travaille à l'étranger). Elle permet de se rapprocher de certains clients et/ou de produire en zone dollars et dans des pays à bas coûts. Déjà présent en République tchèque, au Mexique, en Tunisie et au Maroc, l'équipementier toulousain va ouvrir un site en Bulgarie pour soulager son usine de Prague, qui peine à embaucher.

« C'est le chemin que nous avons pris mais avec l'objectif est de garder nos  compétences spécifiques (bureaux d'étude et les programmes d'usinage, de tôlerie) en France », a indiqué Olivier Regnard, précisant que « la partie aérostructures était elle aussi majoritairement basée dans l'Hexagone ». Le prix du transport jusqu'au site assemblage compense en effet le gain apporté par une production dans un pays low-cost.

"Notre ADN est toulousain"

« Nous maintenons le champ de décision à Toulouse, notre ADN est toulousain », fait valoir Olivier Regnard. S'il ferme l'usine près de Tarbes, Latécoère va investir une vingtaine de millions d'euros dans la création d'un nouveau site de production dans la région de Toulouse, lequel sera spécialisé dans l'usinage et la chaudronnerie.

« Nous allons réinternaliser 30% de nos besoins contre 80 à 90% aujourd'hui. A force d'avoir sous-traité, nous avons perdu la connaissance du prix des pièces », a expliqué Olivier Regnard. Latécoère le fait en France car « cette activité est peu consommatrice de main d'œuvre mais demande une grande compétence ».

Le recentrage sur ses points forts se fera sans Latécoère Services, en cours de session. Un choix qui a surpris certains observateurs dans la mesure où cette activité est très rentable.

Plus-value

«Nous nous sommes aperçus que les synergies entre les bureaux d'étude et l'activité de services étaient beaucoup plus faibles que nous le pensions, et que et le carnet de commandes et les perspectives apparaissaient moins favorables », a indiqué Olivier Regnard.

Ce dernier a fait état d'une plus-value « significative », supérieure à 30 millions d'euros, « couvrant les coûts de restructuration ». Le groupe a passé une provision de 31 millions pour financer le plan de sauvegarde pour l'emploi (PSE) lié à la fermeture du site près de Tarbes qui prévoit plus de 200 suppressions de postes. Cette provision a impacté les comptes du premier semestre. Latécoère en effet affiché une perte de 18,6 millions d'euros contre 400 000 euros l'an dernier.

Fabrice Gliszczynski

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Commentaires 3
à écrit le 10/10/2016 à 9:12
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Quel plaisir de voir ces sociétés françaises attentives aux marchés mondiaux avec des anticipations industrielles. Quel plaisir par rapport à ce pessimisme français quelle claque à tous ces politiques incapables de faire vibrer la France comme le fon...

le 10/10/2016 à 13:19
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Quel plaisir aussi de les voir délocaliser sous d'autre cieux

le 10/10/2016 à 19:41
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Bonsoir, tout à fait d' accord avec votre commentaire. " HAVE FAITH IN YOUR WILDEST DREAM ". " NO WORRIES "

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