Lutte contre les feux de forêts : deux nouveaux Canadair attendus en 2026 et 2027

Le « réarmement aérien d’urgence » voulu par Emmanuel Macron pour mieux lutter contre les feux de forêts sera long, très long. Les deux premiers Canadair supplémentaires sont attendus au mieux seulement en 2026 et 2027 alors que cet été, près de 72.000 hectares de forêts ont été détruits par les flammes.
Michel Cabirol
La France a prévu de disposer de 16 Canadair
La France a prévu de disposer de 16 Canadair (Crédits : Viking Air)

Cinq ans. Le groupement des moyens aériens (GMA) de la Direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises (DGSCGC) va devoir attendre au mieux cinq ans pour recevoir les deux premiers Canadair de nouvelle génération DHC-515, qui sont financés en grande partie par la Commission européenne (90%). "Selon les prévisions les plus optimistes, le premier avion français serait attendu en 2026, le deuxième en 2027", a expliqué mardi le ministère de l'Intérieur dans une réponse à une question écrite du député de la Gironde Grégoire de Fournas (RN) posée début août. Et selon le ministère, comme la France a été "le premier pays à avoir contracté une subvention GRANT avec la Commission européenne, elle est prioritaire dans le calendrier de livraison des appareils".

"Afin de pouvoir passer les marchés au plus vite et donc être livré assez rapidement après les deux premiers, les autorisations d'engagement sont prévues dès le projet de loi de finances 2023", a précisé le ministère de l'Intérieur, dont le projet de loi d'orientation et de programmation (LOPMI) a été adopté le 14 décembre. Il prévoit une trajectoire financière en croissance jusqu'en 2027, passant de 22,09 milliards d'euros en 2023 (contre 20,78 milliards en 2022) à 25,35 milliards en 2027. Soit une hausse de 22% par rapport à 2022.

Le GMA dispose de 450 personnels dédiés à l'utilisation, à l'entretien et au fonctionnement des 22 avions du groupement d'avions de la sécurité civile (GASC) et des 35 hélicoptères du groupement d'hélicoptères de la sécurité civile (GHSC). La flotte d'avions de la sécurité est actuellement composée de 3 Beech, 12 Canadairs et 7 Dash. Le GMA va également recevoir au 1er semestre 2023 un Dash supplémentaire, le dernier des six appareils commandés en janvier 2018.

Renouvellement complet de la flotte

Le 7 mai 2020, la DGSCGC a demandé le lancement d'un marché d'acquisition de deux DHC-515 (future déclinaison du CL-415) cofinancés par le programme RescUE de la Commission européenne. Au terme d'un long processus entre les six pays candidats (France, Espagne, Italie, Croatie, Grèce, Portugal), la Direction générale pour la protection civile et les opérations d'aide humanitaire européennes de la Commission européenne (DG ECHO) et la société De Havilland Canada, le lancement de la chaîne de production a été officiellement annoncé le 31 mars 2022, sécurisant ainsi un volume de commandes de 22 DHC-515 : 12 appareils, dont deux pour la France, cofinancés par la DG ECHO et 10 autres à la charge des pays acquéreurs, dont deux supplémentaires pour la DGSCGC. Soit un coût estimé par le ministère à 55 millions d'euros par avion, soit 110 millions d'euros au total avec les hausses économiques pour les deux premiers appareils.

"L'estimation des coûts est particulièrement difficile à ce stade puisque l'on ne peut connaître à l'avance le prix final après négociation", a toutefois précisé le ministère de l'Intérieur.

Par ailleurs, le président de la République a acté fin octobre le renouvellement des 12 Canadair et l'augmentation de la flotte pour la porter à 16 appareils en incluant les deux achetés avec la Commission européenne et deux autres acquis sur fonds propres. Il est donc prévu d'atteindre une cible de 16 appareils "dans un premier temps par un complément d'appareils, puis par le renouvellement complet de la flotte existante", a souligné le ministère. En outre, il rappelle que la flotte des Dash, initialement composée de deux avions en 1995, a été renforcée avec la notification en janvier 2018 d'un marché passé par la Direction Générale de l'Armement (DGA) au profit de la DGSCGC pour l'acquisition de six appareils neufs supplémentaires aux capacités multi rôles améliorées.

"L'action des Dash, complémentaire à celle des Canadair, est dimensionnante pour parvenir à maîtriser et contenir les feux, notamment par le dépôt de retardant comme cela s'est vu durant l'été", a indiqué le ministère.

