Mais pourquoi Le Drian a-t-il gonflé les exportations d'armes françaises de 2016 ?

Par Michel Cabirol  |   |  830  mots
Jean-Yves Le Drian restera l'un des ministres de la Défense les plus respectés de ces cinquante dernières années.
La France ne battra vraisemblablement pas le record d'exportations d’armements en 2016. Même si Jean-Yves Le Drian l'a rêvé...

Cela ne lui ressemble pas... Mais alors vraiment pas. Le ministre de la Défense Jean-Yves Le Drian n'a pas besoin d'un nouveau record des exportations d'armements pour s'enorgueillir d'un très bon bilan de son passage au ministère de la Défense dans le domaine si particulier des ventes d'armes. D'une façon générale, il restera l'un des ministres de la Défense les plus respectés de ces cinquante dernières années. Il est même déjà très regretté par les industriels de la défense. D'ailleurs, les très longs et chaleureux applaudissements à la fin de son discours lors de la cérémonie des vœux 2017 au musée de la Marine - ses derniers - en sont l'illustration parfaite.

Et pourtant, le ministre, d'habitude sobre, a annoncé que les exportations d'armements avaient atteint un nouveau record en 2016 à plus de 20 milliards d'euros, grâce à la vente à l'Inde du chasseur Rafale et au mégacontrat avec l'Australie pour des sous-marins. C'est vrai pour le Rafale en Inde, qui est d'ailleurs l'un des plus importants contrats français de l'histoire de l'exportation d'armement français (8 milliards d'euros). Mais malheureusement le contrat des sous-marins pour la marine australienne n'est pas mis en vigueur à ce jour (34 milliards d'euros dont 10 à 15 milliards pour DCNS maître d'oeuvre de la plateforme  Shortfin Barracuda).

"En 2015 nous avons réalisé le chiffre historique de 17 milliards d'euros d'exportations (16,9 milliards, ndlr). Pour 2016 le bilan n'est pas encore consolidé (...) mais nous avons atteint un nouveau sommet avec plus de 20 milliards d'euros de prises de commandes", a estimé le ministre, lors de ses vœux aux armées. Ces ventes record sont dues à "de nouveaux succès à l'exportation", a souligné Jean-Yves Le Drian. "Je pense aux Rafale, je pense à la conclusion du plus grand contrat de l'histoire de l'export français avec l'Australie", a-t-il expliqué.

Un contrat découpé en tranche

Cette commande ne peut pas être comptabilisée dans le bilan de 2016, à l'exception d'un premier contrat attribué à DCNS en septembre dernier de l'ordre de... 300 millions d'euros pour la conception des futurs sous-marins. D'ailleurs, ce contrat devrait être découpé en tranche au cours des prochaines années par Canberra. Et donc il devrait bénéficier aux successeurs de Jean-Yves Le Drian, qui restera l'un des grands artisans de la sélection de DCNS par la marine australienne. En décembre dernier, le ministre a signé à la demande de l'Australie un document très important - un accord inter-gouvernemental (AIG) -, qui engage la France auprès de l'Australie dans le cadre du partenariat sur les sous-marins.

Mais il n'a pas valeur de contrat commercial. D'ailleurs l'Australie peut encore changer de fournisseur même si son choix en faveur de DCNS a été très argumenté et sérieux. "Le ministre Le Drian et le Premier ministre australien Malcolm Turnbull agréeront officiellement l'accord intergouvernemental, le cadre légal qui gouvernera pendant les décennies à venir le partenariat entre l'Australie et la France sur les sous-marins", avait expliqué la ministre de la Défense australienne, Marise Payne, un peu avant la signature de cet AIG.

Des exportations à un très haut niveau

Même si le record de 2015 n'est vraisemblablement pas battu en 2016, les exportations d'armements français atteignent un très haut niveau depuis l'arrivée de Jean-Yves Le Drian. Elles avaient déjà atteint 16,9 milliards d'euros en 2015, grâce aux premiers contrats de vente de l'avion de combat Rafale en Égypte (24 appareils) et au Qatar (24), soit plus du double de l'année précédente (8,2 milliards d'euros), un montant qui était déjà excellent. Les exportations françaises se situaient en général entre 4,5 et 6 milliards d'euros.

"Notre équipe, votre équipe a créé des dizaines de milliers d'emplois en France et continue en même temps à garantir l'autonomie stratégique et indépendance de notre pays", s'est félicité jeudi soir Jean-Yves Le Drian.

2016, une très belle année encore

En 2016, outre le Rafale de Dassault Aviation en Inde et DCNS en Australie (300 millions d'euros environ), Airbus Helicopters a notamment signé deux, voire trois contrats importants à l'export : Koweït (30 Caracal pour 1 milliard d'euros) qui pourrait être comptabilisé en 2016, Grande-Bretagne (formation des pilotes d'hélicoptères des forces armées britanniques pour environ 650 millions d'euros), Singapour (16 Caracal pour environ 500 millions).

Les deux constructeurs de satellites (Airbus Space Systems et Thales Alenia Space) ont également remporté des contrats significatifs. Thales et Airbus ont signé un contrat pour un satellite de télécoms militaires en Égypte pour 600 millions d'euros. Pour sa part, Airbus a remporté en juin dernier un satellite de télécoms militaires indonésien SatKomHan en juin dernier par Airbus (850 millions de dollars).

Au sujet des très grosses déceptions, il y a le Qatar (3 frégates), qui a préféré Fincantieri à DCNS (5 milliards environ). Et puis, la Pologne qui a cassé les négociations avec Airbus Helicopters portant sur l'achat de 50 Caracal (3 milliards d'euros).