Enfin, la DGSCGC, qui utilise de manière très complémentaire lors de la saison des feux de forêt deux hélicoptères bombardiers d'eau loués à une société privée, étudie l'acquisition dans le cadre RescUE de deux hélicoptères lourds avec une capacité de largage de 4.000 litres. En outre, le renouvellement de la flotte d'hélicoptères prévu dans la LOPMI, permettra "de disposer à terme d'une capacité de largage de 800 à 1000 litres grâce à la puissance accrue de ces nouveaux appareils", a précisé le ministère. Ils seront déployés dans les départements disposant d'une base hélicoptère. Ces appareils devraient disposer à terme d'une capacité de travail de nuit pour le largage d'eau. Des hélicoptères jugés nécessaires par la DGSCGC. Devant l'ampleur des feux de l'été dernier, elle avait réquisitionné jusqu'à huit hélicoptères supplémentaires. Les locations d'hélicoptères seront donc poursuivies et complétées à l'été 2023, a annoncé le ministère.

Une disponibilité de la flotte jusqu'à 100% en été

Critiquée par la cour des comptes dans un cinglant réquisitoire, la maintenance de la flotte, dont la grande majorité des opérations est effectuée de nuit lors de la saison estivale, est externalisée. Elle a été confiée à la société Sabena Technics jusqu'en 2027. Selon la Cour des comptes, le montant des crédits de paiement affectés en 2022 au maintien en condition opérationnelle (MCO) des avions s'élève à 56,6 millions d'euros. Interrogé fin juillet à l'Assemblée nationale sur la flotte de la sécurité civile par le député Pierre Morel-À-L'Huissier, le ministre de l'Intérieur et des Outre-mer Gérald Darmanin avait assuré que sur les douze Canadair de la flotte, dix étaient prêts à décoller, deux en maintenance. « À l'heure où je vous parle, on n'a pas les avions qu'on devrait avoir», avait pourtant affirmé en juillet dernier à l'AFP Christophe Govillot, porte-parole du Syndicat national du personnel navigant de l'aéronautique civile (Snpnac).

Ce contrat prévoit un contrat opérationnel à atteindre, variable en fonction de la saisonnalité (pour intégrer les périodes de maintenance). "Durant l'été, la demande de disponibilité de la flotte peut atteindre 100% en cas de risque majeur avéré. Cette contrainte exigeante de disponibilité (qui n'a pas son équivalent dans les autres flottes étatiques) impose l'organisation de la maintenance durant la saison feux en H24", a rappelé le ministère. Le cycle d'organisation de la maintenance permet de faire toutes les visites de maintenance lourdes et longues durant la saison d'hiver de manière à disposer d'une flotte à plein potentiel au printemps et prête pour la saison des feux de forêt.

"En cas de non-respect des exigences du contrat, la société se voit alors imposer des pénalités contractuelles. Le suivi de l'application de ce contrat est suivi de manière particulièrement attentive par les groupements des moyens aériens", a fait observer le ministère.

Au-delà de la maintenance de cette flotte d'avions, s'est rajoutée une trajectoire inflationniste du prix des pièces détachées et une hausse régulière du coût d'entretien (notamment pour la flotte de CL-415). Car la difficulté principale réside dans le fait que ces appareils n'étant plus produits actuellement, il existe au niveau mondial de grandes difficultés d'approvisionnement de pièces qui peuvent impacter plus longuement certaines réparations, y compris en été. Plus l'activité des feux de forêts est dense durant la saison estivale et plus ces opérations sont importantes et nombreuses.

Michel Cabirol

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Commentaires 3
à écrit le 29/12/2022 à 2:16
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Je trouve vraiment dingue cette époque, nous avons des pompiers dont une grande partie sont bénévoles, eux ont besoin de camions pour nous protéger et ceux (les sociétés) qui en fabriquent ne peuvent plus les fournir car Renault ne leur livrent pas ...

à écrit le 28/12/2022 à 19:43
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4 et 5 ans pour construire 2 "zincs"! Sont pas rapides les Canadiens. Si Airbus ou Boeing travaillaient à cette vitesse ils n'auraient pas beaucoup de clients. Ce sont sans doute des avions complexes les Canadair, mais chez Canadair ils ne partent pa...

à écrit le 28/12/2022 à 9:41
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puisque les test son reussie par l'espagne avec le 400m pour quelle raison la france ne prend pas sa part elle renforcerez la capacite militaires et assurerez a la protection civil une plus large capacites mais voila les dirigeant francais n'ont...

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